Cet article a été traduit par Motherboard France.Pour la première fois de son histoire, Facebook a permis aux journalistes de pénétrer dans son nouveau centre de suppression de contenu à Essen, enAllemagne. Dans l’immeuble de cinq étages, plus de 400 employés sont déjà à la tâche et suppriment des commentaires, des photos et des vidéos enfreignant le règlement de Facebook.
Les salariés sont parfois amenés à examiner des vidéos et des photos perturbantes au cours de cette opération. Un porte-parole de Facebook m’a affirmé qu’une grande partie du contenu visible comprenait principalement des discours de haine, du spam ou encore du contenu créé par des faux comptes. Ces employés sont principalement chargés de mettre à la poubelle les déchets créés par les 2 milliards d’utilisateurs actifs de Facebook à travers le monde. Le contenu non autorisé sur Facebook — selon le règlement intérieur de la plateforme — doit être vérifié et supprimé par les modérateurs. Cette tâche essentielle est complexe et pénible.
Publicité
Les premiers employés à Essen ont commencé à travailler en octobre. A la fin de l’année 2017, 500 employés travaillaient dans les bureaux situés dans une zone industrielle à quelques minutes du centre-ville d’Essen. Le centre est maintenant le second de son genre en Allemagne, l’autre se trouvant à Berlin Ouest.Au cours de la visite, Facebook nous a laissé entrevoir un des espaces de travail de ses employés. Selon le staff, cet espace de travail est représentatif de tous les autres situés dans le bâtiment. L’« Étage », le nom donné par le personnel à ces espaces, n’est pas différent des bureaux en open-space standards. Les zones que les journalistes ont été autorisés à photographier comprennaient environ une douzaine d’employés assis à leurs postes de travail, équipés d’un écran d’ordinateur.
À quoi ressemblent les bureaux ?
Facebook ne nous a pas laissé parler aux employés ou nous pencher sur leurs écrans pendant la visite de 30 minutes. Les employés n’ont révisé aucun contenu utilisateur lors de la présence des journalistes, pour des questions de sécurité, selon un porte-parole de Facebook.Une salle de réunion et une salle de pause sont situés juste à côté de l’espace de travail. A part ça, les locaux ressemblent à ceux du premier centre allemand de censure exploité par Arvato à Berlin.
Qui est en charge du centre ?
Publicité
Haine et violence : quel contenu est examiné ?
Publicité
Comment Facebook pense éviter la censure inutile
Le contenu qui n’est pas contrôlé à Essen
Un porte-parole de Facebook a confirmé à Motherboard que le contenu particulièrement brutal et sensible comme la propagande terroriste, les représentations de violence extrêmes et la pédopornographie n'était pas encore vérifié à Essen. Selon un rapport du grand quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, ce type de contenu est traité par le centre de censure de Facebook de Berlin. Les employés de CCC ne contrôlent pas non plus les vidéos live de Facebook. L’entreprise nous a affirmé qu'il n'était prévu d’élargir le champ des contenus examinés par le centre de suppression d’Essen.
Publicité
Les règles qui déterminent ce qui est censuré ou non
Quel salaire pour les employés, et dans quelles conditions ?
Le taux horaire brut payé aux employés est de 10,5€. Cependant, d’autres salariés occupent des postes plus importants et touchent 15€ de l’heure. Une majoration est accordée à ceux qui travaillent la nuit ou le samedi. La rémunération est supérieure au salaire minimum, qui s’élève actuellement à 9,1€ en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Tous les employés sont en poste à temps plein pour des contrats de plus de 40 heures de travail par semaine. Les bureaux étant occupés 24h/24, un système de roulement a été mis en place.
Publicité
Parce qu’une partie du contenu a tendance a être « plus intense et explicite », explique Ulf Herbrechter, le manager du CCC, quatre psychologues sont présents sur le site d’Essen. Cette décision a été prise en réaction aux discussions critiques en fin d’année dernière suite à l’ouverture du premier centre de modération de contenu de Facebook. Des journalistes du Süddeutsche Zeitung ont dénoncé le niveau de pression et les exigences de confidentialité imposés aux employés du centre d’Arvato, à Berlin. Un certain nombre de collaborateurs ont cependant réfuté ces critiques.; « Nous sommes tous fiers de notre travail, a déclaré un employé d’Arvato de 38 ans à WDR. Nous sauvons des vies. » Le même discours nous a été tenu lors de notre visite à Essen.
Facebook ne nous a pas autorisé à discuter de cas concrets avec les employés lors de notre visite.Facebook ne nous a pas transmis de chiffres précis. Cependant, durant l’été 2017, Richard Allan, le vice-président des politiques publiques de Facebook pour l’Europe, a affirmé qu’environ 15 000 posts avaient été supprimés en un mois seulement à cause des discours d’incitation à la haine provenant d’Allemagne. Un nombre bien inférieur à la somme des contenus signalés par la communauté, que le réseau social estime à plusieurs milliards. Cependant, ce chiffre ne s’arrête pas aux discours de haine uniquement. Il comprend en effet tout ce qui peut enfreindre les Standards de la communauté Facebook. Facebook n'a pas pu nous dire quelle quantité de ce contenu provenait d’Allemagne.
Quelle quantité de contenu est supprimée en Allemagne ?
La quantité de censure et de signalements mais aussi cet aperçu des procédés internes prouvent que la modération est un défi complexe, même pour Facebook. Notre visite terminée, un grand nombre de questions subsiste. Facebook essaye, et particulièrement en Allemagne, d’être transparent, mais les détails des règles suivies par les employés restent flous.Une chose est claire : le besoin de modérateurs, comme ceux à Essen et à Berlin, sera croissant. Mark Zuckerberg a récemment annoncé l’intention de Facebook d’augmenter le nombre de modérateurs à travers le monde de 10 000 à 20 000. Les entreprises comme Arvato et CCC recevront donc sans aucun doute de plus en plus de contrats.Pour plus d'articles comme celui-ci, inscrivez-vous à notre infolettre.