FYI.

This story is over 5 years old.

Culture

CFCF nous parle de l’importance d’avoir un bon dialogue intérieur

Si on veut survivre dans le monde de la musique électronique, la 4/4 ennuyeuse ne nous mènera pas très loin.

Connu d’un plus grand public après une collaboration avec Jean-Michel Blais en 2016, le producteur CFCF revient avec un nouvel EP, Self-Service. Figure importante de la scène locale depuis près de 10 ans, le Montréalais en nomination aux Grammys nous offre sa création qui semble plus que jamais confectionnée pour le dancefloor. On l’a donc appelé pour jaser un peu de self-care, de longévité dans le monde la musique et de remix de vidéos obscures d’ASMR.

Publicité

VICE : Parle-moi un peu de ton nouveau projet.

CFCF : C’est un EP de trois chansons qui sort chez SOBO. C’est trois morceaux plutôt house sur lesquels je travaille depuis les derniers six ou sept mois. La première a un feel très progressif, elle est bourrée de cordes un peu mélancoliques. C’est une chanson presque introversive, méditative.

La deuxième est plus calme, avec un peu de guitare. C’est inspiré par le morceau Madrugada Eterna, de The KLF. J’ai tenté de faire quelque chose dans ce style-là, qui me plaît beaucoup.

La pièce-titre, Self-Service, est plus enjouée. Elle est hyper influencée par la french house et le disco, mais plus agressive et bizarre.

Pour Exercices , le EP qui a aidé les gens à te connaître, tu avais tout composé en hiver. Tu as par contre écrit Self-Service en été. Crois-tu que cela a une incidence sur le son qui en ressort?

C’est difficile à dire. Je crois que les saisons influençaient beaucoup ma musique auparavant. Je suis certain que ça a une influence sur l’humeur de tout le monde. Par exemple, en ce moment, il neige et je suis en train de travailler sur un mix. Je ne dis pas que ça sera un mix aux sons hivernaux, mais ce ne sera très certainement pas de la grosse musique ensoleillée et estivale. Ces jours-ci, j’ai l’impression que la température influe plutôt la musique que j’écoute que celle que je fais.

Tu es dans le milieu depuis si longtemps que tu en as vu beaucoup passer. Es-tu le genre de personne qui reste attachée à ce que tu faisais auparavant ou essaies-tu plutôt de puiser ton inspiration de ce que les kids font aujourd’hui?

Publicité

Je me laisse influencer par des trucs plus récents. Simplement parce que ce qui est nouveau apporte de nouvelles idées, de nouvelles techniques, inspirées de ce qui se faisait avant. Donc, c’est important de rester à l’affût de ce qui se fait de nouveau et de ne pas se laisser tomber dans une crevasse où on s’accroche au passé. J’écoute beaucoup de nouvelle musique, de tous les genres. Ça m’aide à être plus intelligent dans ma manière de composer de la musique. Je peux approcher la musique de manière plus analytique, car beaucoup de musique intelligente est en train de sortir. Ça me pousse à être plus conceptuel par rapport à mon approche de création musicale.

La chanson-titre du nouvel EP est enjouée à un point où ça en devient presque porté sur la débauche. J’ai tenté de faire quelque chose de si joyeux, indulgent et hédoniste que ça reflète une mentalité qui n’est peut-être pas très saine. Une représentation musicale d’un engloutissement par la vie sur une piste de danse. Je crois que les soirées et les pistes de danse peuvent être des endroits très thérapeutiques, mais ça peut aussi être un endroit où on se perd.

Pour plus d'articles comme celui-ci, inscrivez-vous à notre infolettre.

À ce sujet-là, toi qui fais ceci depuis si longtemps : quels sont tes trucs de self-care lorsque ta carrière implique faire le party la plupart des soirs?

Je suis chanceux parce que j’ai un dialogue intérieur très fort. Je dois constamment m’écouter et m’assurer que je suis à l’aise avec l’environnement dans lequel je suis et qui est présent, surtout si j’ai les facultés affaiblies ou si je suis dans un environnement menaçant. Je suis encore relativement jeune, mais je suis DJ depuis presque 10 ans. Donc, je m’écoute beaucoup et j’essaie de ne pas me laisser emporter par ce qui se passe dans les soirées.

Publicité

Appliques-tu ce même dialogue intérieur à ta création musicale?

Oui, absolument. Chaque chanson est manipulée et retravaillée longtemps. Je ne suis pas le genre de personne qui peut simplement jammer : c’est un processus très introspectif où je vais commencer avec quelque chose de simple et, lorsque le morceau commence à me montrer ce qu’il désire être, je dois le mouler pour qu’il le devienne. C’est un truc difficile à faire, surtout dans la dance music, où, si on fait du 4/4 très simple, beaucoup de gens prendront ce qu’on fait au pied de la lettre. Donc, il faut au moins essayer d’y ajouter des idées plus profondes, qui vont plus loin que le morceau en surface.

Je sais que tu as beaucoup parlé de ta nomination aux Grammys, pour ton remix de Berlin by Overnight . Crois-tu que ça a un peu placé un standard pour toi, que maintenant tout ce que tu fais doit être au moins à ce niveau-là?

Je ne sais pas. C’était un peu une expérience pour moi, dans le sens où c’était un peu différent et plus sombre que ce que j’ai l’habitude de faire, et j’ai beaucoup appris en le faisant. Donc, il y a beaucoup de techniques que j’ai utilisées pour ce morceau-là que j’essaie maintenant d’appliquer dans d’autres morceaux.

Après, je ne peux pas trop m’attarder sur ma nomination aux Grammys, car il y a tellement de bonne musique qui n’a jamais même été prise en considération par quelque récompense que ce soit. On ne peut pas faire de la musique pour recevoir la validation d’une organisation abstraite de haut placés de l’industrie. Il faut faire ce qu’on veut avant tout. Donc, oui, je veux que la musique soit bien produite et bien pensée, mais ce n’est pas nécessairement en réaction à ma nomination aux Grammys, c’est plutôt mon évolution en tant que producteur et qu’artiste.

Pour terminer, il faut absolument que tu m’expliques l’idée derrière ton remix d’une vidéo ASMR de Donkey Kong qui te réconforte après un long vol!

[Rires] Je suis content que tu connaisses cette chanson! Un ami à moi m’a montré la vidéo, et elle m’a beaucoup fait rire. Je travaillais déjà sur un autre morceau, influencé par une chanson de Laurent Garnier, Cycles d’opposition. Elle ne collait pas vraiment avec quoi que ce soit d’autre sur le projet, donc je me suis dit que je la mettrais sur SoundCloud comme petit cadeau pour les auditeurs. Je me suis ensuite rendu compte que la chanson allait vraiment bien avec la voix du vidéo, donc je me suis dit que ce serait drôle de les combiner. Le nouvel EP de CFCF, Self Service, sort juste à temps pour la Saint-Valentin, chez Sounds of Beaubien Ouest.

Billy Eff est sur internet ici et .