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Sexe

Dix questions à une maman polyamoureuse

Être en relation intime avec plus d’une personne tout en étant mère de famille, ça ressemble à quoi?
Dix questions à une maman polyamoureuse
Photo par John-Mark Smith via Unsplash

Dans une étude de l’Institut canadien de recherche sur le droit et la famille de l’Université de Calgary sur la prévalence des familles polyamoureuses au Canada, le polyamour est décrit comme une « pratique ou condition se caractérisant par la participation à plusieurs relations intimes simultanément, sans motivation religieuse ni obligation découlant du mariage ». Avec cette définition en tête, je me demandais, concrètement, comment ça se passe au quotidien dans une famille dont les deux parents sont polyamoureux.

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Clarice*, une Longueuilloise de 37 ans, mariée depuis dix ans et dont le coming out polyamoureux date d’environ trois ans, a accepté de me rencontrer.

VICE : Comment s’est amorcée la transition vers la famille polyamoureuse?

Clarice : C’est une amie Facebook qui en parlait assez ouvertement qui a titillé ma curiosité. J’ai fait des recherches, sans la contacter, parce que je voulais que ça reste privé. Je sentais que j’avais ça en moi. J’en ai parlé à mon conjoint. On a commencé par expérimenter chacun de notre côté. J’ai discuté avec des hommes dans des forums et sur Fetlife. Mon conjoint a fait partie d’une triade. Il était avec un homme et une autre femme. Ils se sont séparés, mais mon conjoint est resté proche de l’homme. Il m’a proposé de le rencontrer, puisqu’il devenait de plus en plus important dans sa vie. Je l’ai rencontrée seule, dans un café. C’était tout un défi. Je le trouvais beau, mais je cherchais des points de repère. Je ne connaissais pas mon conjoint comme ça, en amour avec un homme. Il est encore avec lui. En ce moment, je fréquente deux hommes de mon côté.

Est-ce que vous vous parlez de vos aventures?

J’aime l’écouter, car j’ai l’impression de le redécouvrir, de le connaître autrement. C’est merveilleux d’apprendre des choses sur quelqu’un avec qui on est depuis si longtemps. Mais je ne cherche pas à savoir les détails. Lui, il aime que je lui raconte tout. Il veut savoir comment l’autre personne m’a désirée. Ça l’excite beaucoup de m’imaginer avec d’autres hommes.

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Comment dormez-vous? Est-ce que c’est style Playboy Mansion, tout le monde se retrouve au lit et après chacun dans sa chambre respective?

Une fois, quand mon conjoint n’était pas là, j’ai déjà invité un amoureux à venir me rejoindre pour une soirée, mais jamais un autre homme n’a encore couché à la maison. Je ne rejette pas la possibilité de vivre avec son amoureux ou un des miens, mais ce n’est pas ce qu’on projette. On parle plus du réaménagement de notre cour l’été prochain.

Qu’avez-vous dit aux enfants? À vos proches?

On en parle très simplement aux enfants. Ils connaissent l’amoureux de papa et l’autre amoureux de maman. Ils les connaissent en premier comme amis. Ils ne posent pas de questions et n’en parlent pas à l’école. On ne leur interdit pas. J’ai un peu peur des réactions, mais il y a toutes sortes de façons de s’aimer maintenant. Les parents de mon conjoint le savent, mais pas les miens. Je ne suis pas prête et je ne suis pas si proche d’eux. Je ne me sens pas obligée de leur parler de ça. C’est personnel.

Quel est le plus grand nombre de personnes que tu as fréquentées en même temps?

Trois. Je dis souvent que j’ai des amis pour différentes activités, et c’est pareil pour les hommes que je fréquente. Je ne fais pas la même chose avec chacun. J’ai mon conjoint, père de mes enfants, avec qui je vis. J’ai mon amoureux avec qui je vais dans des clubs échangistes. J’ai un amoureux avec qui je discute principalement. Nous sommes très semblables, comme des âmes sœurs. Je retourne à mes quinze ans avec lui.

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As-tu déjà eu des expériences décevantes?

Je me suis déjà présentée à des rendez-vous et personne n’était là. C’est beaucoup de déception et j’avais honte de ça. J’aime pas quand ça arrive. Je rencontre maintenant principalement dans des soirées thématiques et moins sur des forums ou groupes de réseaux sociaux.

Quels sont les préjugés des gens qui ne sont pas polyamoureux qui sont les plus frustrants ou déplacés?

Les gens qui savent que nous sommes une famille polyamoureuse sont assez ouverts. Personne n’a arrêté de me parler quand ils ont appris ça. J’aime pas quand on me demande c’est la décision de qui, et qu’on soit surpris quand je dis que c’est moi la première qui en ai parlé. J’ai l’impression que, pour certaines personnes, je subis le polyamour et les fantasmes de mon conjoint plutôt que de vivre ma propre vie comme je le veux. J’ai une collègue qui m’a déjà dit qu’elle était découragée de me voir encore en couple et que mon conjoint restait avec moi parce qu’il n’osait pas avouer qu’il était juste homosexuel.

Est-ce que tu as déjà été jalouse?

Quand j’ai rencontré son amoureux pour la première fois, j’étais jalouse. J’avais peur de perdre ma place dans la vie de mon conjoint. J’essaie de ne pas avoir peur. On parle beaucoup. La communication est importante dans tous les couples. J’ai déjà été très jalouse, dans des relations monogames, et j’aime pas ces souvenirs. J’ai été trompée et c’était la pire chose qui pouvait m’arriver à ce moment-là. J’apprends à me détacher des émotions négatives qui m’empêchent de me sentir bien.

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Est-ce que ta relation polyamoureuse t’a amenée à découvrir la sexualité différemment?

Oui. Je comprends mieux les conséquences de mes choix. Je ne me sens pas coupable de chercher à être satisfaite et heureuse de façon moins traditionnelle. Je suis allée dans des clubs échangistes. J’avais jamais fait ça avant. J’ai fait l’amour avec des femmes aussi. Je me découvre encore, dans les nouvelles relations que je tisse, c’est pas juste sexuel, c’est très humain.

Est-ce que tu t’imagines revenir à un couple de deux personnes?

Je ne juge pas, mais je pense que je souffrirais si je revenais à mon couple uniquement. Ça se peut, être juste nous deux, sans en fréquenter d’autres un moment, tout en étant polyamoureux. Je suis polyamoureuse. Je ne peux pas changer ça. C’est pas un choix. C’est pas compliqué : c’est qui je suis.