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Drogue

Pourrait-on manquer de cannabis dès la légalisation?

Malgré les faibles quantités de cannabis en réserve au Canada, un expert nous explique pourquoi on devrait quand même être corrects.
Photo by Wesley Gibbs via Unsplash

Il semblerait qu’on ait sous-estimé l’importance du marché légal du cannabis. De récentes analyses indiquent que les consommateurs de cannabis seraient plus nombreux que ce qu’avançait le gouvernement canadien, et qu’ils consommeraient plus.

Est-ce qu’on pourrait manquer de weed pour autant? Pas selon le chercheur Miles Light, économiste et fondateur du Marijuana Policy Group (MPG), qui soutient que l’industrie florissante du cannabis est suffisamment bien financée pour suffire à la demande.

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De la consommation de plus

La semaine dernière, Statistique Canada avançait que d’ici la fin de l’année, 5,4 millions de personnes allaient acheter du cannabis sur le marché légal et que 1,7 million de personnes continueraient à s’approvisionner sur le marché noir, pour un total d’un peu plus de 7 millions de consommateurs de tous horizons.

C’est bien plus que ce qu’avait estimé à la fin 2016 le directeur parlementaire du budget, qui prévoyait 4,6 millions de consommateurs de cannabis en 2018, sans préciser sur quel marché ceux-ci allaient s’approvisionner. La demande aussi aurait été sous-évaluée. Le DPB prévoyait également une demande équivalente à 655 tonnes de cannabis.

Une analyse plus approfondie a été effectuée par MPG pour Santé Canada et déposée au début du mois d’août. Elle fait plutôt état d’une demande équivalant à 926 tonnes de cannabis, soit 271 tonnes de plus.

Du weed à la tonne

Quand on compare ces 926 tonnes avec ce qui est disponible sur le marché canadien, rien ne semble concorder.

Selon ce qu’a publié Santé Canada, les producteurs licenciés avaient accumulé 66 tonnes de cannabis dans leurs coffres en juin dernier. Selon un calcul rapide, une demande de 926 tonnes - 66 tonnes = désastre commercial à l’horizon.

Mais ce n’est pas l’avis de Miles Light, qui est l’analyste qui a lui-même calculé la demande de 926 tonnes. Il ne s’alarme pas du peu de réserves canadiennes, parce que le nombre ne reflète pas la capacité de production des producteurs licenciés.

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« Les firmes canadiennes sont extrêmement bien financées et ont investi des milliards de dollars dans la culture du cannabis, a expliqué le chercheur. Nous avons calculé la capacité de production à venir, et elle dépassait les 1000 tonnes »

Santé Canada ne craint pas non plus qu'il manque de cannabis le temps venu. « Compte tenu des stocks actuels et de l’augmentation de la capacité de production, l’industrie sera en mesure de répondre à la demande à mesure que les consommateurs feront la transition vers le marché légal », assure le responsable des communications André Gagnon.

Non seulement la production serait suffisante, mais il ne faut pas oublier que ce n’est pas tout le monde qui va transiter docilement vers le marché légal, rappelle M. Light.

Statistique Canada estime que les ventes du marché légal devraient représenter 76 % des ventes de cannabis, dès la première année de la légalisation.

C’est très loin de l’analyse qu’en fait Miles Light, qui croit plutôt que de nombreux consommateurs vont rester fidèles à leurs revendeurs actuels, surtout en raison des engorgements aux magasins peu nombreux et de leurs prix relativement élevés. « Je serais impressionné si les chaînes d’approvisionnement légales vendaient 30 % de la demande totale. »

Il donne l’exemple de l’État de Washington, qui selon lui a fait « plusieurs erreurs » dans sa mise en marché, faisant en sorte que seulement 18 % de la demande en cannabis a été comblée par le marché légal, lors de la première année de mise en marché.

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Il avance qu’il pourrait y avoir certains problèmes d’approvisionnement ici, mais ils ne seraient pas dus à un manque de stock. Ce serait plutôt dû à un certain engorgement entre la production et la vente, ce qui aurait un impact sur les provisions locales.

Au Québec, une vingtaine de succursales de la Société québécoise du cannabis vont ouvrir le 17 octobre, jour de la légalisation. C’est peu, et une mauvaise coordination des stocks pourrait limiter l’accès aux produits, « même si la production est suffisante », croit M. Light.

Justine de l'Église est sur Twitter.