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Culture

J’ai vécu comme Gary Vaynerchuk pendant une semaine

J’ai été le philosophe-entrepreneur surnommé Gary Vee pendant sept jours : 94 heures de travail et 18 minutes de plaisir.
J’ai vécu comme Gary Vaynerchuk pendant une semaine
À gauche, l’auteur. À droite, Gary Vee. Toutes les images sont fournies par l’auteur

Cet article a d'abord été publié sur VICE Canada.

Gary Vaynerchuk est une combinaison de Don Draper et de Tony Robbins et de Ritalin.

Il est président de VaynerX, un « holding moderne du secteur des médias et des communications » ainsi que le PDG de VaynerMedia, une « agence de publicité qui offrent tous les services et comptent parmi ses clients des compagnies du Fortune 100 ». Réputé pour ses coups de gueule et son énergie, Gary Vaynerchuk est aussi un conférencier motivateur, un auteur de best-sellers et un influenceur qui compte des millions de disciples éparpillés sur Instagram, YouTube, Facebook et Twitter.

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L’horaire de ce type ressemble à un algorithme. Il n’y a pas d’échauffement ni de récupération.Tout est planifié et précis. On dit qu’il organise des réunions de trois minutes et qu’il ne mange pas durant la journée pour gagner du temps.

Son horaire dément varie d’une journée à l’autre, mais les paramètres de base restent les mêmes. Il sort du lit à 5 h, fait de l’exercice, puis travaille de 7 h à 23 h. Durant la semaine, Gary Vee, comme il se fait appeler sur internet, évite le plaisir comme la peste. Il ne prend pas de verre, ne sort pas, ne fait pas de sieste, ne regarde pas la télévision, ne procrastine pas et ne perd pas de temps sur Facebook. Toute personne ou chose qui l’empêche de devenir l’entrepreneur le plus connu et admiré de tous les temps sera la cible d’un coup de gueule, d’un tweet, d’une histoire sur Snapchat ou d’un billet de blogue.

J’ai eu de l’admiration pour Gary Vaynerchuk. Son message et son style de vie sont cool, excitants, avant-gardistes. Il se fait conduire en Uber, porte des t-shirts ajustés, est la vedette de vlogues quotidiens intitulés Daily Vee et emploie des termes comme rétro-ingénierie. J’ai donc décidé de faire l’expérience de suivre son rythme. Tous les jours pendant une semaine, j’allais faire une heure d’exercice, travailler pendant environ 16 heures et dormir cinq heures. (Gary Vaynerchuk dit qu’il alloue 30 % de son temps aux déplacements d’affaires, alors j’ai réservé une heure par jour pour mes déplacements en transport en commun.)

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Je ne donne pas de conseils à d’immenses compagnies ni de conférences, alors j’appliquerai la doctrine de Gary Vaynerchuk à ma vie d’étudiants. J’allais suivre ses commandements à la lettre, autant que possible : je me suis promis de ne pas me reposer, de ne pas voir d’amis, de ne pas perdre de temps sur les réseaux sociaux, de ne pas procrastiner, de ne pas faire de sieste, de ne pas ouvrir Netflix, de ne pas regarder le hockey. En d’autres mots : embargo sur le plaisir. Chaque seconde sera consacrée à la rédaction, aux travaux universitaires, aux réunions ou à l’exercice physique.

Pour entrer dans la peau du personnage, j’ai adopté la même coiffure aérodynamique que lui, j’ai copié sa façon de s’habiller, j’ai tourné un vlogue inspiré de ses Daily Vee, j’ai enregistré un podcast de questions et réponses, je me suis mis à marcher très vite et j’ai employé des mots obscènes comme jamais. J’ai même commencé à apprendre le russe avec Duolingo, la langue maternelle de Gary Vaynerchuk.

J’ai essayé, autant que j’ai pu, d’entrer dans sa tête. Voici ce qui s’est passé.

Lundi

« Je mange parfaitement et je fais de l’exercice tous les jours. »

Gary Vee

Gary Vaynerchuk affirme qu’il n’est « pas une personne matinale du tout », mais il se lève à 5 h. Il regarde les nouvelles, fait de l’exercice, puis travaille, sans arrêt jusqu’à 23 h.

Alors que je me glissais dans la peau du personnage, j’ai senti ce qui me restait de santé mentale fondre. Avec mes yeux fatigués et la coupe de cheveux de Gary, j’avais l’air de la doublure du Justin Bieber de 2014.

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Après avoir mis la dernière touche à un article, j’ai pris le chemin du gym pour me mesurer à la routine d’exercices de Gary Vaynerchuk : des séries brèves et intenses de tractions, de curls et d’étirements. En écoutant sa liste de lecture Spotify, j’ai fait des rotations thoraciques dans un gym vide à 7 h 30 un lundi matin.

En plus de « manger parfaitement », Gary Vaynerchuk jeûne apparemment toute la journée, parce qu’il n’a pas faim. J’ai essayé de jeûner pendant 20 heures, mais ma volonté a été lourdement éprouvée par les exercices avant l’aube, la préparation d’une séance photo inspirée de Gary Vaynerchuk et 17 heures de travail.

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Quand je suis rentré à la maison ce soir-là, l’adrénaline et la fatigue se sont combinées, me donnant le même type d’excitation qu’on ressent après une nuit blanche. Je me sentais très bien, mais je savais que je ne tiendrais pas longtemps : je ressentais l’euphorie du coureur, mais au premier jour sur sept. Mon cerveau me récompensait de l’effort, alors que je n’étais qu’au début. Je me suis effondré vers 23 h.

Mardi

« Quand vous rentrez à la maison après le travail, c’est le temps de se remettre au travail, pas de s’enivrer de bière et de Netflix. »

Gary Vee

Le vocabulaire de Gary Vaynerchuk compte pour la moitié de ce qui fait son intérêt. Il ne connaît pas les bégaiements, les marmonnages, les hésitations. Ses coups de gueule sont vus des millions de fois, ce qui en fait l’un des motivateurs les plus populaires sur YouTube. Son style allie la répétition et le mélodrame d’un sermon à la cadence du rap des années 90. C’est comme le slam de Jonah Hill dans 22 Jump Street .

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Pour imiter les monologues de Gary Vaynerchuk, on n’a qu’à mitrailler de « marché », de « micro versus macro ». Mais ses discours sont inspirants. Ses phrases vous frappent comme une locomotive. Par exemple, quand on lui a parlé des gens qui « n’approuvent pas nécessairement » son idéologie du travail acharné, il a explosé :

« Ils vont perdre, ils vont perdre, je me fiche complètement d’eux. Ils vont perdre. Ils vont louer leur costume et boire leur champagne. Et je veux rappeler à tout le monde : c’est pas parce que tu mets “entrepreneur” comme titre sur Instagram que ça veut dire que tu es un entrepreneur qui a réussi! »

Il est direct, fruste et inébranlable, trois caractéristiques qui le rendent très populaire sur internet.

Lundi, j’ai commencé à employer ses buzzwords, mais ça sonnait faux. Je devais aller plus loin. J’ai décidé de réserver 20 minutes de chaque soir pour apprendre la langue maternelle de Gary Vee, le russe, avec Duolingo. J’ai réussi à apprendre « bonjour », « bon après-midi », « bonsoir », « c’est ma radio », « ma bicyclette », « ma maison ».

Après, tout le reste s’est mis en place. Dans mes cours le mardi soir, j’avais les yeux à demi clos, mais mes sursauts de participation avec les yeux exorbités ont semblé impressionner les professeurs. Et même si je ne pouvais pas sortir avec mes amis, j’ai aimé rédiger en silence en leur compagnie à la bibliothèque. Mais la solitude de 8 h à 23 h m’a amené à remettre l’idée en question.

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Je me suis endormi avec mes vêtements après une journée de 19 heures de travail.

Mercredi

« Je ne sors jamais. »

Gary Vee

Gary Vaynerchuk a le style de vie d’un boulet de canon. Il a de la vitesse et de l’endurance : des accélérations constantes et le sang-froid de fin de quatrième quart.

Jusqu’ici, le « retour sur investissement » de mes matins a été « astronomique ». Terminer un article, faire ma routine d’exercices et rédiger un essai avant midi, c’est une bonne habitude à prendre.

Les après-midi, c’est une autre histoire. On dit que tout ce qui monte redescend. Pourtant, Gary Vaynerchuk décolle tôt le matin et ne redescend jamais.

Moi, je n’ai pas pu trouver autant d’énergie ou être aussi discipliné. Après avoir bondi du lit à 5 h et foncé toute la matinée, je me suis écrasé dans l’après-midi.

Entre deux cours, effondré dans un fauteuil, j’ai péché : j’ai fait une sieste de 20 minutes. Je l’ai regretté aussitôt, par contre, et Lui ai demandé pardon. J’espérais que mes 14,5 heures de travail compenseraient.

Jeudi

« Levez-vous avant tout le monde et travaillez jusqu’en fin de soirée. »

Gary Vee

Gary s’est immiscé dans un de mes rêves et m’a crié de me mettre au boulot. C’était assez pour me faire bondir hors du lit et travailler avec acharnement jusqu’à la fin de l’après-midi, sans sieste.

Par ailleurs, Gary Vaynerchuk refuse de marcher pour se rendre où que ce soit. Il vit à New York et, comme il se doit, se rend à toutes ses réunions en Uber. En étant à la tête de deux compagnies multimilliardaires, il n’a pas le choix.

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Je suis rédacteur d’un journal universitaire satirique et j’ai 12 heures de cours par semaine. Les enjeux ne sont pas les mêmes, mais les tarifs pour se déplacer, malheureusement, sont les mêmes pour tout le monde.

Par hasard, mercredi, c’était le 43e anniversaire de Gary Vaynerchuk. Ma journée a passé si vite que je l’ai manqué. Pour le souligner aujourd’hui, je me suis versé un peu d’eau, que j’ai dégustée durant mon cours de russe : за тебя, Gary!

Vendredi

« Vous savez ce que je veux voir? Je veux voir tous vos comptes rendus. Je vais vous promettre une chose : vous ne pourrez rien cacher! »

Gary Vee

Gary Vaynerchuk est surtout connu pour ses Daily Vee. Son bras droit, David Rock (alias D-Rock) le suit partout et note tout ce qui se passe dans son cycle sans fin de réunions, de coups de gueule, de routine d’exercices, de déplacements en Uber, de conférences et de discours.

J’ai copié le look de Vaynerchuk (avec la veste verte des Jets et les écouteurs) et embauché mon ami Max pour qu’il filme mon remake à petit budget d’un Daily Vee. Il se trouve qu’imiter Vaynerchuk, avec toute son énergie et son ego, est plus difficile qu’une journée de 20 heures de travail.

À 20 h, on délirait tous les deux à cause du stress et de la fatigue. Le campus de l’Université de Toronto ressemblait à Hoth, on n’avait plus d’argent pour se payer un Uber et nos amis, dans un bar à quelques pas de nous, se demandaient quand on allait les rejoindre pour prendre un verre.

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Mais il y avait trois heures de plus de boulot à l’horaire.

On a opposé notre veto au plaisir : la bière, la musique à tue-tête et les sorties sont les trois cercles de l’enfer de Gary Vaynerchuk, et je savais que si j’y cédais, je ne me le pardonnerais jamais. Plutôt que de faire la fête, on a enregistré un faux podcast Ask Gary Vee, dans lequel on a demandé à nos amis sur Facebook de nous envoyer des questions auxquelles on a répondu. Vers une heure du matin, après une longue et dure journée, on a perdu conscience.

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Week-end

« De 15 à 30 ans, je ne suis jamais sorti les week-ends. »

Gary Vee

Dans une Terre créée par un dieu Gary Vee, il n’y a pas de sabbat. Maintenant, il consacre ses samedis et dimanches à ses enfants, mais entre 15 et 30 ans, il dit ne pas être sorti une seule fois. Il est absolument impossible que ce soit vrai, mais j’ai fait comme si.

Sans surprise, les deux derniers jours de la semaine ont été aussi durs et insipides que les cinq premiers.

Cependant, j’ai organisé une de ses réunions de trois minutes avec un ami juste pour voir ce que c’était. Comme j’avais 36 heures de temps libre, je pouvais réfléchir à ma semaine dans son ensemble.

Je m’étais imaginé qu’après ce défi, je serais un surhomme comblé, mais, à la fin, je suis juste un gars fatigué qui n’a pas vu ses amis depuis sept jours. Les résultats ne sont pas aussi hallucinants que ce à quoi je m’attendais, et mon souvenir de cette semaine se définit plus par ce que j’ai perdu que ce que j’ai gagné à travailler pendant 100 heures.

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La semaine a été remplie d’adrénaline, mais de pratiquement rien d’autre. Je n’ai eu aucune conversation authentique avec qui que ce soit : presque tout ce que j’ai dit, je l’ai dit au cours de réunions, chuchoté dans une bibliothèque ou crié parce que je portais des écouteurs. Mes yeux fatigués et vides et les mots obscènes que j’ai employés à profusion ne m’ont pas gagné de nouvelles amitiés non plus.

J’ai bien sûr lu un tas de choses et rédigé des essais, et mon lectorat sur Medium a bondi en raison du nombre d’articles publiés. Les gens semblent aimer mes articles politiques, surtout les personnes que j’ai croisées dans les forums russes de Duolingo.

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Après avoir publié ce qui serait mon dernier article samedi soir, j’ai couru du Starbucks, qui a été mon quartier général pendant la semaine, à chez moi. Comme je n’avais fait que 10 heures de travail dans la journée, je savais que je devais revenir le lendemain.

À un feu rouge, mes pensées ont dérivé vers celui qui pourrait être l’antithèse de Gary Vaynerchuk — comme Caïn pour Abel, Stalin pour Roosevelt. Je me suis rappelé Ferris Bueller, qui met plus d’énergie à ne pas travailler que Gary Vaynerchuk en met à travailler.

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Alors que le feu passait au vert et que je jetais un coup d’œil des deux côtés — les muscles endoloris par les rotations thoraciques et les yeux lourds après une courte nuit de cinq heures –, les mots de Ferris Bueller me sont revenus à l’esprit : « La vie passe tellement vite. Si tu ne t’arrêtes pas pour regarder autour de toi de temps en temps, tu pourrais la manquer. »

Le dimanche matin, je suis allé au Starbucks, mais j’ai pris mon temps.

Statistiques de la semaine

  • Heures de travail : 94
  • Cafés : 30
  • Temps passé avec des amis : 18 min
  • Temps passé à regarder Netflix ou le hockey : 0 min
  • Temps perdu sur Facebook : 38 min
  • Moyenne d’heures de sommeil : 5 h 27 min
  • Sieste : 2
  • Essais terminés : 2,5
  • Pages de textes universitaires lues : 400
  • Temps passé en classe : 12 h
  • Articles publiés sur Medium : 12
  • Séances d’exercices : 6
  • Réunions : 11
  • Réunions de trois minutes : 1
  • Uber ou Lyft : 10 (40,11 $)
  • Nombre de fois que j’ai regretté de m’être lancé ce défi : plus de 100

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