Une boite de cassettes

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Culture

En visite chez Dominic, collectionneur de cassettes

Le rock, ça s’écoute à l’ancienne

Cet article fait partie de la série « Les vraies affaires ».

Dominic Berthiaume est photographe et membre des formations rock Corridor et Silver Dapple. Il est aussi un collectionneur chevronné. Depuis quelques années déjà, Dominic accumule des bibelots de chats, de vieux jeux vidéo, des t-shirts douteux et de la musique enregistrée sur toutes sortes de supports. Il possède une impressionnante collection de vinyles, mais sa vraie passion, c’est les cassettes, il en a près de 700.

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Ses amis ne comprennent pas toujours son engouement pour ces boîtes à ruban, dont la qualité sonore est souvent critiquée. « Les gens ont des souvenirs de marde de la cassette parce qu’à l’époque, on enregistrait des chansons directement de la radio sur des cassettes vierges cheap, mais, dans un bon tape deck, ça sonne bien. » Dominic est plutôt d’avis que l’imperfection du tape, le petit sifflement qui lui est propre, donne un charme à l’écoute de ses albums préférés. « Le mix sonne "écrasé", ça fonctionne pas avec tous les styles musicaux, mais ça se prête bien aux trucs que j'écoute. »

La première cassette qu’il a achetée, c’est Nevermind de Nirvana, en 1994. Kurt Cobain venait de mourir. C’est comme ça qu’il a découvert le groupe. Ses parents étaient abonnés à la Maison Columbia et ils l’ont commandée pour lui. Vers la fin des années 90, il a complètement délaissé les cassettes pour s’acheter des CD, comme tout le monde, mais il a recommencé à s’y intéresser en 2013. Un jour, il est tombé sur Freedom of Choice de Devo dans une friperie, en vente à 0,50 $, et ç’a été le début d’une passion.

Ma dernière paye: Cyber

Depuis, Dominic dépense environ 500 $ en cassettes par année. Il passe environ deux heures par semaine à les magasiner dans les brocantes ou à son commerce préféré : La fin du vinyle, sur Saint-Laurent. Il peut aussi passer de nombreuses heures à chercher les titres qui manquent à sa collection sur Discogs. C’est d’ailleurs sur cette plateforme qu’il s’est procuré sa cassette la plus dispendieuse : l’album Pink Flag du groupe britannique Wire pour laquelle il a déboursé 30 $. Il achète la majorité de ses cassettes pour 10 $ ou moins, mais il avait envie de se faire plaisir avec cette cassette à 30 $, plutôt que de devoir débourser 100 $ pour une version originale sur vinyle. De façon générale, il préfère se salir les mains pour trouver ses trésors que de les acheter sur internet.

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Si Dominic devait, en cas de malheur, ne sauver que trois cassettes de la destruction parmi toute sa collection, il préserverait d’abord Obaa Sima, du rappeur Ata Kak originaire du Ghana. C’est une cassette achetée sur le label Awesome Tapes from Africa, pour 10 $ US, qui met le feu dans les partys à tout coup. La deuxième serait Freedom of Choice de Devo qui marque le début de sa collection. Et, enfin, Check your Head des Beastie Boys, parce que c’est l’un des premiers bands qu’il a découverts dans les années 90 et qu’il l’écoute encore souvent aujourd’hui.

L’avenir de la collection de Dominic dépend d’une chasse au trésor qu’il mène depuis quelques années. Il cherche Loveless de My Bloody Valentine, une des cassettes les plus rares sur le marché. Pour Dominic, c’est le Saint-Graal des cassettes. « Le jour où je vais trouver ça, je vais arrêter d’acheter des cassettes. »

Pour le moment, sa collection est constituée à 70 % de musique rock. Il possède, entre autres, presque tous les titres de Nirvana, de Pavement et de Radiohead . Le reste est un mélange de funk, de soul et de rap. Il est d’ailleurs bien fier d’avoir trouvé la rare Illmatic de Nas au fond d’un bac rempli de cassettes « poches » dans un bazar à Halifax alors qu’il était de passage pour donner un concert dans la ville. Ladite cassette, qu’il a payée 1 $, en vaut 40 sur le marché de la revente. Un bon coup.

Parmi les autres trésors de sa collection, on trouve Homework de Daft Punk, qu’il a dénichée pour 1 $ au Village des Valeurs et qui en vaut 80. Il y a aussi la cassette épuisée de Homeshake, que Peter Sagar a lancée sur Fixture Records en 2013, avant d’intégrer le label américain Sinderlyn. Dominic l’a trouvée dans une friperie pour 1 $ et elle en vaut environ 100 aujourd’hui.

Elle n’avait plus de jaquette, mais il a écrit à Fixture pour savoir s’il leur en restait et ils ont eu l’amabilité de lui en offrir une. Monsieur était content.

Récemment, à l’aube de son déménagement, Dominic a fait le tri dans ses cassettes et il s’est débarrassé d’une centaine d’entre elles, visiblement ses plus « LOL », dont des titres des Backstreet Boys et de Boyz II Men ainsi que des Dance Mix 94, 95 et 96. Il les a vendues et a utilisé l’argent pour s’en acheter de nouvelles, évidemment.

Sa collection vaudrait près de 6000 $ s’il décidait de la revendre aujourd’hui. Mais ce n’est pas dans ses plans : « Si jamais je galère, je pourrais revendre, mais je galère jamais », plaisante-t-il. Les fous de cassettes audio, il y en aura toujours, pas d'inquiétude pour Dominic de ce côté-là. Pour le moment, l’heure est à l’expansion. Il poursuit chaque semaine sa chasse passionnée pour trouver de nouveaux trésors et agrandir sa collection. En attendant le Graal.

Cet article a été publié grâce au soutien de la Banque Nationale.