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Des scientifiques mettent au point un « gaydar » avec l’intelligence artificielle

Une plus grande érosion de la vie privée est inévitable, disent les chercheurs.

Avec des résultats ayant jusqu'à 91 % d'exactitude, une équipe de chercheurs de l'Université de Stanford a réussi à programmer un système d'intelligence artificielle capable d'identifier l'orientation sexuelle d'hommes et de femmes à partir de leurs photos.

Les chercheurs sont tout à fait conscients de la controverse entourant leur étude, publiée dans le Journal of Personality and Social Psychology, et ne veulent pas que celle-ci soit mal interprétée.

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Le but n'était pas de créer un outil pour détecter des homosexuels, mais bien de montrer que cette technologie peut exister, et qu'elle pose de sérieux problèmes de sécurité. C'est que l'intelligence artificielle ici est capable d'identifier l'orientation sexuelle avec beaucoup plus de précision qu'un cerveau humain.

Comment ça marche?

Sur un site de rencontre américain où les profils sont publics, les chercheurs ont récolté plus de 300 000 photos d'hommes et de femmes. En épurant les images pour ne garder que celles de bonne taille et de bonne qualité, où n'apparaissait qu'un seul visage, il restait 35,326 photos de 14,776 personnes, où les hommes et femmes, homos et hétéros étaient représentés adéquatement.

De ces images ont été extraites des « empreintes faciales », qui ont été combinées à un modèle d'analyse prédictive. Ce sont les outils à partir desquels l'intelligence artificielle a été mise à l'oeuvre.

Lorsqu'on lui présentait la photo d'un homme gai et d'un homme hétéro, le réseau neuronal employé a été apte à prédire leur orientation sexuelle 81 % du temps. Pour les femmes, le taux de succès était légèrement moindre (71 %).

Lorsqu'elle avait cinq photos de la même personne sous la main, l'intelligence artificielle était beaucoup plus efficace et parvenait à différencier l'orientation sexuelle dans 91 % de cas pour les hommes, et 83 % pour les femmes.

Pour le commun des mortels, avec les mêmes photos, la distinction entre homosexuel et hétérosexuel était réussie à 61 % pour les hommes et 54 % pour les femmes.

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Parmi les particularités physiques relevées chez les homosexuels, les chercheurs notent que la morphologie et l'expression faciale, de même que le look, tendent à différer des normes de genre.

Les femmes homosexuelles avaient des mâchoires plus larges et des fronts plus petits que les femmes hétéros. De leur côté, les hommes gais avaient des mâchoires plus étroites, des nez plus longs et généralement moins de pilosité faciale. Certaines différences étaient aussi observées au niveau de l'habillement.

Ce ne sont pas là des absolus. Les chercheurs insistent sur le fait que l'étude n'implique pas que « tous les hommes gais sont plus féminins que les hétéros, ou qu'il n'y a pas de gai avec des traits très masculins (et vice versa pour les lesbiennes) ».

Mais comme de nombreux signaux proviennent de traits morphologiques, les chercheurs préviennent que leurs méthodes pourraient être utilisées pour détecter l'orientation sexuelle d'une personne sans son consentement.

Une menace à la vie privée

Les chercheurs ont employé des logiciels en vente libre, des données publiques et des méthodes courantes. « Nous n'avons pas créé un outil qui viole la vie privée, nous avons plutôt démontré que des méthodes de base et très répandues posent de sérieuses menaces à la vie privée », écrivent-ils.

Les résultats présentés par les chercheurs sont loin d'être la limite de ce qui est possible. Des améliorations pourraient être obtenues avec des photos de meilleure qualité, un plus grand nombre de photos par personne, ou encore de meilleurs algorithmes.

« Nous avons été très troublés par ces résultats et avons passé beaucoup de temps à nous demander si on devait les rendre publics. On ne voulait pas nous-mêmes rendre possibles les dangers qu'on essaie de prévenir. »

Les chercheurs voient là un risque énorme pour les communautés LGBTQ, qui pourraient être extrêmement vulnérables à l'exploitation de ces technologies.

« Les lois de plusieurs pays criminalisent l'homosexualité, et dans huit pays, dont l'Iran, la Mauritanie, l'Arabie Saoudite et le Yémen, elle est passible de peine de mort. C'est donc crucial d'informer les politiciens, les compagnies de technologies, et plus important encore, la communauté gaie, d'à quel point les technologies basées sur la reconnaissance faciale peuvent être précises. »