Brat Star by Anna Victoria Best 6
Photo par Anna Victoria Best

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Musique

C’est l’anarchie des styles qui fait la force de la DJ et productrice Brat Star

« Je n’ai qu’une chose à dire, la cohésion de set, c’est nul… Sois simplement toi-même et fais ce que tu veux, parce que c’est la seule façon d’être unique. »

Nommée en l'honneur des poupées Bratz, la DJ et productrice Brat Star, 26 ans, se fait d’abord connaître en mixant dans des soirées hip-hop et techno, mais Montréal devient rapidement trop petite pour celle qui voit grand. Elle débarque à Berlin en 2016 pour poursuivre une carrière dans la mode. Et aussitôt arrivée, elle se remet à mixer.

Brat Star s’est fait un nom dans la capitale allemande en performant dans des soirées underground où elle détourne l'attention de la techno omniprésente. La DJ montréalaise ne limite sa sélection à aucun style, et passe aisément du métal au trap, du hardcore à la pop.

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Ses mixtapes et DJ sets montrent son réel engagement de libérer la club scene européenne de ses codes rigides et hermétiques. Son approche musicale un peu anarchiste lui a permis d’être recrutée par le rappeur espagnol Young Beef en tant que DJ officielle de sa récente tournée. Elle a commencé à composer ses propres chansons entourée de plusieurs amis et artistes dont Katie Vick et Coucou Chloé.

VICE a rencontré Brat Star pour un café lors de son récent passage à Montréal et a discuté de sa vision de l’avenir de la club music.

VICE : Entre la musique, la mode, la direction artistique et ton Instagram, c’est qui Brat Star?
Brat Star : Brat Star ce n’est pas qu’une DJ ou une musicienne, c’est un personnage. J’ai toujours eu le sentiment d’avoir un message, une mission plus grande que moi à partager avec le monde. La façon dont je m'habille et mon esthétique sur Instagram sont pour moi des façons de le communiquer.

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Photo par Anna Victoria Best

Tu dis avoir une relation particulière avec la musique. Pourquoi?
Quand j'écoute de la musique, je perçois avant tout l’énergie qu’elle dégage. C’est pourquoi je mixe du métal avec du trap. Pour moi, ces deux styles ont la même énergie libératrice et vont très bien ensemble.

As-tu l’impression que la nouvelle génération de DJ se libère de certains codes de l’industrie?
Oui, définitivement, ces « règles » ne semblent plus avoir d'importance. Quand on te dit : « Tu ne peux pas jouer plus d’une chanson par le même artiste », « Tu ne devrais pas jouer ça, c’est pas cool » ou « Ne transitionne pas comme ça »… Je n’ai qu’une chose à dire : la cohésion de set, c’est nul… Sois simplement toi-même et fais ce que tu veux, parce que c’est la seule façon d’être unique. Parce qu'il n'y a que toi qui peux être toi.

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Pourquoi penses-tu que certains tiennent tant à ces règles?
Parce qu’ils refusent de voir les choses changer. Je n’ai jamais aimé la hiérarchie et je ne vois pas pourquoi elle aurait sa place au sein de la scène musicale. C’est du snobisme, tout simplement. Ce n’est pas parce que ta chanson fait 12 minutes et qu’elle est déconstruite qu’elle est meilleure ou plus artistique qu’une autre.

Que dis-tu aux gens qui disent que certains styles sont trop commerciaux et possèdent une structure trop simple, comme ce qu’on entend souvent sur le trap?
Ce que je trouve fascinant chez les jeunes rappeurs trap, c’est que, pour la plupart, ils se foutent de tout, incluant la musique et l’industrie. Tout ce qui compte, c’est l'affirmation de soi. La popularité du trap prouve que ce qui importe, c'est l'énergie que tu investis dans ce que tu produis. C’est un genre qui oblige les gens à descendre de leurs grands chevaux et laisser de côté leurs idées préconçues sur ce que la musique est ou devrait être.

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Photo par Anna Victoria Best

Tu as commencé à produire tes propres chansons depuis peu. Tes premiers beats ressemblaient à quoi?
Quand j'ai commencé à produire, je me suis fixé certaines contraintes. Ma règle était d’utiliser uniquement ma voix et un instrument, puis c’est devenu seulement ma voix… J’ai décidé de remplacer les sons des synthétiseurs et des basses avec ma voix uniquement. C’est ainsi que j’ai découvert que j’avais un talent pour trouver des mélodies et des harmonies. Avant de faire quelque chose de rebelle ou de déconstruit, je voulais apprendre à faire des chansons avec une structure conventionnelle. J'ai donc enregistré des chansons pop a cappella, sans beat ni arrangement.

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Avec qui as-tu collaboré?
À Londres, j’ai fait la connaissance de Katie Vick, la cofondatrice de Bala Club records. Le soir où on s’est rencontrées, on a enregistré des sessions en freestyle sur un iPhone, elle à la guitare et moi simplement avec ma voix, et vice versa. Puis, on a décidé de couper les sessions en chansons et les sortir sur Bala Club en tant que « morceaux clubs », sans passer par toutes les étapes de postproduction. L'idée était de créer quelque chose qui soit le plus honnête, organique et spontané possible, à l'antithèse de l'énergie de la scène club expérimentale. Ce projet s’appelle 2 Mothers.

Comment vois-tu évoluer la scène club expérimentale dans les prochaines années?
Je pense que de plus en plus de DJ sets seront remplacés par des représentations live. Il y a déjà beaucoup de DJ qui prennent le micro pour offrir quelque chose de plus personnel et unique. La voix humaine est très puissante, et je pense qu'elle commençait à nous manquer dans la musique électronique.

Brat Star se produira prochainement au festival CTM de Berlin, ainsi qu'à Sonàr et Primavera à Barcelone.