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société

Un juge québécois pourrait perdre sa job parce qu’il aurait acheté de la coke

Après presque six ans de délibération, il y a enfin un consensus.
Capture d'écran de la vidéo

Le 17 septembre 2010, l’avocat Michel Girouard se présente au bureau de son client, Yvon Lamontagne. Il s’assoit, fait glisser de l’argent sur la table vers M. Lamontagne, qui en échange lui donne un petit paquet. Deux semaines plus tard, Me Girouard devient juge à la Cour supérieure du Québec.

Ce que Me Girouard ne pouvait pas prévoir, c’est qu’en 2012, Yvon Lamontagne allait devenir informateur pour la police et qu’il remettrait à la Sûreté du Québec des preuves vidéo des transactions de drogues qu’il effectuait à partir de son bureau, dans un club vidéo de l’Abitibi. Entre autres, M. Lamontagne a avoué avoir vendu à peu près un kilo de cocaïne à Girouard, entre 1987 et 1991. Par contre, Me Girouard et M. Lamontagne affirment tous deux que la transaction mentionnée précédemment n’avait rien à voir avec la drogue. Selon leur version des faits, Me Girouard remettait à son client de l’argent pour lui acheter des films pornos usagés, alors que son client lui remettait une note concernant un dossier fiscal.

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Mais le Conseil canadien de la magistrature n’a pas cru à la version des faits du juge Girouard et de M. Lamontagne, qui est maintenant en prison pour trafic de drogues. Un rapport du conseil, envoyé à la ministre fédérale de la Justice, Jody Wilson-Raybould, recommande la destitution immédiate de Michel Girouard. « L'intégrité du juge a été irrémédiablement compromise, la confiance du public envers la magistrature a été ébranlée, et le juge est inapte à remplir utilement ses fonctions », est-il écrit dans le rapport.

Le Conseil canadien de la magistrature a mené deux enquêtes avec deux conseils différents depuis 2012. Dans le cadre de ces enquêtes, Me Girouard a eu l’occasion de s’expliquer au sujet de la vidéo et des preuves récoltées contre lui, mais on peut lire dans le rapport envoyé au ministère de la Justice qu’on « ne trouve nulle part une explication simple, sensée, cohérente, complète ou satisfaisante de ce qu'on voit dans l'enregistrement vidéo. »

En plus de la transaction captée par les caméras de sécurité, d’autres informateurs ont aussi rapporté des antécédents de Me Girouard. Lors de l’enquête, baptisée Opération Écrevisse et ouverte en 2010, la SQ a aussi appris que le juge avait demandé à M. Lamontagne et à un autre membre de l’organisation du crime organisé à laquelle il appartenait de l’aider à construire une serre de cannabis au sous-sol de son domicile. Michel Thibault, un autre informateur, affirme avoir aussi échangé de la cocaïne contre des services juridiques avec M. Girouard, dans les années 90.

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Si le rapport final suggère la destitution de Me Girouard, trois des membres du conseil formé de 23 personnes jugent qu’il n’a pas reçu un procès équitable, car la plupart des preuves recueillies contre lui étaient en français, langue que des membres du conseil ne parlent pas.

La ministre Wilson-Raybould sera chargée d’évaluer le dossier. Son directeur des communications, David Taylor, indique toutefois que, selon la Constitution du Canada, « un juge ne peut être démis de ses fonctions que par une résolution conjointe du Parlement ».

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