Mes ancêtres – oui je dis mes ancêtres car même si on ne porte pas le même nom, je me considère comme le descendant des Vadorin, ont fondé la triperie en 1962. Maurice, le petit-fils du propriétaire, m’a légué la boutique quand il est parti à la retraite en 2012. Il est depuis décédé. À mon arrivée, toute la famille y œuvrait : Jacques, le père, Maurice, le fils – la maîtresse de maison donnait souvent un coup de main, et moi.La recette de famille des tripes à la mode de Caen : de la panse de bœuf en petits morceaux cuite avec des pieds de veau, du vin blanc, des tomates, des oignons, du laurier, du sel, du poivre, le tout cuit pendant quinze heures, pour les rendre plus tendres. En Espagne, les tripes se cuisinent de plusieurs manières, avec du piment ou de la coriandre par exemple. Dans le quartier, beaucoup de Portugais m’achètent des tripes pour les préparer avec des haricots, c’est aussi très bon.
Les abats reviennent à la mode, grâce aux restaurants qui les valorisent sur leur carte, d’une part, mais aussi grâce à la mise en avant de leurs bienfaits ! Prenez le foie de veau : une tranche passée au beurre avec un peu de moutarde et de vinaigre, et dans l’heure qui suit vous êtes complètement requinqué ! Ce sont des morceaux très riches en fer, moi ça me sauve souvent des coups de fatigue.On croit que les abats sont bon marché, et c’est le cas pour certains d’entre eux – les foies de génisse, les cœurs, la cervelle… Tout comme la panse de bœuf, ce sont des abats entre 5 et 12 € le kilo. Le ris de veau est le plus dispendieux, celui de première qualité je le vends autour de 45 € le kilo. C’est presque aussi cher que du filet de bœuf ! Il y en a d’autres qui sont un peu « cassés », plus accessibles. Le foie de veau français a un coût aussi, plus de 40 € au kilo.
La crise de la vache folle a véritablement éclaté en 1996, avec l’embargo européen sur tous les produits bovins britanniques ainsi que leurs dérivés. En France, selon l'Office national Interprofessionnel de la Viande, de l'Élevage et de l'Aviculture (OFIVAL), la consommation d’abats cette année-là a chuté de 45 % par rapport à 1995. Parmi les professionnels de la viande, ce sont les tripiers qui ont été le plus touchés par cette crise sanitaire.
Propos rapportés par Delphine Le Feuvre