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Ce n’est pas du sexisme si la NASA a annulé la première sortie extravéhiculaire entièrement féminine

La micropesanteur change le corps humain de façons imprévisibles.
​NASA astronauts Nick Hague (left), Christina Koch (center), and Anne McClain (right). Image: NASA
Les astronautes Nick Hague (à gauche), Christina Koch (au centre) et Anne McClain (à droite). Photo : NASA

L’article original a été publié sur VICE États-Unis.

La NASA a annulé ce qui aurait été la première sortie extravéhiculaire entièrement féminine de l’histoire à cause d’un problème de taille de combinaison spatiale, a annoncé l’agence lundi dernier.

La sortie extravéhiculaire doit toujours avoir lieu vendredi, mais les deux astronautes seront Christina Koch et Nick Hague. Initialement, à la place de ce dernier, ce devait être Anne McClain.

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La NASA a été critiquée et accusée de sexisme dans les médias sociaux pour cette décision. Bien qu’il y ait en effet un écart entre les sexes dans l’exploration spatiale, le manque de combinaisons spatiales appropriées découle davantage de l’effet sur le corps de la micropesanteur que de discrimination de la part de la NASA.

Anne McClain a effectué sa première sortie dans l’espace avec Nick Hague le 22 mars. Elle portait un torse supérieur rigide de grande taille, qui lui avait convenu lors des exercices au sol. Mais au cours de la sortie dans l’espace, elle a jugé qu’il ne lui convenait pas aussi bien, et a décidé qu’il vaudrait mieux le remplacer par celui de taille moyenne.

« Anne s’est entraîné avec un torse supérieur rigide de taille moyenne et un de grande taille au sol », écrit Brandi Dean, une porte-parole de la NASA dans un échange par courriel avec VICE. « Nous faisons de notre mieux pour prévoir les bonnes tailles des combinaisons dont les astronautes auront besoin, en nous basant sur celles qu’ils ont portées lors de l’entraînement au sol, et, dans certains cas, les astronautes s’entraînent avec des combinaisons de différentes tailles. »

Cela dit, la micropesanteur change le corps humain de façons imprévisibles. « Aucun environnement d’entraînement ne peut simuler une sortie dans l’espace en micropesanteur, et une personne peut se rendre compte que sa taille de préférence a changé dans l’espace », explique Brandi Dean.

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Bien qu’il y ait deux torses de taille moyenne dans la Station spatiale internationale (SSI), un seul est prêt pour les sorties extravéhiculaires. Il faudrait 12 heures à une équipe pour préparer le deuxième. Le temps dans la SSI ayant une grande valeur, la NASA a décidé de remplacer l’astronaute.

La NASA a aussi rappelé qu’il n’avait jamais été question de faire intentionnellement de la première sortie extravéhiculaire entièrement féminine un événement historique : c’est simplement le résultat du processus de sélection.

« Nous n’en avons pas fait de cas, juste parce qu’ici, tout dépend de la compétence et des capacités, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme », a dit Kenny Todd, directeur de l’intégration des opérations de l’ISS, au cours d’un bref point de presse le 19 mars au sujet de la sortie extravéhiculaire. « C’est une belle occasion et une belle façon de souligner certaines des choses qui se passent ici, mais ce sont simplement deux solides astronautes. »

Dans le même point de presse, Mary Lawrence, la directrice de vol de cette série de sorties extravéhiculaires, a fait remarquer qu’un changement d’astronaute était possible. « Anne et Christina auront l’occasion d’effectuer la première sortie extravéhiculaire entièrement féminine, un moment dont je pense que la NASA sera fière — si les affectations restent les mêmes », a-t-elle prévenu.

Elle a aussi insisté sur le fait que la micropesanteur peut chambouler un plan de sortie extravéhiculaire. « On sait assez bien quelle taille de combinaison convient aux astronautes, mais, évidemment, le corps change légèrement en raison de la redistribution des fluides et de l’élongation de la colonne vertébrale. »

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La série de trois sorties dans l’espace a pour objectif l’installation de nouvelles batteries lithium-ion pour les panneaux solaires de l’ISS.

Christina Koch portera la combinaison spatiale de taille moyenne pour la sortie avec Nick Hague. Anne McClain portera cette même combinaison pour la troisième sortie, avec l’astronaute québécois David Saint-Jacques, provisoirement prévue pour le 8 avril. Pour l’instant, aucune sortie extravéhiculaire entièrement féminine ultérieure n’est prévue.

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La décision de remplacer Anne McClain a été prise pour la sécurité des astronautes. Bien que ce soit décevant, il est bon de se rappeler que la proportion de femmes parmi les astronautes est en constante croissance. Un tiers des astronautes en service sont des femmes, et la moitié de la cohorte de 2016 de la NASA était des femmes, dont Anne McClain. La probabilité que deux femmes fassent une sortie extravéhiculaire dans les prochaines années est très grande.

De plus, Anne McClain et Christina Koch, qui font partie du club sélect que sont les astronautes, se joignent au club encore plus sélect des astronautes qui ont fait une sortie dans l’espace.

« C’est une expérience rare dans le cadre d’une autre expérience rare que de faire une sortie dans l’espace », a dit l’ancienne astronaute Kathryn Sullivan, première femme à avoir effectué une sortie extravéhiculaire, en 1984, en entrevue téléphonique avec VICE. « C’est très mémorable, et tout ce qu’on veut après, c’est en faire d’autres. »