VICE Magazine
Melissa Douds attend le bus. Douds vient d’avoir 41 ans, a travaillé pendant dix ans dans l’industrie du fast-food et gagne actuellement 8,50 dollars de l’heure. Elle confie que son volume horaire est imprévisible, pouvant aller de 70 à 15 heures par semaine. Photo de Chase Castoie
pauvreté

Survivre avec le salaire minimum aux États-Unis

Le photographe Chase Castor a suivi le quotidien de travailleurs de Kansas City qui tentent de survivre avec le salaire minimum.

Au mois de mai 2017, après avoir perdu les primaires démocrates pour l’élection présidentielle américaine, Bernie Sanders, le sénateur du Vermont, a présenté une loi avec trente autres sénateurs visant à augmenter le salaire minimum à 15 dollars de l’heure. Connue sous le nom de « Raise The Wage Act », cette loi était au cœur de la campagne de Sanders, de même que son soutien au mouvement « Fight for $15 » (se battre pour 15 dollars). Ce mouvement, initié en 2012 par des employés de fast-food américains, réclamait également le droit de se syndiquer dans tout le pays. Ces sujets ont atteint un point critique en avril 2016 lors d’un débat des primaires entre Sanders et Hillary Clinton, à Brooklyn. « L’Histoire a rattrapé Hillary Clinton, car dans tout le pays, des gens se sont levés pour dire que 12 dollars de l’heure, ce n’était pas assez », déclarait alors Sanders, cité par le Washington Post.

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Cette proposition, après tout, n’était pas la première du genre. En 2015, Sanders avait proposé une loi, « Pay Workers A Living Wage » (une paie décente pour les travailleurs), mais n’avait obtenu le soutien que de cinq autres sénateurs, et Chuck Schumer, le chef du groupe démocrate au Sénat, avait alors préféré voter pour un minimum horaire de 12 dollars. Au fil des années, Sanders n’a jamais lâché, et un mois après avoir perdu les primaires contre Clinton, au mois de juillet 2016, il a réussi à convaincre le Parti démocrate de le soutenir massivement. Son projet de loi est passé au Congrès.

La bataille, cependant, continue de faire rage – et ne semble pas baisser en intensité. Même si plusieurs États ont apporté leur soutien à ce projet – à New York, par exemple, le gouverneur Andrew Cuomo a signé un accord en 2016 afin d’augmenter le salaire minimum à 15 dollars de l’heure d’ici la fin 2019 –, les manifestations organisées par Fight for $15 continuent d’émailler le pays. Et il n’y a pas que des employés de fast-food ou de la grande distribution qui les rejoignent : nombreux sont ceux, dont les assistants maternels ou personnels de santé, qui s’y retrouvent. (Les employés de Disney World ont ainsi eu gain de cause en septembre 2018.) Au mois de février 2018, à l’occasion du cinquantième anniversaire de la grande grève des éboueurs de Memphis, les employés mal payés du Sud du pays se sont mis en grève et, marchant dans les pas de leurs ancêtres, ont défilé afin de réclamer ce qu’une femme a résumé au Guardian comme n’étant rien de plus que « du respect et un salaire décent ». Leurs manifestations s’inscrivent dans une tradition de défilés, de grèves et de coups d’éclat – les mêmes tactiques que celles des éboueurs ou des ouvriers de l’époque.

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Chase Castor, un photographe du Midwest, a rencontré quatre employés sous-payés de Kansas City qui luttent chaque jour pour survivre : Melissa Douds, Ke Flemons, April Shabazz et Nathan Wash. Il a capturé les moments intimes – leurs difficultés chez eux, leurs trajets interminables pour aller travailler – du quotidien de ces hommes et femmes. La plupart n’ont pas assez pour vivre correctement, et doivent passer des heures dans les transports pour aller bosser. Très souvent, ils doivent accepter deux boulots, n’ont pas de quoi se payer le minimum vital et triment plus de soixante heures par semaine, sans être assurés de pouvoir payer leur loyer.

Ce combat est pour eux.

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Chaque matin, Ke Flemons prépare ses deux filles, Kay Kay et Tootie, pour aller à l’école, puis prend un bus qui traverse la ville et la dépose chez Burger King, où elle gagne 8,50 dollars de l’heure. Même si elle partage le loyer et les factures avec sa sœur et sa mère, Flemons n ’a pas de quoi vivre correctement.

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Quand on lui coupe l’électricité, elle doit parfois charger son télé phone grâce à une rallonge reliée à la maison du voisin. Même si elle travaille 32 heures par semaine, elle et ses filles ont déjà été expulsées et ont dû vivre un temps dans la rue.

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Lors d’un après-midi estival et étouffant, la fille d’April Shabazz se penche afin de réparer un faux contact sur son ventilateur. Shabazz vit là avec ses deux enfants et sa petite-fille. Au moment où cette photo a été prise, elle était aide à domicile et livreuse pour Grubhub.

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Elle travaille plus de 70 heures par semaine et a gagné 2 300 dollars lors de ce mois de juillet 2017.

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Avec ses lunettes de vue cassées, Nathan Wash se pr é pare à aller au travail à 5 heures du matin. Avec ses deux boulots – chez McDonald’s, et dans le gardiennage –, il travaille environ 60 heures par semaine.

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Il commence toujours à 5 heures du matin et finit à 22 heures. Lorsqu’il a du temps libre, il étudie l’histoire syndicale chez lui.

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Douds et son mari, Mike Washington, louent une pièce dans une maison qu’ils partagent avec trois autres colocataires.

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Cette pièce est tout ce qu’ils peuvent se payer, car Washington souffre d’ un problème cardiaque qui l’empêche de travailler et demande des soins coûteux..

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