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société

Une Montréalaise publie toutes les choses racistes qu’on lui dit sur Facebook

Avec sa page Facebook « Je ne suis pas raciste mais », Caroline Kim croit que c’est en reconnaissant les expériences de racisme qu’on pourra aider à l’enrayer.
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Photo via Facebook

Récemment, une Montréalaise d’origine asiatique a créé la page Facebook « Je ne suis pas raciste mais » afin de partager les expériences de racisme qu’elle vit au quotidien. Ainsi, Caroline Kim – son vrai nom – publie les courts échanges qu’elle a avec des inconnus qu’elle croise dans la rue. En quelques jours, une centaine de personnes se sont abonnées à sa page. Ce n’est pas beaucoup, mais, pour elle, une nobody qui travaille dans une bibliothèque, c’est une surprise.

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VICE l’a rencontrée afin de comprendre sa démarche.

Caroline Kim est maman. Récemment, elle a réalisé que son fils de 11 ans serait rapidement exposé au racisme auquel elle fait face depuis longtemps. Il commence déjà à recevoir des « petits commentaires poches ». Elle a voulu faire quelque chose afin de faire comprendre ce que beaucoup de gens vivent.

L’administratrice de la page « Je ne suis pas raciste mais » a grandi en Gaspésie et elle a vécu à Granby, à Sherbrooke, à Québec et à Montréal. Selon son expérience, les commentaires racistes ne sont pas moins présents à Montréal qu’en région. Les occasions seraient simplement plus rares. Sauf qu’à lire ce qu’elle publie, on remarque que ce n’est peut-être pas si rare que ça. Plus tôt la semaine dernière, on lui a craché dessus à la station de métro Vendôme. Elle se fait aussi traiter de Chinoise – l’insulte par excellence selon la principale intéressée –, de « crisse de jaune », en plus de se faire raconter des « jokes » de sushis qui puent. Une réalité dont elle serait victime au moins une à deux fois par mois.

« Je suis plus choquée par les réactions des gens qui sont choqués de voir ce que je vis que par ce que je vis. Dans ma tête, c’était bien évident. J’ai 39 ans et ça fait 38 ans que je suis au Québec. Donc, ça fait environ 38 ans que je me fais envoyer chier relativement souvent », avoue-t-elle.

En général, les témoins de ce qu’elle vit ne font rien. Elle croit qu’ils ne savent pas quoi faire. « Tu ne peux pas répondre à une agression avec une agression, ça ne va rien donner de positif », explique-t-elle. La Montréalaise pense que les gens ne sont pas confrontés de manière concrète au racisme. Il serait compris comme un fait divers : on le lit dans le journal, on le regarde à la télé, on se dit que c’est épouvantable, mais on comprendrait seulement de façon indirecte tout ce que cela implique.

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« Tu peux juste comprendre un phénomène [comme le racisme] dans son contexte au même titre que tu ne peux pas régler un problème qui existe depuis des années en claquant des doigts », avance celle qui tient « Je ne suis pas raciste mais ». Selon elle, tout le monde peut faire partie de la solution. « Que ce soit dans les conseils d'administration des écoles de nos enfants, dans les groupes communautaires du coin ou au travail, on a une influence et on a le choix de l'utiliser ou non. Si on donne une forme concrète au racisme, les gens peuvent mieux le cerner et donc mieux le déconstruire. Le grand défi de toutes les violences, c’est d’être capable de les nommer. À petite échelle, la solidarité est fort certainement la meilleure arme », explique-t-elle.

Voilà le but de toute sa démarche. On ne règle pas un problème si bien incrusté en claquant des doigts, mais si les gens pouvaient mieux comprendre le racisme par ces petits témoignages, nous serions peut-être un peu plus avancés. « Mon intention est de préserver mon fils et ses amis afin qu'ils aient le moins mal au cœur possible. Nous avons la responsabilité de nos plus jeunes et on se doit d'être meilleur que ce que nous bâtissons actuellement », ajoute-t-elle.

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Après seulement quelques jours d’activités, elle ne sait pas encore complètement quel est son but. « Si ça peut toucher 100 personnes ou faire réfléchir à ce qu’est le racisme aujourd’hui, tant mieux », répond-elle lorsqu’on lui demande si elle croit qu’elle peut conscientiser les gens. Elle veut plutôt créer un sentiment de reconnaissance. « Lorsqu’on se reconnaît, on se sent interpellé et c’est là qu’on a l’impression de faire partie de la solution », dit la nouvelle « blogueuse » des réseaux sociaux.

Pour l’administratrice de la page Facebook « Je ne suis pas raciste mais », qui se dit plutôt positive, il y a une évolution, même si ce n’est que par des « baby steps ». Peut-être qu’avec ce genre d’initiative, les gens comprendront un jour que le mot « Chinois » n’est pas une insulte.

Samuel Daigle-Garneau est sur internet ici et .