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Non, Trump n’a pas de gros bouton nucléaire à sa portée

Voici la vraie marche à suivre pour lancer une attaque nucléaire
Crédit photo : włodi/flickr

Prendre une chill pill ne fait visiblement pas partie des résolutions du Nouvel An de Donald Trump, qui a profité de la deuxième journée de janvier pour se vanter de la taille de son bouton nucléaire tout en insultant le régime nord-coréen.

Le dirigeant de la Corée du Nord, Kim Jong-un, s’était servi de son discours du Nouvel An pour proférer de nouvelles menaces à l’endroit des États-Unis, rappelant qu’il a toujours un bouton nucléaire sur son bureau.

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Dans toute l’éloquence et la diplomatie qui lui sont propres, Trump s’est jeté sur Twitter pour se vanter que son bouton à lui est « plus gros et plus puissant ».

La réponse est absurde à bien des égards. D’abord, il n’existe pas de « bouton nucléaire ».

Si Trump a bien un bouton sur son bureau, il est petit et servirait à commander du Coke. Le président s’en est vanté en entrevue avec l’Associated Press en avril dernier : il appuie et un majordome arrive avec sa liqueur. La grosse vie.

Les missiles, c’est plus complexe qu’un verre de Coke

Pour ce qui est des attaques nucléaires, le processus est un peu plus élaboré.

Ça ne veut pas dire que Trump ne peut pas commander une attaque nucléaire à sa guise. En fait, il en a tous les droits. Le président américain est le seul qui puisse ordonner le lancement de missiles nucléaires. Une fois que l’ordre est transmis, « personne ne peut légalement l’annuler », explique le chercheur à l’Université Princeton et ancien officier de lancement de missiles nucléaires, Bruce Blair, dans une chronique du Washington Post.

Selon Blair, cité par Bloomberg, si le président veut lancer ses missiles, il va d’abord convoquer une conférence d’urgence avec le secrétaire à la Défense, le chef de l'état-major interarmées et d’autres conseillers. Ça peut se passer dans la salle de crise de la Maison-Blanche, ou encore sur une ligne téléphonique sécurisée si le président est en voyage, par exemple.

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À cette étape, les conseillers – s’ils ont la chance de se prononcer – peuvent s’opposer vigoureusement à une attaque nucléaire, avance Bruce Blair, « mais ils acquiesceront » à la demande du président.

Quand le président prend sa décision, on lui apporte ce qu’on appelle le « football nucléaire ». C’est une mallette qui contient des plans de guerre et des outils de communication. On s’en sert pour contacter le Pentagone. L’officier supérieur qui reçoit l’appel doit vérifier que l’ordre vient bel et bien du président. Pour ce faire, il lui soumet un code.

Le président sort son « biscuit » – c’est le nom donné à la carte laminée qui contient les codes du président, qu’il (ou un aide-militaire) porte en tout temps. Il doit donner le code correspondant.

C’est confirmé : c’est le président au bout de la ligne

Le Pentagone élabore ensuite une stratégie militaire. Ce sera à lui de communiquer avec les différents commandements militaires ainsi qu’avec les équipes de lancement de missiles.

Le Pentagone leur transmet un paquet d’information dans un message crypté. On y retrouve le plan militaire choisi, l’heure à laquelle les missiles doivent être lancés, des codes d’authentification et les codes nucléaires. Le message n’est pas plus long qu’un tweet.

Les équipes de lancement reçoivent l’information. Sur terre, chaque cinquantaine de missiles est manœuvrée par cinq équipes de deux officiers. Ces équipes se trouvent à des kilomètres les unes des autres.

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Les duos comparent les codes d’authentification du Pentagone avec ceux qui se trouvent dans leurs coffres-forts.

Ce sont les bons codes : c’est le temps d’agir

Les équipes programment la cible des missiles dans leur ordinateur, puis les débloquent en entrant les codes nucléaires.

C’est ensuite l’étape finale : on prend les clés de lancement qui se trouvent dans les coffres-forts et les insère dans la serrure d’allumage. Lorsqu’il est temps de lancer les missiles, les officiers des cinq équipes tournent leurs clés simultanément.

S’il y a un officier qui refuse de tourner sa clé, l’opération peut fonctionner quand même. Il n’est pas nécessaire que toutes les clés soient actionnées pour lancer un missile. Il suffit que deux duos sur cinq obtempèrent, et le missile s’envole.

C’est le point de non-retour.

Fun fact : c’est durant les années 60 que des codes nucléaires ont été instaurés, par mesure de sécurité. Le commandement aérien stratégique, jugeant qu’il s’agissait d’une mesure trop contraignante, a décidé de le fixer à huit fois le chiffre zéro, rapporte The Atlantic.

C’est ainsi que, pendant 15 ans, le code nucléaire était aussi sécuritaire que le NIP du iPad de ta grand-mère. La situation a été corrigée en 1977.

Gros missile > gros bouton

Il faut préciser que Trump n’a peut-être pas de gros bouton, mais qu’il a réellement un immense arsenal nucléaire à sa disposition.

La Federation of American Scientist estime que les États-Unis possèdent environ 6800 missiles nucléaires et que « 1800 d’entre eux sont déployés dans des bases militaires et des sous-marins », rapporte CNBC.

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La Corée du Nord, en revanche, pourrait en avoir jusqu’à une soixantaine.

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Le temps d’aller s’acheter un Coke

Ça peut paraître long, ainsi détaillé, mais ce processus de lancement de missile est conçu pour être exécuté de façon extrêmement rapide.

Entre la prise de décision du président et le lancement d’un missile terrestre, il peut s’écouler seulement cinq minutes. Le lancement d’un missile à partir d’un sous-marin pourrait prendre 15 minutes.

Ça me prendrait plus de temps pour sortir du bureau et revenir avec un Coke.

Mais c’est tout le temps que ça prend pour anéantir le monde tel qu’on le connaît.

Justine de l'Église est sur Twitter.