FYI.

This story is over 5 years old.

Culture

Dans ce nouveau documentaire, les gars d'Alaclair Ensemble changent de cap

Pour quelques mois l'hiver dernier, les Frères Cueilleurs sont devenus récolteurs de sucre d'érable.

Le hip-hop québécois vit présentement un moment de gloire sans précédent, bénéficiant d'une popularité grandissante dans le reste du monde. À la tête du mouvement qui a rendu possible cette situation, il y a, bien entendu, les vétérans d’Alaclair Ensemble. Après autant de temps dans la game, les gars ne sont pas près d'arrêter le rap. Toutefois, pour s'assurer une longévité, il faut diversifier son portfolio, et la gang de minces de Québec l'a vite compris.

Publicité

D'après un nouveau documentaire supposément présenté par la réalisatrice française Lisa Bartoux, ils auraient acheté une terre acéricole, l'hiver dernier, afin de produire leur propre sirop d'érable, qui sera en vente bientôt, en ligne et à leurs spectacles. On ne sait toujours pas trop si c'est vrai, mais on a quand même décidé de parler aux gars, qui jouent à fond la carte des producteurs de sirop, pour discuter de cette nouvelle corde à leur arc.

VICE : Salut, les gars! Donc, comme ça, vous avez acheté une terre et décidé d’en faire un docu?
Ogden : Exact! Tu sais, à force de travailler ensemble et faire des shows, on s'est dit qu'on risque de faire ça à long terme. Mais on voulait aussi faire un investissement comme celui-là. C'était une option pour nous de diversifier notre champ d'action. Le documenter, c'était une manière pour nous de montrer le lien entre la vie d'artiste et parler de la culture bas-canadienne, et montrer que ça revient au même.

Maybe Watson : En fait, on a décidé de documenter ça parce qu'on s'est dit que ça serait peut-être un chapitre important dans notre carrière. Vu que c'était quelque chose d'inusité, pour un groupe de rap, on s'est lancés là-dedans à fond.

KNLO : On voulait montrer qu'il y a des choses qui se passent à part la musique. D'acheter une terre, c'est aussi de penser à son futur. Le sirop d'érable va être disponible sur notre Bandcamp à l'automne.

Publicité

Vous bénéficiez d’une popularité grandissante en France et dans le reste de la francophonie. Vous jouez aussi beaucoup avec des stéréotypes par rapport aux Québécois. Avez-vous parfois peur de pousser trop loin les stéréotypes, au point où les autres ne catcheront pas la blague?
Ogden : Le truc, c'est que ces choses-là existent en tant que stéréotypes parce qu'en effet, c'est possible de les caricaturer. Mais nous, on les utilise pas de façon caricaturale. À partir du moment où tu fais quelque chose pour vrai, que les gens pensent que c'est une joke ou pas, ça change pas grand-chose pour nous. C'est pour nous une manière de réhabiliter ces stéréotypes-là, de montrer comment il y a pas juste du négatif derrière certaines de ces références culturelles caricaturées.

Maybe Watson : Je crois pas que ce qui fait notre popularité à l'extérieur du Québec soit les stéréotypes, mais plutôt la spécificité québécoise de ce qu'on fait. Les gens trippent avant tout sur l'accent, sur notre énergie. Je crois que notre accent a quelque chose d'exotique. Mais dans ma vie de tous les jours, je joue pas tellement la carte des stéréotypes québécois. Oui, on a certaines jokes, des fois, qui peuvent faire penser à ça, mais ça reste que des blagues. Donc non, ça ne me fait pas peur. J'ai jamais peur de rien; je laisse pas la peur guider mes actions.

KNLO : Avec un peu de chance, les gens catcheront pas tout. Si tout était compris dès le début, peut-être qu'ils viendraient pas nous voir aux shows. Il y a toujours une part d'incompréhension. Ça fait partie de notre « hygiène », on a toujours traité la musique comme un guide alimentaire. On essaie des fois de faire des trucs plus sérieux, alors que d'autres fois on se décrasse la glande pinéale, you know.

Publicité

C’est quoi, le plus grand défi d’entretenir une terre? Qu’est-ce que ça vous a appris sur vous-même?
Ogden : C'est la coopération, de travailler tous les jours, l'idée qu'il n'y a rien qui se fait tout seul. Faut vraiment juste mettre la main à la pâte et être patient, parce que, quand tu travailles derrière un ordinateur, certaines choses peuvent se faire du jour au lendemain, mais dans la nature, ça se passe pas comme ça. Tu comprends que tu contrôles pas grand-chose, et que ta marge de manœuvre est assez mince.

Ça nous permet aussi de mieux se connaître chacun soi-même, et entre nous-mêmes. On découvre plein de nouveaux volets à la vie, donc c'est certain qu'en temps qu'artiste, que tu sois rappeur ou quoi que ce soit d'autre, de vivre des expériences comme ça, c'est riche.

Maybe Watson : C'est pas vraiment une terre agricole où on fait pousser des légumes, tu sais. C'est vraiment une érablière, c'est un lieu qu'on doit entretenir, bien sûr, mais c'est pas comme un travail agricole acharné où on doit se lever à 4 heures du matin. Les sucres, ça dure une période de temps très courte, et on espère bank dans ce moment-là. Mais, à part ça, c'est certain qu'il y a du travail à faire à l'année longue.

KNLO : Le gaz, man! Être sur la route entre trois villes, en dehors de toutes les gigs. On est toujours on the road. Sinon, toujours s'entendre, c'est un défi, mais ça amène notre relation à un autre niveau. Ça nous a appris qu'on va probablement être là pour un bout. C'est une façon de nous projeter dans le futur, et d'ajouter une pression sur nous-mêmes.

Publicité

Vous dites que ça ne vous dérange pas que les gens vous voient un peu comme étant caricaturaux, mais vous, vous voulez être perçus comment, dans le reste du monde?
Ogden : Comme une gang de Bas-Canadiens prêts à tout virer sur le top.

KNLO : On peut pas vraiment contrôler ça. Je t'avoue qu'on travaille pas vraiment selon ces paramètres-là. Je pense que le contrôle de notre image depuis le début a été bousillé. Notre but, c'est d'être perçus comme des gens qui ont de la substance. Le reste, l'image, c'est hors de nos mains. On essaie de bien se présenter et de s'amuser, en espérant que la musique va continuer à circuler, et c'est pas mal ça.

Quelles sont vos recettes préférées à base de sirop d’érable?
Ogden : C'est vraiment selon les préférences de chacun. Il y en a qui vont l'utiliser pour faire des edibles, alors que d'autres vont l'intégrer dans leurs mijotés. Tu peux faire des bons ragoûts, tu peux vraiment en mettre sur tout et n'importe quoi. Certaines personnes utilisent le sirop comme on utilise l'huile d'olive, sur la Méditerranée. Sky's the limit, avec le sirop!

Maybe Watson : Je pense que n'importe quoi avec du sirop d'érable, c'est bon. Si on me proposait un burger avec du sirop, je suis sûr que ça serait bon! Je rigole, mais je suis un grand fan du sirop sur des crêpes ou du pain doré, peu importe ce qui se mange au petit déjeuner.

KNLO : Le saumon, clairement, avec des herbes qu'on fait pousser à la maison, comme du basilic. C'est basique, mais je suis pas trop fancy ou gastronome, donc pour moi c'est le ultimate killer!

Qu'est-ce qui sera plus populaire à l'extérieur du Québec, d'après vous, entre votre groupe et votre sirop d'érable?
Ogden : Ça dépendra vraiment de la montée du prix du baril de sirop, j'imagine. Mais je crois qu'on espère un genre de dynamique permaculturelle entre les deux, où plus Alaclair devient big, plus on réinvestit dans la terre, et plus on investit dans la terre, plus on aura du bon sirop que les gens consommeront tout en étant réorientés vers nos plateformes de propagande qui sont affichées sur nos cannes de sirop. C'est du marketing classique, d'une certaine façon.

Billy Eff est sur internet ici et .