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Commandité

L’Australie a vraiment été colonisée par des criminels – en voici cinq

En 1788, voler un rouleau de dentelle était passible d’exil en Australie.
John O’Reilly

Si vous aviez fait quelque chose de mal en Angleterre entre 1788 et 1868, votre châtiment aurait probablement été la transportation.

Si vous faites partie de la majorité des gens qui utilisent le transport en commun aux heures de pointe pour vous rendre au travail chaque jour, vous reconnaîtrez aisément que cette peine était une vraie torture. Mais les criminels qui étaient transportés n'étaient pas des violeurs ou des meurtriers. Ceux-là étaient d'emblée condamnés à mort.

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Les crimes passibles de transportation étaient des délits mineurs. Parmi les infractions qui valaient à leurs auteurs d'être entassés dans des bateaux débordant de scorbut, mentionnons : voler du poisson dans un étang ou une rivière (pêcher?), chiper le mouchoir ou la brosse à cheveux de quelqu'un, faucher du bacon, allumer des feux d'artifice, brûler des vêtements, ou encore être un enfant de dix ans mûr pour l'esclavage. Bref, des crimes vraiment sérieux.

Entre 1788 et 1868, environ 162 000 criminels de cet acabit ont été exilés en Australie. Leur destination aurait auparavant été l'Amérique, mais après à la Révolution, ses portes se sont fermées. Le lieu d'amarrage en Australie était généralement la Nouvelle-Galles-du-Sud, un territoire récemment « découvert » que les Britanniques voulaient coloniser (mais qui avait évidemment été habité par des peuples autochtones depuis des dizaines de milliers d'années – simple coïncidence).

Ces petits chapardeurs, vagabonds, prisonniers militaires et insurgés politiques étaient ensuite mis au travail. Leur dur labeur a mené à la création d'une nation coloniale et d'une fable qui relate l'origine de la rustrerie et du calage d'alcool, tout en en faisant l'apologie.

Le legs de ces condamnés a été le sens de l'anarchie propre à l'Australie. Cette période de l'histoire du pays a également amené ses habitants à être empathiques envers les personnes défavorisées et à faire preuve de courage face à des conditions de vie défavorables, d'où la mentalité du she'll be right (tout ira bien).

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Nous nous penchons ici sur les cas de cinq criminels qui ont été envoyés en Australie.

John O'Reilly

John O'Reilly (ci-dessus) était un partisan du mouvement d'indépendance de l'Irlande, et fut l'un des 62 membres de la Fraternité républicaine irlandaise à être transporté en Australie-Occidentale. Il était accusé de trahison, un crime qui aurait dû lui coûter la vie, mais qui lui a finalement valu 20 ans de réclusion criminelle étant donné son jeune âge de 22 ans.

O'Reilly a joué un rôle capital dans le sauvetage du Catalpa, l'une des évasions de prison les plus célèbres en Australie (dont nous discuterons plus loin). C'est lui qui pencha en faveur de l'idée d'acheter ce navire, bien qu'il finit par s'évader sur la Gazelle avec l'aide d'un prêtre catholique et de quelques fermiers locaux.

En plus de s'évader de prison, il séduisit également la fille du directeur de la prison.

Écrivain exceptionnel, O'Reilly s'établit en Amérique et devint rédacteur en chef du journal bostonien The Pilot. Il fut reconnu pour son travail sur les droits de la personne et ses recueils de poésie.

Michael Harrington

Michael Harrington, fenian lui aussi, est également connu pour son rôle dans le sauvetage du Catalpa. Après que la plupart des fenians emprisonnés eurent été graciés, les détenus restants planifièrent une évasion à l'aide de leurs relations à l'extérieur de la prison.

John Devoy, un fenian qui avait été libéré et qui s'était établi à New York, fut pour l'essentiel l'organisateur de cette opération. Devoy reçut des fonds de l'organisation républicaine irlandaise Clan na Gael pour acheter le Catalpa.

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Le 29 avril 1875, le bateau navigua de New Bedford, au Massachusetts, jusqu'en Australie-Occidentale, avec un équipage dont les membres ignoraient pour la plupart qu'ils étaient là pour aider des prisonniers à s'évader.

Pendant ce temps, des complices sur place en Australie-Occidentale se faisaient passer pour des hommes d'affaires afin de se rapprocher du gouverneur de l'État et recruter d'autres hommes pour couper des lignes télégraphiques. L'opération était énorme.

Le navire jeta l'ancre en eaux internationales près de la côte de l'Australie-Occidentale et envoya une baleinière sur la rive. Harrington et ses cinq acolytes, qui travaillaient à l'extérieur de la prison, furent emmenés en calèche par des connaissances. Ils parcoururent ainsi 20 kilomètres jusqu'à la baleinière, qui les amena au Catalpa.

Malgré une tempête violente et la police coloniale qui les suivait en bateau, ils réussirent à atteindre le navire. La nuit passa sans qu'ils revoient la police. Le lendemain, elle tirait à leur intention un coup d'avertissement avec un canon de 12 livres. L'équipage du Catalpa hissa alors le drapeau américain pour leur indiquer qu'une attaque serait considérée comme un acte de guerre contre les États-Unis. Ils voguèrent ensuite librement sur l'océan Indien.

Esther Abrahams

Esther Abrahams comptait parmi les quelque 1000 détenus juifs. Pour avoir volé un rouleau de dentelle, sa vie chavira et elle fut envoyée en Australie. À bord du navire, elle se lia à George Johnston, le lieutenant du Corps de la Marine de la Nouvelle-Galles-du-Sud. On peut dire que c'était sérieux : ils eurent sept enfants.

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Johnston mena la révolte du rhum, la seule prise de pouvoir armée réussie dans l'histoire du gouvernement australien.

À cause de son grade, Johnston reçut de nombreuses concessions de terres, et Abrahams en reçut également plus tard à son nom. Avant sa mort, son fils tenta de la déclarer folle afin de saisir ses propriétés, et bien qu'elle se défendit farouchement, il finit par gagner.

Joseph Lycett

L'artiste Joseph Lycett fut reconnu coupable et transporté pour faux-monnayage.

Il fut condamné et mis au travail à Sydney pour dépeindre la colonie émergente de manière à encourager la migration volontaire et l'agriculture. Il devint ainsi en quelque sorte un escroc professionnel.

Mais ses efforts s'avérèrent efficaces : il fut responsable du développement de plusieurs municipalités et dessina des plans de bâtiments comme l'église locale, où il réalisa une fenêtre à trois vitraux qui se trouve aujourd'hui à la cathédrale de Newcastle.

Il écrivit également de fascinantes descriptions de la vie des Awabakal, un peuple autochtone de la région de Newcastle, documents inestimables au stade actuel de l'histoire de l'Australie.

Insatisfait de travailler pour autrui, il se tourna une fois de plus vers la contrefaçon. L'histoire veut qu'il aurait été arrêté à nouveau, et qu'au moment de son arrestation, il se serait coupé la gorge. Il n'en mourut toutefois pas.

C'est alors qu'il se rétablissait à l'hôpital qu'il aurait rouvert la plaie de ses mains nues et se serait ainsi tué pour de bon.

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Charlotte Badger

Charlotte Badger est connue comme étant la première femme pirate, une réputation qui lui vint après qu'elle et sa complice Catherine Hagerty eurent organisé une mutinerie. En route vers la Terre de Van Diemen (la Tasmanie), elle convainquit l'équipage du Venus de s'emparer du bateau alors que le capitaine se trouvait sur la rive. Ce dernier avait l'habitude de fouetter les passagères, ce qui laisse croire qu'il le méritait sans doute.

Elle est également reconnue comme étant l'une des premières femmes blanches à s'établir en Nouvelle-Zélande. Elle parlait maori couramment, et se débrouillait en tongan.

Les crimes qui lui valurent sept ans de réclusion criminelle à la Nouvelle-Galles-du-Sud? Voler quelques guinées (d'une valeur d'environ une livre chacune) et un mouchoir en soie dans l'espoir de subvenir aux besoins de sa famille alors qu'elle n'avait que 18 ans.

Découvrez le travail de l'illustratrice Apollonia Saintclair.