On a envoyé un fan québécois d'ICP au week-end Juggalo de Calgary
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Culture

On a envoyé un fan québécois d'ICP au week-end Juggalo de Calgary

Ben de la bière, une tempête de Faygo et une rencontre awkward avec 2 Live Crew

Je ne connais rien aux Juggalos, à Insane Clown Posse (ICP) ou à tout le mouvement qui les rassemble, mis à part les quelques docus VICE que j'ai vus et la reprise de No Type qu'ICP a sorti en début d'année. Cet inconnu me fascine et, quand j'ai appris qu'il y aurait un Juggalo Weekend à Calgary, je me suis tout de suite porté volontaire pour y aller. Faute de temps, je n'ai pas pu, mais j'ai envoyé quelqu'un à ma place.

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C'est alors qu'intervient John Grizzly. John est pas mal la référence au Québec pour tout ce qui a trait à Insane Clown Posse et Swollen Members. C'est le leader de la division Québec des Battleaxe Warriors, le fan-club de Swollen Members, et il est bien connu sur les forums de Juggalos. Je lui ai donc refilé mon accréditation médias pour l'événement, où se sont aussi produits Ice-T, Onyx et 2 Live Crew.

Voici son histoire.

Jour -1

Mon aventure a commencé bien avant mon départ pour Calgary. Depuis cinq ans, j'ai un budget ICP de 60 $ par semaine, assez pour m'assurer plusieurs voyages par année. Essentiellement, je travaille pour voyager et je voyage pour la musique. C'est ma façon à moi d'oublier mes soucis. J'ai donc décidé d'aller au premier événement officiel Juggalo au Canada.

Arrivé à Calgary, je devais rejoindre des connaissances et amis rencontrés lors d'événements Juggalos, ainsi que des contacts que je me suis faits à travers les Battleaxe Warriors. Parmi eux, il y a Carlyle, un juggalo natif de Winnipeg que j'ai rencontré alors qu'il habitait à Québec. Moi, Carlyle, sa copine et deux de ses amis nous sommes partagés une chambre d'hôtel à Calgary.

Après avoir bu un peu à l'hôtel, nous sommes sortis. Un SDF nous a conseillé le bar Local 510. C'était plein à craquer, pour un spectacle du groupe de dream pop Ghostkeeper. Ce n'était vraiment pas notre style, donc, après avoir réussi à nous frayer un chemin jusqu'au bar, j'ai annoncé à mes compagnons que je payais une tournée de shooters et qu'on changerait d'endroit ensuite. En trinquant, l'un de nous a laissé échapper un « whoop whoop! », le cri de ralliement des Juggalos. S'en est suivi un festival de « whoop whoop », question de faire chier le restant du public.

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Nous étions rassemblés dans un cercle lorsqu'un groupe de personnes est passé à travers. Il nous a fallu peu de temps pour reconnaître Violent J d'ICP et son entourage. C'était à croire que nos « whoop whoop! » l'avaient attiré. Il semblait mécontent, et j'ai jugé sain de ne pas le déranger.

Une fois la troupe rassemblée, nous avons changé de bar pour quelques drinks, avant de finalement retourner au 510 pour y finir la soirée. J'ai closé le bar avec une facture très salée, me suis rendu chez des inconnus, me suis perdu en retournant vers l'hôtel, et des SDF ont tenté de me taxer. Il était passé 4 heures du matin quand je me suis finalement mis au lit.

Jour 1

Le réveil a été difficile le lendemain matin et le Tylenol a été mon meilleur ami. Avant que mes quatre partenaires de chambre et moi soyons prêts à partir, nous étions déjà en retard. Après avoir récupéré mes accréditations médias, je me rends vers la file d'attente pour rentrer (même si comme média je pouvais passer tout droit). J'aime parler aux Juggalos canadiens, car la plupart d'entre eux ne se sont jamais rendus aux gatherings américains. Et vu qu'ICP s'est fait refuser l'entrée au Canada pendant 20 ans, c'est un peu comme voyager dans le temps, pour moi.

La file d'attente pour rentrer dans la salle de spectacle

Quand je suis rentré dans la salle de concert, il y avait une fille sur scène qui se faisait péter des néons sur le ventre par un gars. Tout le long des murs de la salle, il y avait des stands qui vendaient toutes sortes de choses, des vêtements, des bijoux et même des popsicles faits maison (qui étaient excellents). Je suis allé voir un peu de lutte, mais je ne suis pas un très gros fan. J'ai croisé le gars des relations médias, James, qui m'a demandé si ça m'intéressait d'interviewer 2 Live Crew. Je lui ai dit que oui, car il fallait justement que je leur transmette un message, et il m'a donné rendez-vous à 17 h 15 sur le côté de la scène.

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Lyte, la dernière recrue de Psychopathic Records, le label d'ICP, est monté sur scène vers 16 h et m'a ébloui. Ses chansons parlent surtout des Juggalos et de la magie de notre famille. Il a été suivi par Onyx, qui a vraiment su capter l'attention de la foule. 17 h 15 a sonné, et James est venu me chercher. Il m'a amené à travers la porte arrière, jusqu'à un bunker dans le stationnement. À l'intérieur, il y avait quelques filles en petites tenues aguichantes, de gros gardes de sécurité et quelques autres reporters. Quand James a dit « Go! », personne n'a osé parler, donc j'ai commencé.

« Salut à tous… Je m'appelle John. »

Il y a eu un petit silence inconfortable de quelques secondes.

« Hum….OK. C'est qui, 2 Live Crew? »

Tout le monde est parti à rire. On devait probablement nous entendre dans la salle de spectacle. Pourtant, moi j'étais très sérieux, je ne savais vraiment pas à qui je devais parler.

Un gars s'est approché et m'a demandé « Who are you? » et s'est éloigné.

« J-P… or John Grizzly. »

Il s'est approché. « Tu viens d'où? », me demanda-t-il (en anglais) avant de s'éloigner une fois de plus.

« De Québec. Je suis un French Canadian, c'est peut-être pour ça que je parle comme un débile mental. » Il s'approche et vient se poser vers moi. « Donc c'est toi, 2 Live Crew? » Tout le monde éclate de rire une fois de plus.

Je scanne la salle, et tous les autres médias ont l'air de se demander ce que je fais là.

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« Check, tu vois bien que je n'ai aucune idée de ce que je fais ici. En fait, je n'ai même pas de question pour toi, j'ai juste un message à te transmettre, de la part d'un gars que je connais, lui ai-je dit. C'est en français, donc je vais le lire en français et ensuite te le traduire. »

« OK, cool », m'a-t-il répondu.

Je lui demande s'il permet que j'enregistre le message, et il répond non. Je lui demande pourquoi, et il me dit :

« Parce que je ne sais pas ce que tu vas dire! », et toute la salle recommence à rire. Ça commençait à être un peu lourd.

« OK, je n'ai pas besoin de l'audio, allons-y comme ça. Mon ami voulait que je vous dise que c'est vous qui lui avez appris à baiser : Face down, ass up, that's the way I like to fuck! »

Message de l'ami de John, à transmettre à 2 Live Crew

Éclat de rire général, une fois de plus. Je lui donne la main et lui dis que je n'avais rien d'autre pour lui et que je ne voulais pas lui faire perdre son temps. Je suis reparti sans photo ni audio.

Je rentre dans la salle et me dirige vers la scène principale, par souci d'avoir une bonne place pour le concert de Swollen Members. J'ai rencontré plein de gens de la faction de BaxWar de Calgary et me rends compte que notre mouvement est réellement global. Le spectacle commence et je suis transporté dans le temps. Ils jouent de vieux succès des albums Bad Dreams et Monster in the Closet! Je ne me rappelle même pas des paroles, mais Swollen Members déchire la scène. Leur performance a été écourtée, vu que l'horaire était serré et qu'ils ont commencé plus tard que prévu.

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Prevail, de Swollen Members, avec un banc pour bébé, à l'effigie de son autre groupe, Alpha Omega

C'était le moment parfait pour une clope et une tournée de shooters avec Mankini, une star dans le monde des Juggalos. Tout le monde le respecte, et il est surtout connu comme étant le dude qui se promène en bikini et qui déchire tout dans le mosh pit. Mon genre de dude, quoi.

Je me prépare pour le dernier show de la soirée : ICP qui joue son album Riddlebox (mon album préféré!) au complet. Ils étaient censés en avoir fait la dernière représentation aux États-Unis en 2016, mais ils ont fait une exception pour le Canada.

C'est très vite apparent que le show est bien rodé, mais j'arrive à monter sur scène à temps pour le Faygo Armageddon. C'est incroyable! Je suis tout trempé, j'ai perdu tous mes repères… Plus personne ne se ressemble, mais tout le monde est aux cieux. Je dois encore payer ma facture et récupérer mon hoodie, mais la serveuse a disparu avec ma carte de crédit et mon permis de conduire. Les gardes de sécurité essaient tant bien que mal de faire sortir tout le monde, car la salle a été bookée pour un show électro qui devait débuter 45 minutes plus tard, et il y a une marre de Faygo à nettoyer. Je trouve le propriétaire du bar, récupère mes trucs et file vite à l'hôtel me changer avant de me rendre à l'after.

Changé et prêt à faire la fête, j'y arrive et c'est déjà malade. Il y a presque exclusivement des artistes. La bière coule à flots, et ICP est sur scène, en train de jouer de vieux classiques. C'est un show-surprise, et le DJ balance de vieilles tounes dont les gars se rappellent pas trop les paroles, donc il y a des moments où la foule doit chanter : un moment parfait. Pendant ce temps-là, dehors, s'organise un cypher. Mon colocataire beatbox, pendant que des MC comme Big Hoodoo et Lyte spit des bars.

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Insane Clown Posse à l'afterparty

Après ça, tout est flou. J'étais saoul et fatigué, et mes souvenirs me reviendront surtout grâce à des vidéos trouvées plus tard sur internet.

Jour 2

Deuxième journée, j'arrive assez tôt pour attraper un combat de lutte. Une fois de plus, mon arrivée tardive me fait manquer la performance de Pyroness. J'ai par contre réussi à booker une entrevue avec Kissing Candice. Je n'ai jamais entendu ses albums, je sais juste que c'est du hard rock/métal fucked-up avec des déguisements de zombie. Les boys sont vraiment sweet, je les avais rencontrés la veille, au after. Ils ont répondu à mes questions. En général, c'était du genre : « Qui êtes-vous? », « Que faites-vous? », « Que pensez-vous des Juggalos? » Leurs réponses étaient quand même assez plates…

Leur spectacle, par contre, était complètement cinglé. Je ne peux même pas vraiment en parler, parce que j'ai encore peur. Tout ce que je peux vous dire, c'est que j'étais dans le mosh pit, protégé par des lutteurs, Mankini et des Juggalos hardcore.

Kissing Candice

Après, c'était le show de Merkules, de l'écurie Stomp Down Killas (SDK, un crew rival des BaxWar). Merk a vraiment livré la marchandise, c'était malade. Je ne l'avais jamais vu live et je ne connaissais aucune de ses chansons. C'est un choix que j'avais fait, afin d'avoir la vraie expérience Merkules, et j'ai été très satisfait.

Plus tard, je suis allé voir Kung Fu Vampire, que j'avais déjà vu en concert à quelques reprises et qui donne toujours un très bon show. Il a été suivi par Big Hoodoo, qui a donné une performance qui m'a laissé un peu perplexe, mais très émotionnel. Il parlait beaucoup d'à quel point il était content d'être là, avec la famille des Juggalos. Je crois même avoir versé une larme.

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Rendu à ce point-là, il fallait absolument que je me repose les pieds, j'avais trop mal. Je me suis dit que j'allais fumer une clope, prendre un shot, trouver mes amis et me poser un peu jusqu'au spectacle de Ice-T. Une fois assis, j'entends le début d'une instru de Madchild. Je me retourne, et boom! un show solo de Madchild. Je suis parti à la course pour lui donner la main durant le show, comme j'ai l'habitude de le faire. Complètement fou comme show-surprise.

Madchild en show-surprise.

Après Madchild, je trouve mes colocs. On prend une bière et un shooter, et je leur annonce que je retourne m'asseoir, car mes pieds me font vraiment trop mal. Je trouve des divans dans le fond de la salle et m'y dirige, et reboom! je croise Madchild qui prend des photos avec des fans. Naturellement, je vais lui parler, vu que la place est pleine de membres du SDK (qui en veulent à Madchild à cause de ses propos à l'endroit de Snak the Ripper, NDLR). Fuck les divans, j'ai choisi de checker Ice-T en compagnie de Madchild, Kung Fu Vampire et Kissing Candice. C'était irréel. Une autre clope, et je me prépare pour un deuxième show de ICP en 24 h.

Magie. Clowns, confettis, plumes et beaucoup de Faygo.

Tout trempé une fois de plus, je prends un taxi et retourne à l'hôtel me masser un peu les pieds et prendre une douche, avant de me rediriger vers l'after avec des vêtements secs, pour mes colocs qui m'y attendaient déjà.

J'arrive là-bas déjà épuisé et éméché. ICP finissait son set. J'ai dit au revoir à tous les gens que j'avais rencontrés au cours de mon périple et me suis redirigé vers l'hôtel. Au bout du rouleau, sans le sou, toujours imbibé de Faygo, je ne voulais rien d'autre que de me coucher en position fœtale dans mon grand lit d'hôtel bien frisquet, pour m'endormir en me massant les pieds.

L'aventure prenait fin et le lendemain, c'était checkout à 11 h 30 et vol de retour vers Québec Cité à 8 h le lendemain matin. Fuck this shit, I'm out.