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Pourquoi la coke au Royaume-Uni est soudainement devenue si pure

La pureté de la cocaïne atteint 80 % dans les rues des grandes villes, alors qu’elle était à moins de 10 % il y a quelques années.
Photo: VICE

En 2015, VICE a écrit qu'il n'y avait pratiquement plus de cocaïne dans la cocaïne. Qu'elle était coupée avec tellement de substances bon marché qu'elle est devenue ce que ceux dont le téléphone contient les numéros de plusieurs revendeurs appellent de la « poussière de pub » : de la cocaïne d'une pureté à moins de 10 %.

À cause d'adultérants comme la benzocaïne et la lignocaïne, Londres s'est retrouvée avec une poudre dont l'aspect et les effets ressemblent à ceux de la coke, mais sans le high. Mais, après que la police s'est attaquée à la circulation de ces substances, il y a eu un effet collatéral : la cocaïne s'est purifiée : la pureté de la coke saisie atteint parfois 80 %.

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Les revendeurs inondent les rues de cocaïne hyper puissante parce qu'ils n'arrivent plus à mettre la main sur les adultérants utilisés pour couper leur marchandise. Ils ont commencé à abandonner l'achat, l'entreposage et l'ajout de ces substances, et vendent plutôt de la coke plus pure à un prix plus élevé.

La hausse de la pureté est un effet collatéral improbable du succès des descentes policières dans les usines de fabrication de drogue et des opérations visant à retirer de la circulation les substances dont on se sert pour produire de la coke de mauvaise qualité. En vertu de la Serious Crime Act 2015, ceux qui fournissent les adultérants sont passibles de 20 ans de prison.

En juin, Daniel Taylor, 44 ans, a été condamné à 18 ans de prison pour avoir importé 2,7 tonnes d'adultérants, une valeur de revente dans la rue de 197 millions de dollars, l'une des plus importantes saisies effectuées au Royaume-Uni. L'an dernier, Gregory King, 26 ans, a été condamné à 20 ans de prison après avoir été jugé coupable de l'importation de 1,2 tonne de benzocaïne.

Pour le chef de la division des stupéfiants de la National Crime Agency, Lawrence Gibbons, la hausse de la pureté est aussi attribuable à la demande pour les drogues synthétiques comme la MDMA. « Le marché de la drogue est comme tous les autres marchés. C'est le choix du consommateur. Quand la cocaïne était très mauvaise, pure à moins de 10 %, autour de 2010, la méphédrone est devenue très populaire. Les gens laissaient tomber la coke pour d'autres substances, qui peuvent être plus ou moins dangereuses. »

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Un testeur de drogue indépendant, Allen Morgan, qui examine la drogue saisie qui sera présentée au tribunal, le confirme : « Couper la drogue est toujours risqué. Il y a le temps qu'on passe à le faire, l'équipement que l'on doit posséder et les traces que ça laisse derrière, qui peuvent être relevées par la police. Si vous devez la couper, vous haussez vos profits, mais vous haussez aussi le risque de vous faire prendre. En plus, la benzocaïne n'est pas si facile à trouver qu'avant, même avec le web profond. Il est plus facile maintenant de ne pas la couper et de la vendre plus pure à un prix plus élevé. »

Il a d'ailleurs lui-même constaté la hausse de pureté. « Je vois souvent de la coke saisie pure à 80 % ou plus. Et ce n'est pas nécessairement de la marchandise de revendeurs proches de la source. C'est souvent de la coke saisie dans la rue. »

Tony*, 32 ans, est revendeur de cocaïne dans le sud de Londres depuis 12 ans et a auparavant passé 11 mois derrière les barreaux, après avoir été condamné à deux ans de prison pour possession de cocaïne. Il dit qu'il détestait couper la cocaïne. « On doit sans arrêt acheter des mélangeurs pour mélanger les substances parce que c'est une poudre très sèche et ça brise très vite les mélangeurs. Tout l'équipement, les sachets de plastique, les entonnoirs, les mélangeurs cassés, on doit s'en débarrasser. Avant que la police mène ses opérations contre la benzo [benzococaïne], on pouvait en avoir une certaine quantité à la maison sans recevoir une sentence très longue. Maintenant, dès qu'il y a la moindre trace de poudre sur soi ou sur quoi que ce soit qu'on possède, c'est la panique. Je comprends pourquoi quelqu'un voudrait vendre de la coke plus pure : on peut la passer plus vite. »

Le chef de la division des stupéfiants de la National Crime Agency partage l'avis du testeur indépendant : « La pureté de la cocaïne vendue dans la rue en 2009 était à son plus bas jamais atteint, moins de 10 %. Depuis, elle a augmenté. Aujourd'hui, la pureté de ce qu'on trouve dans la rue est plus élevée qu'elle ne l'a été dans les dernières années. Les gens prennent de la drogue et ne savent pas à quel point elle est forte. »

Ça a un prix. Les décès causés par la cocaïne ont augmenté de 16 % en 2016 d'après l'Office for National Statistics. Le nombre de décès est le plus élevé depuis que l'agence a commencé à les enregistrer, en 1993. La majorité des personnes décédées étaient des hommes entre 30 et 49 ans.

Adam Cowell, 33 ans, de Oswaldtwistle, est décédé d'une surdose en novembre l'an dernier après avoir consommé une dose mortelle de cocaïne. Auparavant, après avoir pris de la coke très puissante, il avait sauté de la fenêtre du deuxième étage de la maison de ses parents, se pensant poursuivi.

Le coroner Michael Singleton, lors de l'enquête sur le cas de M. Cowell, s'est dit de plus en plus préoccupé par le nombre de jeunes adultes qui meurent à cause de la toxicité de la cocaïne. « Je fais ce travail depuis 23 ans. C'est un phénomène récent. Je peux vous dire que, d'après les enquêtes criminelles, ça a atteint des proportions épidémiques. Tous ces jeunes avaient la vie devant eux, ce n'étaient pas des gens que l'on qualifiait normalement de toxicomanes, ils avaient une famille qui les soutenait, un cercle d'amis et un emploi. Ils meurent. »