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Sexe

NSFW Un pénis qui pénètre une trompette, des macaques qui se masturbent allégrement et des dauphins coquins : Bienvenue dans l’univers complètement barré de Lorna Mills

La net-artiste torontoise crée les GIF les plus débiles du monde.
Toutes les images : Lorna Mills

Depuis que la plus cruche de toutes tes cousines l'utilise à outrance, le GIF est au web ce que 2 Chainz est à la scène hip-hop : un peu surfait mais efficace. La boucle est (presque) bouclée. Certes produit de consommation courant pour le citoyen lambda qui surfe les internets, la courte loop visuelle reste néanmoins une composante incontournable de la culture web.

Après son revival fulgurant — revival dans le sens où il est né à la fin des années 80 —, GIF est élu mot de l'année en 2012 par l'Oxford University Press et se ramasse un GIF franchement bien pourri en guise de trophée. Aujourd'hui, il est toujours une valeur sûre pour quiconque veut intensifier et beurrer ses interactions sociales en ligne. En fait d'outil linguistique ludi-cool, difficile de faire plus fluide et punchy.

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Au-delà de la légèreté des messages que le GIF véhicule, de sa naïveté formelle et de sa technicité dont même le dernier des cons comprend les rouages, il a séduit de nombreux artistes qui ont choisi de composer avec ce format d'images low res pour questionner le web non seulement en tant que médium mais aussi en tant que plateforme de diffusion. La net-artiste torontoise Lorna Mills en est probablement l'un des meilleurs exemples.

Lorna réussit à proposer un travail voulu gauche et décalé, parfois lubrique, qui se joue pas mal de la stérilité du milieu institutionnel et de l'esthétique aseptisée que l'on peut attendre d'un artiste utilisant les outils numériques. Si tu t'attends à de la grosse 3D, du CGI et des univers sci-fi ou vaporwave super léchés, laisse-moi te dire que tu te fous un doigt dans l'œil. Les visuels ingrats qu'elle crée sont détourés plus à la hache qu'au lasso polygonal et présentent des humains et des animaux dans des situations incongrues, souvent malaisantes.

En effet, ses patchworks de GIF aux contenus douteux sont composés de différentes niaiseries et cochonneries toutes déterrées des bas-fonds d'un internet crasseux où tu n'as probablement pas l'habitude de faire traîner ton curseur. « Je passe au moins une heure par jour à chercher et à regarder des GIF provenant des coins les moins raffinés de l'internet », m'explique Lorna. « Comme j'ai pu le dire ailleurs dans le passé, j'adore les choses super ineptes, extrêmes et débiles as fuck. La sexualité entre espèces différentes, les accidents de véhicules, les hommes et les femmes qui se masturbent à l'aide de dauphins en plastique ou qui branlent des kangourous et des ours, les animaux et les bébés qui fument, les gens et les animaux qui se battent, les lutteurs professionnels tout pétés, les hiboux et les chauves-souris qui font absolument n'importe quoi sont, par exemple, le genre de merveilles qui m'intéressent. » Elle termine en me confiant que plusieurs de ses dernières compositions sont alimentées par des séquences de porn failures qu'elle dégote ici et là dans les profondeurs du web. Apparemment, les sites russes seraient de véritables mines d'or.

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Pour vous donner une introduction rapide mais efficace de son travail, elle m'a pointé une poignée de ses travaux préférés, qui, selon elle, illustrent fidèlement son univers et permettent de mieux comprendre son processus créatif. Quand je lui ai demandé de me donner plus de détails sur ses choix en ce qui concerne la matière visuelle, elle me répond juste : « Parce que je sais que vous vouliez voir des trucs cochons. » OK, Lorna. Fine.

Ce GIF a été présenté sur Cloaque.org, l'une des plateformes net-art les plus solides et originales. Claudia Maté et Carlos Sáez, les deux artistes derrière Cloaque, avaient invité Lorna à proposer un visuel pour la collectionI Five You. Du coup, l'artiste torontoise leur avait offert une création composée de cinq baises bien cocasses. Il avait aussi été montré à la Art Gallery of Ontario pour Queer Death Drive Video Hole, une exposition commissariée par Jordan Tannahill.

Lorna a reçu un ban permanent sur Liveleak pour avoir uploadé une version vidéo de cette paire de bourses qui s'exprime au milieu d'un joli bouquet de fleurs. Un peu facho pour une plateforme qui prône un internet libre.

Une pièce pour OFFLINE ART: Hardcore, une exposition de groupe organisée par Aram Bartholl en parallèle à son exposition Hello World à Kasseler Kunstverein à Kassel en Allemagne. Cette partouze de pixels est un très bel exemple de traitement d'image, de découpage, de montage et de superposition.

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Dernière pépite mais pas des moindres. Cette chose immonde un peu trash, qui n'a malheureusement pas été créée par Lorna, lui a néanmoins permis de découvrir les classiques Blingee et Goatse il y a quelques années. (Je ne mets pas d'hyperlien pour Goatse, je vous laisse user de Google.) Cette trouvaille magique restera dans les annales et aura une influence importante sur son travail.

Pour la petite anecdote, en février 2015, trois amis et moi avions commissarié une « orgie » de plus de 40 oeuvres — GIF, vidéos et travaux en ligne — des plus prolifiques net-artistes internationaux. Leurs travaux avaient recouvert les murs des trois étages de la rotonde du Musée d'art contemporain de Montréal durant une des nocturnes. Les hautes sphères de la noble institution nous avaient cordialement conviés à changer l'œuvre présentée par Lorna pour une de ses pièces « tout public ». On avait trouvé ça tellement winner de se voir demander de faire disparaître les zizis, les boobs et les tranches de bacon.

Enfin, en ce qui concerne son actualité, son travail vidéo en quatre volets, Ways of Something (un remake ultra-contemporain du classique documentaire de John Berge), est actuellement présenté au Whitney Museum à New York et vient d'être intégré à la collection du musée. Une acquisition qui en dit bien long sur l'intérêt grandissant dont peut jouir ce genre de pratique. Elle présente également une projection vidéo trois canaux dans l'exposition de groupe Transfer Download, au Current Museum of Art à New York et sort une nouvelle pièce en décembre qui sera présentée sur dadaclub.online, une initiative en ligne du Link Art Center. Et, si l'on se projette en 2017, elle sera invitée par l'artiste-commissaire irlandaise Nora O' Murchú au Resonate Festival à Belgrade en avril.

Cliquez ici pour en voir plus sur son travail.