Retour sur les publicités antidrogue des années 80 et 90

Capture d'écran

FYI.

This story is over 5 years old.

société

Retour sur les publicités antidrogue des années 80 et 90

Des centaines de millions de dollars ont été investis pour prévenir la consommation de drogues chez les jeunes.

Le 31 octobre dernier, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il verserait 36,4 millions de dollars pour financer de nouvelles campagnes contre la consommation de cannabis.

Après des publicités au concept déjà passé date à l’époque de leur création – l’œuf frit comparé au cerveau) d’un jeune consommateur et les publicités à la pente fatale style « 0 drogue pour moi ») – le gouvernement Trudeau aura peut-être saisi l’importance de remanier les pratiques de sensibilisation auprès des jeunes. Jusqu’à maintenant, il semble qu’aucune publicité antidrogue efficace n’ait encore vu le jour. Mais remontons à la genèse de la prévention.

Publicité

Influencé par la War On Drugs de nos voisins, le Canada a investi une faramineuse somme de 210 millions de dollars dans la première Stratégie canadienne antidrogue en 1987. Plus des deux tiers sont allés à la prévention, au traitement et à l’éducation des consommateurs.

Cette campagne mettait l’accent sur la réduction des dommages sociaux causés par le cannabis, sans toutefois encourager l’abstinence. Le gouvernement agissait en connaissance de cause, vu l’augmentation de la consommation de la fin des années 60 au début des années 70.

Plusieurs vidéos ont été produites au fil du mandat portant le message « Drogues, pas besoin! » Maryse Cartwright, mieux connue comme la petite Lucie Tremblay dans La guerre des tuques, volait la vedette dans une de ces publicités typiques des années 80. Des enfants au naturel trop peu désarmant, un air électro et des vêtements beaucoup trop colorés, créant au final l’hilarité plutôt que la conscientisation.

Ding et Dong se sont également prêtés au jeu, avec une pub dans laquelle le duo est aux commandes du cerveau d’un ado à qui on offre un sachet de poudre au beau milieu d’une piste de danse. L’excellent Rap d’la scrap a aussi fait son apparition en 1991, personnifié par un sachet de poudre blanche chantant à l’allure suspicieuse et des joints parlants. Du génie.

Une seule pub évoquait

le dialogue entre les parents et les enfants

sur la consommation responsable.

Publicité

En avril 1998, le forum Youth Vision Jeunesse se tient à Banff en partenariat avec l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime. Près de 200 jeunes adultes de 24 pays visitent la ville albertaine pour exprimer et échanger leurs expériences et leurs idées de mesures préventives plus efficaces.

Le rapport produit à partir des propos échangés à cette rencontre insistait sur l’importance de réduire les peines des consommateurs, jugées trop sévères. Le contexte des sentences était trop souvent rattaché à un problème de dépendance qui n’était pas pris en compte.

Les médias ont également été accusés par les jeunes de banaliser la consommation de drogues et ses effets. Que ce soit des cigarettes fumées à la chaîne ou une fête où l’alcool coule à flots présentés à la télévision, les participants du Youth Vision Jeunesse se sont entendus pour dire que la présence de drogue avait été normalisée.

En 2002, le gouvernement libéral de Jean Chrétien promettait la décriminalisation du cannabis, mais le projet n’a jamais abouti. Le gouvernement Harper est ensuite revenu à la charge avec sa propre Stratégie nationale antidrogue, qui, au final, a alloué beaucoup plus d’argent aux forces de l’ordre qu’aux programmes de traitement et d’éducation.

En même temps, au Québec, le lancement du fameux site « 0 drogue pour moi » aura conscientisé (ou traumatisé) beaucoup de jeunes.

Le classique « 1, 2, 3, l’école te renvoie, 4, 5, 6, tu prends ta snif, 7, 8, 9, t’es peut-être allé un peu trop loin » a longtemps résonné dans les télévisions des jeunes Québécois. Une jeune fille se regarde dans le miroir et voit sa vie défiler devant ses yeux. Résultat final : elle est couverte de gales, pâle et tremblotante, le tout après s’être fait une coupe de cheveux façon Britney Spears.

Publicité

Le style a été repris pour d’autres publicités de la même campagne où un jeune garçon voyant sa vie s’écrouler après avoir décidé de prendre une puff d’un joint. Renvoi de l’école, conflits familiaux et consommation abusive d’ecstasy, une pente fatale qui donne, encore une fois, peu d’information concrète sur la drogue.

Pour la prochaine campagne de prévention préparée par le gouvernement Trudeau, l’accent sera mis sur les risques de la consommation de cannabis au volant et ses dangers pour la santé. La ministre de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, veut informer les Canadiens, avec de « l’information basée sur des faits, pas sur des rumeurs ».

Devant la loi

En plus de miser sur la prévention, le Canada avait abordé la décriminalisation dès 1969 avec la commission Le Dain, amorcée sous le gouvernement de Pierre Elliott Trudeau. Ayant pour but d’analyser l’usage et les effets du cannabis dans un contexte récréatif, la commission en est venue à la conclusion que la plante devrait être progressivement décriminalisée.

Pour plus d'articles comme celui-ci, inscrivez-vous à notre infolettre.

L’engorgement du système judiciaire et la présence d’un marché lucratif pour le crime organisé faisaient partie des arguments principaux pour amorcer le processus de décriminalisation.

En effet, à la fin des années 60, on a assisté à une augmentation plus que considérable des peines liées au cannabis : 60 000 % entre les années 1962 et 1972, passant de 20 à 12 000 cas.

Les mesures proposées par ce rapport n’ont jamais abouti et ont même provoqué une vague contraire avec l’instauration de la Stratégie canadienne antidrogue en 1987.

Luca est sur Instagram.