Musique

Après plus de 15 ans, Guerilla Poubelle s'étonne toujours de son succès

Le groupe a fait le tour du monde et s'est produit plus d'un millier de fois sur scène. Mais même s’il n’y avait rien eu de tout ça, il serait aussi parfaitement satisfait.
guerilla poubelle
Crédit photo: Romain Étienne

En 2003, lorsque le groupe punk français Guerilla Poubelle fait ses débuts, le monde paraissait déjà plutôt tourmenté. Le président de la France, Jacques Chirac, s'opposait à la guerre en Irak, ce qui poussait un groupe d'Américains à tenter de faire changer le nom des french fries en freedom fries pour protester contre cette décision. Les musiciens présentaient quant à eux un premier démo de quatre chansons, Dégout et des couleurs, au son virulent et aux paroles engagées et imagées qui deviendront sa marque de commerce, soulignant l'incompétence de la classe politique et déplorant la paresse sociale qui régnait à l'époque.

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« Seule fois de ma vie où j'ai voté, c'était contre un facho. Seule fois de ma vie où j'ai voté, c'était pour un escroc », clamait Till, chanteur du groupe, sur ce premier démo. Bien que plus de 15 années aient passé, on ne peut pas vraiment dire que les choses ont changé pour le mieux, sur le plan de la politique mondiale. Pour Guerilla Poubelle, toutefois, les portes du succès se sont ouvertes. En janvier 2018, le groupe célébrait son 1000e concert en carrière, un exploit considérable. Ses tournées l’ont amené à se produire un peu partout dans le monde, même à l'extérieur de la francophonie, et aussi loin qu’au Japon ou encore en Amérique du Sud, ce qui surprend toujours Till. « Tu sais, ça m'étonne, même en France, qu'il y ait un engouement pour notre groupe. On est toujours surpris, lorsqu'on a des soirées cool où les gens chantent nos paroles, c'est toujours incroyable, me dit-il par téléphone. C'est même plus frappant, parfois, au Québec, quand les gens chantent tellement que j'entends plus du tout ma voix dans les moniteurs. »

En même temps, il faut dire que ce résultat est dû en grande partie au constant travail du groupe. Malgré le succès dont bénéficie Guerilla Poubelle, les membres du groupe font tous partie d'au moins deux autres formations et conservent de « vrais » emplois. Till assure qu'il trouve tout de même le temps de se reposer, entre deux prestations, ajoutant même au passage que, pour lui, retourner au bureau vient avec son lot de moments de détente.

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Si le groupe adhère à une éthique punk DIY plus ou moins stricte, refusant même de s'inscrire aux sociétés de droits d'auteurs, jugeant qu'une telle adhésion ne servirait à aucun des deux partis, il ne fait pas non plus partie de ces « ayatollahs de la pureté punk », assure le chanteur. Lorsqu’on lui demande s'il croit en la plus récente génération qui se joint au mouvement punk, il dit ne pas être certain qu'elle est forcément si différente de celles qui l'ont précédée. « Il y a des jeunes comme des plus vieux qui nous écoutent. C'est ça le punk rock, tout le monde prend ce qu'il a envie. Même si c'est seulement pour deux années, le temps de trouver autre chose, c'est très bien aussi! Ça ne sert à rien d'être trop intégriste, face à des choses légères comme ça, quand on voit l'état de la planète. »

Après autant d’années passées à faire de la musique qui, d’une certaine façon, sert à conscientiser les gens, il peut être difficile de garder l'espoir que la musique puisse réellement changer les choses. Pourtant, le chanteur, lui, garde une perspective plutôt positive. « C'est une question que je me pose, parfois. Je me demande ce que je ferais de ma vie si ce n'était pas de la musique. Je pense qu'au-delà de la musique, c'est un petit peu aussi une communauté, explique-t-il. C'est des gens qui discutent de politique, mais aussi de choses plus légères », ce qui peut selon lui aider à augmenter la conscience sociale dans le milieu, ainsi qu'aider des gens dans la communauté à surmonter certaines épreuves. « C'est une belle aventure. »

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Une carrière aussi longue dans le milieu du punk que celle qu'a connue Guerilla Poubelle n'est pas très commune, surtout lorsqu'on se rend compte que l'amour que lui voue son public ne s'estompe pas. On demande donc à Till s'il y a quelque chose qu'il voudrait accomplir avant de sentir qu'il peut vraiment mettre fin à sa carrière musicale. Comme on s'y attendait, il me répond d'une manière assez punk : « Bah rien! » L'esprit no future du punk est encore bien en vie, on suppose.

« On n'a jamais eu cette espèce d'ambition de carrière, ou de rêve. On prend les choses comme elles viennent, et on fait du mieux qu'on peut avec ce qui nous arrive », explique le chanteur de 36 ans. « Il n'y a rien à accomplir, et je ne dis pas ça, genre “On a déjà tout accompli”, mais c'est plutôt qu'on sera satisfaits, peu importe ce qui se passe. Je crois qu'on serait heureux même si on n'avait jamais eu de succès, fait de tournées ou même enregistré de disques. On n'est pas dans un truc de rêve de rockstar. On se laisse un peu porter par ce qui nous arrive. »

Billy Eff est sur internet ici et .

Guerilla Poubelle sera en performance à Montréal ce dimanche, dans le cadre du festival Pouzza.