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Santé

Un cas spectaculaire d'hématidrose a été identifié en Italie

Les personnes affectées par cette maladie suent sang et eau – littéralement.

Cet article a initialement été publié par Motherboard France.

D'ordinaire, quand quelqu'un dit qu'il s'est saigné aux quatre veines, on part du principe qu'il s'exprime de manière métaphorique. Mais pour quelques personnes dans le monde, il faut hélas prendre cette expression au pied de la lettre.

En Italie, des médecins ont récemment signalé le cas d'une jeune femme qui connait des épisodes de saignements spontanés au niveau du visage et des mains, et ce depuis trois ans. Elle n'est pas sujette aux irritations, sa peau n'est pas couverte de coupures et autres lésions cutanées : elle transpire du sang, tout simplement.

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Son cas est décrit dans un rapport du Journal de l'Association médicale canadienne publié cette semaine. La patiente avait 21 ans lorsqu'elle a été hospitalisée suite à ses symptômes, particulièrement impressionnants, qui ne semblaient avoir aucune cause connue. Le phénomène pouvait tout aussi bien apparaître durant le sommeil que durant des activités physiques diurnes, même si de toute évidence, c'est au cours de périodes de fort stress émotionnel que les saignements étaient les plus intenses. Les épisodes pouvaient durer de une à cinq minutes – une éternité lorsque l'on a le visage en sang.

Pour la jeune femme, ces symptômes étaient, on s'en doute, extrêmement handicapants. De peur de saigner spontanément en public et de terroriser son entourage, elle s'est isolée socialement et a développé des troubles dépressifs assortis de crises d'angoisse. La patiente n'avait jamais eu d'épisodes psychotiques auparavant ; les médecins de l'Université de Florence qui l'ont examinée ont donc écarté la piste du "trouble factice" – un trouble mental où le sujet simule les symptômes d'une maladie, jusqu'à l'automutilation. Ils ont ensuite fait l'observation directe d'un épisode de saignement.

L'hypothèse de la simulation étant écartée, les praticiens ont effectué des tests sanguins et prescrit des antidépresseurs à la jeune femme. Les saignements ont continué, inlassablement. Ils ont dû se rendre à l'évidence : la patiente était affectée d'hématidrose, une maladie rare et mal connue caractérisée par des sueurs sanguinolentes affectant une peau tout à fait normale. le phénomène est documenté depuis plusieurs siècles, et plusieurs hypothèses plus ou moins extravagantes sur ses causes ont été avancées au cours des siècles passés, de "la menstruation réprimée" au choc émotionnel en passant par la fameuse crise d'hystérie.

Une synthèse de la littérature existante sur l'hématidrose montre que la plupart des cas enregistrés sont des femmes, ce qui peut avoir influencé les explications du phénomènes, très genrées, formulée au 19ème siècle. Bien plus tôt, dans l'Antiquité, Aristote a décrit un type de sueur que l'on pouvait confondre avec du sang, et cité quelques cas où des hommes et des jeunes garçons auraient sué du sang dans une situation de détresse émotionnelle. Plusieurs auteurs modernes ont également décrit le phénomène, observé chez des prisonniers avant leur exécution.

Curieusement, plus de la moitié des cas signalés au cours du siècle dernier se sont produits au cours des cinq dernières années. Depuis 2004, 28 cas (24 femmes et 4 hommes) sont apparus dans la littérature scientifique évaluée par les pairs ; les cas cliniques ont été décrit sur tous les continents, sauf l'Amérique du Nord. Chez les femmes, l'âge moyen était d'un peu plus de 14 ans, contre 26,5 ans chez les hommes (ces données sont difficiles à comparer dans la mesure où les échantillons sont très petits). Tous les sujets partageaient le même symptôme : des suées de sang sur une peau apparemment normale. Pour l'instant, les médecins sont incapables d'expliquer l'augmentation brutale du nombre de cas diagnostiqués.

Six des patients ont montré une réponse aux bêtabloquants, un traitement qui a également été donnée à la patiente italienne. Cela a conduit à une nette réduction des saignements, mais pas à une interruption totale des symptômes. Le cas de la jeune femme ne fait qu'épaissir un peu plus le mystère médical fascinant de l'hématidrose.