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Ce qu’il faut savoir du projet de loi sur la laïcité de la CAQ

Ce n’est vraiment pas la fin du débat entourant les signes religieux.
Ce qu’il faut savoir du projet de loi sur la laïcité de la CAQ
Le premier ministre François Legault répond aux questions des journalistes le 28 mars. Photo La Presse canadienne

Avec la précision d’une montre, le débat sur les signes religieux revient dans l’actualité périodiquement. Après les tentatives ratées du Parti québécois et sa charte des valeurs en 2014, et du Parti libéral et son projet de loi 62 en 2017, c’est au tour de la Coalition avenir Québec de mettre fin à la zone grise des signes religieux dans la fonction publique avec le projet de loi 21 sur la laïcité de l’État, déposé jeudi à l’Assemblée nationale.

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Afin de réaffirmer la laïcité du Québec, Simon Jolin-Barrette, le ministre de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion, entend régler le « problème » des signes religieux avec un cadre légal clair.

La loi proposée par la CAQ va plus loin que les recommandations du rapport Bouchard-Taylor. L’interdiction du port de signes religieux cible les employés de l’État en position d’autorité et ratisse beaucoup plus large : enseignants, directeurs d’école, agents de la paix, gardiens de prison, policiers, procureurs, membres de commissions d’enquête, président de l’Assemblée nationale. Les juges ne sont pas touchés, mais ce sera la responsabilité du Conseil de la magistrature de formuler le règlement en accord avec le principe de la laïcité de l’État.

Et ce ne sont pas que les signes ostentatoires et visibles qui sont visés : tous les symboles, comme la kippa, le hijab, la croix, le turban sikh, peu importe leur taille, visibles ou pas, doivent disparaître. Ainsi, une enseignante dans une école publique se verrait dans l’interdiction de porter un collier avec une croix sous son chemisier, mais une éducatrice en CPE pourrait porter le voile.

Le projet de loi prévoit ce qu’on appelle une « clause grand-père », qui reconnaît les droits acquis des employés déjà en fonction. Ces derniers pourront continuer d’arborer leurs signes religieux, tant qu’ils conserveront le même emploi. Par exemple, un policier qui se fait offrir une promotion perdrait son droit acquis en acceptant ce nouveau poste. Toutefois, il est précisé que personne ne devrait être congédié pour une question de signes religieux. « Donc, c’est sûr que, le matin, il n’y aura pas de fouille à nu pour vérifier si la personne porte un signe religieux, vous comprendrez », a dit M. Jolin-Barrette, lors du dépôt du projet de loi.

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On précise aussi que, pour donner ou recevoir un service de l’État, on doit le faire à visage découvert et qu’il n’y aura aucune exception, ni accommodement, ni passe-droit. Si une personne refuse de se plier au règlement, on lui refusera le service gouvernemental.

Si le projet de loi est adopté, des modifications seront apportées à la Charte des droits et libertés de la personne, afin de refléter le fait que « les libertés et droits fondamentaux doivent s’exercer dans le respect de la laïcité de l’État ».

Le même jour, l’ensemble des députés de l’Assemblée nationale a voté une motion pour retirer le crucifix du Salon bleu, mettant fin unilatéralement à des années de débats stériles sur la place de ce symbole religieux.

Aussitôt déposé, aussitôt contesté

Alors qu’il était de passage en Nouvelle-Écosse, le premier ministre Justin Trudeau a commenté le projet de loi de la CAQ. « Il est impensable pour moi de légitimer, dans une société libre, la discrimination de citoyens en se basant sur leur religion, a-t-il déclaré aux journalistes . Nous allons regarder attentivement le contenu du projet de loi lorsqu'il sera déposé complètement, alors je ne vais pas commenter en détail pour l'instant. Mais je voudrais dire ceci : le Canada et évidemment le Québec sont des sociétés laïques, où nous respectons profondément les droits et libertés de chacun, incluant la liberté d'expression et la liberté de religion. »

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Du côté de Valérie Plante, la mairesse de Montréal, le projet de loi ne passe pas du tout. « Ce projet de loi va également à l’encontre de la Charte montréalaise des droits et responsabilités qui est fondée sur l’engagement à combattre la discrimination, le profilage racial, la xénophobie, le racisme, le sexisme, l’homophobie, l’âgisme, la pauvreté et l’exclusion, lesquels sont de nature à miner les fondements d’une société libre et démocratique », a souligné la mairesse, dont les propos ont été rapportés par le Journal de Montréal. Moins de 24 heures après avoir formulé ces commentaires, Valérie Plante a été la cible de messages haineux.

Dans Le Devoir, les porte-parole d’organisations religieuses juives, musulmanes et sikhes se sont aussi prononcés contre le projet de loi.

De passage à la radio de Radio-Canada vendredi matin, le ministre Jolin-Barette est resté ferme sur son projet de loi, et n’entend pas reculer. Il se montre toutefois ouvert à écouter les propositions des partis de l’opposition.