Us by Night festival
Culture

Dans le studio de trois artistes belges prévu·es au festival Us By Night

On sera également présent·es au festival pour y animer quelques débats.
KM
Ghent, BE
Nine Louvel
Brussels, BE

Pendant le dernier week-end de septembre, vous pourrez aller faire un tour au festival de design Us By Night. Au programme cette année, plus de 70 artistes réunis autour d’expositions, de concerts, de performances visuelles et de conférences.

Cette année, Us By Night transforme le Waagnatie près de l'Escaut en un gigantesque lieu d'exposition, où vous pourrez assister à des performances artistiques en direct et à des projections gigantesques bière en main - cela va sans dire - du jeudi 26 au samedi 28 septembre.

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On a discuté avec trois artistes qui défendent l'honneur belge parmi tous les talents internationaux de Us By Night. Qui ça au juste? Emma Thyssen: une illustratrice (et son lapin prénommé Flof qu'elle a trouvé dans la rue), Toykyo: un collectif de designers qui font des trucs cool pour le festival WOO HAH!, et Gilles De Brock, qui a séduit Nike à l’âge de 19 ans avant même d’avoir appris à faire sa première facture.

Emma (39 ans, Anvers) - Illustratrice

Ces derniers temps, Emma a passé beaucoup de temps à plafonner, peindre et forer, car elle est en plein déménagement. Mise à part ça, elle est aussi une illustratrice talentueuse, et s’occupe elle-même de la conception de ses livres. De ses livres pour enfants, plus exactement.

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VICE: Hey Emma. Comment ça se passe la création de livres pour enfants?
Emma: Je pense que c'est très cool, parce que tu n'as pas cette pression d’être “hype”. Lorsque les adultes me demandent de créer un flyer, je sais souvent déjà ce qu’ils veulent: un truc à la mode. Mais les enfants ne sont pas comme ça. Quand les enfants sont attirés par mon travail, ce n’est pas par effet de mode. Leur monde est très sincère et honnête, ce qui rend mon travail intemporel. C'est un monde dans lequel j’évolue facilement.

De quoi parlent tes livres?
Par exemple, le livre « Blobvis » traite du … et bien du blobfish, élu l'animal le plus laid du monde et menacé d’extinction, mais tout le monde s'en fiche, parce qu'il est moche. Dans le livre, le Blobfish part à la recherche de l'amour pour se reproduire. Mais comme il est laid, la recherche s'avère assez difficile. L'histoire est un mélange de fiction et de réalité. Et dans la marge, vous apprenez tout sur la reproduction des animaux et certains faits scientifiques.

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Au final, tes livres sont aussi pour adultes…
Oui, je le pense aussi.

« Le monde des enfants est très sincère et honnête, ce qui rend mon travail intemporel. »

Est-ce que c’est ta première fois à Us By Night?
Rizon, l'organisateur, m'avait proposé de venir pour la première édition. J'avais dit non parce je ne pensais pas être capable de parler devant autant de monde. Il ne s’est pas découragé et m’a recontactée cette année. J’y ai pas mal réfléchi et j’en suis arrivée à la conclusion que je ne pouvais pas passer à côté d’une telle opportunité juste par peur d’un challenge. Donc j’ai fini par céder.

Que vas-tu faire à Us By Night?
Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour la préparer, mais je vais donner une conférence! En résumé, j'expliquerai comment fonctionne le monde des livres pour enfants, et comment on peut en vivre.

Justement, comment en vis-tu?
Je travaille avec les droits d'auteur. Cela signifie que je ne reçois que 6% du prix de vente de chaque livre vendu. Mais les livres pour enfants ne peuvent jamais coûter plus cher que 20 euros. En plus de ça, on se situe dans une zone linguistique relativement petite. Je réussis quand même à m’en sortir. Mais ce qui est cool avec les livres pour enfants, c'est qu'ils sont souvent traduits. Par exemple, le livre que j'ai produit avec Kim Crabeels « Laika » a été traduit en polonais et sera bientôt publié en coréen.

Ce qui m'aide aussi, c'est que je travaille pour différents éditeurs. Si vous n'avez qu'un seul éditeur, vous ne pouvez publier que deux livres par an. Mais je travaille pour cinq maison de publication, donc je peux publier dix à quinze livres par an. Si je ne le faisais pas, il me faudrait un travail à temps partiel. À côté de ça, je travaille aussi pour les villes et les communes. Lorsque je crée un livre, je le pense comme une invitation au voyage pour l’enfant mais également pour ses parents, grands-parents, ou n’importe quel autre lecteur. Sa lecture reste un instant de partage.

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Quel a été le projet le plus marquant de ta carrière jusqu’ici?
J'ai pu créer une collection pour enfants pour le magasin de vêtements JBC. En gardant à l’esprit le besoin de flexibilité du vêtement et son adaptation à l’environnement quotidien de l’enfant, j'ai conçu des vêtements de jeu d'extérieur qui peuvent tout simplement être portés à l'envers. Une tache sur votre t-shirt? Il suffit de le mettre à l'envers et vous en avez un nouveau. Même si j'ai vraiment aimé créer avec des textiles, la littérature pour enfant reste mon terrain de jeu préféré.

Esther (33 ans) et Joeri (37 ans) de Toykyo - Studio de graphisme (Gand)

Pensée à la base comme une agence graphique, Toykyo a réussi à casser les codes et transformer notre vision du graphisme en mettant l’accent sur la combinaison d’illustration et design. En constante recherche de nouveau intérêts, les membres de Toykyo comptent bien réinventer le design à la belge.

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Esther, Jan, Hubertus en Joeri.

VICE: Hey! Vous avez rebrandé votre concept Toykyo il y a quelques années. Pourquoi ce changement?
Joeri: Avant, on était une sorte de collectif, mais pas une agence graphique. On est arrivés à un stade où on a réalisé que certains choix s’imposaient, et c’est là que l’agence s’est créée, modifiant le concept de base. Depuis on a pas cessé de grandir.
Esther: Le slogan « Let’s play », c’est parce qu’on attache tous les deux beaucoup d’importance au plaisir dans notre travail. Et aux clients! Ce slogan est affiché ici, au bureau, pour toujours nous rappeler de prendre du plaisir dans ce qu’on fait.
Joeri: Oser expérimenter et aimer ton travail est vraiment très important pour nous. C’est quelque chose qui se transmet et se verra dans le résultat final.

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J'ai vu sur votre compte Instagram que vous avez déjà travaillé pour de grandes marques, telles que Nike ou Duvel. Comment sont nées ces collaborations?
Joeri: Au fil des années, l’agence s’est construit une image très spécifique, avec un style bien à elle. C’est quelque chose que les marques recherchent. Elles nous trouvent en général via Instagram, donc on fait attention à toujours mettre à jour le notre, c’est une sorte de vitrine pour l’agence. Auparavant, ces marques s'adressaient bien plus souvent aux grandes agences de publicité.

« Oser expérimenter et aimer ton travail est vraiment très important pour nous. »

Que pensez-vous qu'ils trouvent si attrayant chez Toykyo?
Esther: Le côté ludique, je pense. On a l'air professionnels, tout en conservant une fraîcheur malicieuse.
Joeri: On essaie toujours de donner ce petit plus. Quand on a eu l’opportunité de concevoir l’affiche du festival de hip-hop néerlandais WOO HAH! on a également fait notre propre line-up! Le hip-hop et nous c’est une histoire d’amour, et on voulait montrer aux organisateurs qu’on savait de quoi on parlait. C’est ce petit extra dont je veux parler. Si on sait faire quelque chose pourquoi ne pas se donner les moyens de le réaliser?

Est-ce votre première fois sur Us By Night?
Joeri: On y est chaque année depuis la première édition en 2016. Et je pense que je parle au nom de nous tous quand nous disons que nous sommes vraiment fiers de Us By Night et du fait qu'un tel festival ait lieu en Belgique. Chaque année on rencontre de nouvelles personnes incroyables et on est immergés dans la créativité des autres. C'est super sympa.

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Qu’est ce que vous nous préparez pour cette année?
Esther: On a déjà quelques idées, mais rien de concret pour le moment. On sait déjà qu’on fera une conférence!

Gilles (30 ans, Anvers) - Graphiste

Gilles a beau travailler comme graphiste pour des marques une partie de son temps, sa priorité reste son travail personnel. Cet artiste réalise des carreaux en céramique, et fait d’affiches sérigraphiées des tapis et écharpes.

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VICE: Salut Gilles. En plus de tes créations finales, est-ce que tu construis toi-même les machines qui te servent à les imprimer?
Gilles: J’avais envie de faire des carreaux en céramique, qui sont traditionnellement peints à la main pour obtenir les couleurs et les effets adéquats. Mon travail est centré sur l’expérimentation avec les machines, donc j’ai développé un logiciel qui permet d’imprimer ces carreaux grâce à la technologie et non plus l’artisanat.

Depuis combien de temps travailles-tu là-dessus?
Ça m’a pris six mois. J’avais vraiment sous-estimé la quantité de boulot nécessaire.

En plus de tes projets personnels, tu fais aussi du travail de commande. Comment réussis-tu à trouver le bon équilibre?
En général, je travaille pour moi plus de la moitié du temps. Je prends le temps de bosser sur une commande à partir du moment où le projet devient concret avec la marque et je reçois un mail, quitte à délaisser la partie personnelle quelque temps.

Est-ce que c’est difficile de joindre les deux bouts sans travailler à temps plein pour tes clients?
Les marques pour lesquelles je travaille, telles que Adidas et Nike, paient très bien. C'est pourquoi je peux me permettre de consacrer autant de temps à mes projets perso. De plus, j'ai reçu une bourse aux Pays-Bas, ce qui m’a permis de pouvoir bosser sur mon propre travail encore une année de plus une autre année à mon propre travail. C’est grâce à ça que j’ai pu construire ma machine.

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« Je me suis retrouvé à collaborer avec Nike à 19 ans. Je ne savais même pas comment faire une facture! »

Comment les marques te repèrent-elles?
Via Instagram, je pense. Avant il fallait avoir un agent quand on était graphiste et qu’on voulait bosser, mais aujourd’hui c’est un intermédiaire qui a pratiquement disparu. Je ne maîtrise pas encore Instagram à fond, mais c'est vraiment pratique. Je me suis retrouvé à collaborer avec Nike à 19 ans. Je ne savais même pas comment faire une facture! Pour ce contrat ils m'avaient trouvé sur une plateforme différente, je pense qu'Instagram n'existait même pas encore.

Ce sera ta première fois à Us By Night?
Oui. Quelques amis d’Amsterdam y seront aussi, donc c’est cool.

Et tu vas faire quoi sur place?
Je n'aime pas trop parler de mon travail. J'ai l'impression de trop le simplifier et le dénigrer Je pense que je vais plutôt parler de mon processus de création et de la façon dont je fabrique des tapis et des carreaux.

Sur quoi travailles-tu en ce moment?
Mon but c’est de travailler sur les carreaux à temps plein et arrêter quelques temps les collaborations avec des marques. Ce qui me plairait vraiment, c’est d’organiser une collaboration avec des designers d’intérieur pour fabriquer des produits haut de gamme avec ces carreaux. Remplir un tunnel entier avec mes dessins par exemple. Je veux faire quelque chose de vraiment grand. Sinon, j'ai deux expositions l'année prochaine: une à Amsterdam et une aux États-Unis. En gros, je suis principalement concentré sur mon travail d’artiste. Bien que je n'aime pas dire que je suis artiste.

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