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La Chine et le Canada, main dans la main contre le fentanyl

D'après la GRC, le web invisible est le principal portail de vente du fentanyl de contrebande au pays.
Image tirée du documentaire Dopesick de VICE Canada.

La Chine et la GRC lutteront ensemble contre l'importation de fentanyl au Canada, a-t-on annoncé jeudi. Cette nouvelle alliance survient à un moment critique, alors que ce puissant opioïde synthétique 100 fois plus puissant que la morphine cause une épidémie de surdoses sans précédent dans l'Ouest du pays. Dans un communiqué, la GRC reconnaît que le fentanyl est « une sérieuse menace à la sécurité des collectivités canadiennes », et indique qu'elle s'est engagée à lutter « contre le trafic de fentanyl et d'autres opioïdes illicites vers le Canada » avec le ministère de la Sécurité publique de Chine, d'où provient le fentanyl.

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Un problème made in China

Selon Julie Soleil, directrice du Grip Montréal, une des difficultés dans l'interception du trafic de fentanyl réside dans sa composition. « La drogue se trouve sous forme de microgrammes. C'est beaucoup plus difficile à détecter, et c'est aussi beaucoup plus facile à faire rentrer au pays, puisqu'il en faut une moins grande quantité », a-t-elle expliqué à VICE.

Le fentanyl produit dans les laboratoires chinois est ensuite importé au Canada. D'après la GRC, le web invisible est le principal portail de vente du fentanyl de contrebande au pays.

Dans son communiqué, la police canadienne recense les récentes saisies de fentanyl provenant de Chine. En juin, l'Agence des services frontaliers du Canada oeuvrant à Vancouver a mis la main sur un kilo de carfentanyl, un tranquillisant pour éléphants 100 fois plus puissant que le fentanyl.

Au début du mois de novembre, un colis contenant du furanyl-fentanyl – un opioïde analogue au fentanyl – a été saisi au centre de traitement du courrier international, toujours à Vancouver.

C'est d'ailleurs en Colombie-Britannique que l'on recense le plus de surdoses mortelles au pays. Le plus récent rapport du Bureau du coroner de la province fait état de 622 surdoses mortelles depuis le début de l'année. Le fentanyl a été détecté dans 60 % des cas.

La Chine reconnaît son rôle

Cité par le Globe and Mail, le professeur en criminologie à l'Université Simon Fraser, Robert Gordon, juge qu'avec cet accord, la Chine admet que sa production de fentanyl a un impact sur le Canada. « C'est difficile à nier. Je suis sûr que le gouvernement chinois est embarrassé par ce problème. Ils reconnaissent qu'ils sont une source de cette drogue synthétique particulière », a-t-il déclaré au Globe and Mail.

Le professeur Gordon précise qu'avant cet accord, « bien peu d'efforts avaient été faits par les autorités chinoises pour cesser ce trafic » de la Chine vers le Canada, un trafic qui est « sans aucun doute » important.

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Des mesures à prendre

La GRC explique que les deux pays vont « donner un cadre officiel aux enquêtes conjointes » et accroître leur coopération « dans la lutte contre la criminalité ». Le but de la démarche : « perturber l'approvisionnement de fentanyl et opioïdes synthétiques ». On se fait toutefois avares de détails sur la façon dont cette collaboration va se dérouler.

Dans une déclaration commune, le ministre de la Sécurité publique de la Colombie-Britannique, Mike Morris, et son collègue ministre de la Santé, Terry Lake, ont salué l'initiative, tout en assurant qu'ils demeureraient « critiques » des mesures entreprises pour lutter contre la crise de surdoses. Ils demandent au gouvernement fédéral de bannir les presses à pilules.

Ces presses jouent un rôle crucial dans les overdoses liées au fentanyl, d'après Geneviève Fortin, organisatrice communautaire à Cactus Montréal. « N'importe qui peut s'improviser pharmacien, chimiste, commander des ingrédients, commander une presse, puis fabriquer lui-même ses propres comprimés dans son sous-sol, par exemple, a-t-elle expliqué à VICE. Dès que quelqu'un obtient une presse pour fabriquer des comprimés, il peut y mettre ce qu'il veut. »

Les comprimés contrefaits peuvent contenir des quantités beaucoup trop élevées de fentanyl, dont la dose létale se situe autour de deux milligrammes. Ces pilules peuvent également être vendues comme de l'OxyContin, « qui est beaucoup moins fort », et les consommateurs non avertis sont alors sujets aux surdoses, rappelle Geneviève Fortin.

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