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Société

Comment faire son coming out dans une famille homophobe

L’homophobie commence souvent à la maison. Voici comment gérer le rejet de ceux qui sont censés vous aimer plus que tout au monde.
Comment faire son coming out dans une famille homophobe

Aucune discussion n’égale celle qui consiste à révéler à ses parents que l’on est homo. En 2015, j’ai fait mon coming-out à ma famille et, après quelques débats intenses, ils ont fait des efforts pour comprendre ma vie. Mais quand je suis enfin tombé amoureux de quelqu’un que je pensais pouvoir ramener à la maison, la tempête s’est déchaînée. Mes cousins s’en sont mêlés et mes parents m’ont viré de la maison à cause d’une photo de moi et de mon partenaire. Tout cela a eu lieu en l’espace d’une semaine. Je savais que je ne pourrai plus jamais correspondre aux idéaux que mes parents avaient imaginés pour moi. J’avais deux sœurs plus âgées, et elles avaient tout fait selon les règles, à savoir épouser un homme de leur rang et avoir des enfants – une fille et un garçon chacune. Mais moi ? J’étais le mouton arc-en-ciel de ma famille.

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Je mentirais si je disais que ce virage soudain de la compréhension à l’incompréhension de ma famille ne m’a pas blessé. Mais, au fond de moi, j’avais toujours su que ça arriverait. J’avais anticipé ce moment depuis des années et, après avoir réfléchi pendant six ans, c’est ma mère qui a décidé que je devais partir. De bien des façons, ça a été une bonne chose, car j’ai pu emménager dans mon propre petit paradis queer avec mon compagnon, même si nous aimerions que nos deux familles reconnaissent qu’on ne choisit pas qui on aime. En toute honnêteté, si je dois de nouveau me confronter à des insultes homophobes, je préférerais que ça vienne de parfaits inconnus plutôt que de mon propre père. Donc, si vous voulez vous en sortir, laissez-moi – et quelques-uns de mes amis queer – vous aider à préparer l’inévitable, à savoir : survivre seul.

Étape n° 1 : faites votre possible pour que ça marche à la maison

Tout d’abord, il ne faut pas penser que votre famille va automatiquement vous détester et organisez votre fuite sans qu’ils le sachent. Je comprends que pour beaucoup de personnes, ne pas sortir du placard, c’est aussi une décision volontaire, et je la respecte. Mais si vous voulez vivre une vie qui correspond à votre sexualité, commencez par ce que j’appelle le « jeu des indices », histoire de tâter le terrain. Il y a beaucoup de médias queer disponibles aujourd’hui, qui peuvent aider à simplifier la conversation concernant l’homosexualité à la maison. Je me souviens de m’être servi d’un épisode d’une série indienne populaire, appelée Satyameva Jayate, qui parlait de l’acceptation des différentes sexualités, comme excuse pour amorcer la conversation.

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Divya Roop, un maquilleur et mannequin qui ne se conforme pas à son genre de naissance, explique : « Il faut tenter de savoir ce que la famille pense des LGBT. On peut le faire en parlant de sujets liés à ça, que ce soient les mariages de célébrités, les figures politiques queer, ou encore les problématiques auxquelles nous faisons face. Quand vous êtes certain que votre famille les soutient, alors vous pouvez leur en parler, mais essayez de ne pas être trop direct au début. Cela peut ne pas être facile pour eux, même s’ils vous comprennent. Mais si vous pensez que votre famille ne vous soutient pas, pensez d’abord à votre éducation et à votre carrière. » Donnez le temps à votre famille de comprendre, sans vous attendre à ce qu’ils comprennent tout à 100 % immédiatement. Montrez-leur à quel point vous êtes heureux et en bonne santé. Et donnez-leur des outils pédagogiques pour qu’ils comprennent ce que signifie être queer. Essayez de garder le contact avec eux. Mais si cela devient trop compliqué, alors il est temps d’organiser votre retrait.

Étape n° 2 : économisez

S’il y a bien une façon bien coercitive dont les parents peuvent se servir pour « extraire l’homosexualité » de leurs enfants, c’est bien la menace d’être coupés de tous moyens financiers. À cela, j’ai une solution simple : allez ouvrir un compte bancaire. Ce n’est pas si difficile, et ce ne sera pas perçu comme quelque chose de honteux non plus. Tentez de gagner autant d’argent que vous le pouvez, discrètement, et rajoutez-le à votre compte, pour les mauvais jours, quand il n’y a plus d’arc-en-ciel. Croyez-moi, être autonome apporte un tout nouveau degré de confiance en soi. Prachi et sa partenaire ont dû s’enfuir six fois, mais sont rentrées à la maison, avant d’être enfin capables de subvenir elles-mêmes à leurs besoins financiers. « Avant notre première fugue, nous n’avions pas d’argent, dit-elle. Mais il vaut mieux être bien préparé avant de commencer une nouvelle vie. » Bollywood a glorifié la fugue comme étant une voie complexe vers la vie d’adulte, mais tout le monde n’est pas chanceux. Si vous êtes étudiant, pensez à réserver votre coming out pour le moment où vous serez financièrement indépendant.

Étape n° 3 : prévoyez un plan de secours

Rajshri habite avec sa compagne à Toronto. Elles se connaissent depuis presque vingt ans, et avant de déménager au Canada, où elles n’avaient pas à cacher leur histoire d’amour, elles ont essayé de vivre ensemble à Bombay, en Inde. Mais l’homophobie bien ancrée en Inde a poussé le couple à trouver un cocon de sécurité à l’étranger. Votre plan B ne doit pas nécessairement être aussi extrême que de traverser le processus d’immigration et recommencer une nouvelle vie dans un autre pays. Mais créez-vous une sorte de carte de route qui indique où vous vous voulez aller dans la vie – que vous soyez accompagné de votre famille ou non. Parfois, changer de ville pour s’éloigner de personnes qu’on aime, mais qui ne peuvent simplement pas accepter notre sexualité, peut s’avérer être une bonne idée. Et d’autres fois, il suffit parfois juste de déménager du foyer familial.

Étape n° 4 : rassemblez votre #FamilledeCoeur

Mes amis sont TOUT pour moi. Je n’exagère même pas. Ils m’ont laissé dormir sur leurs canapés, m’ont préparé des repas, et ont simplement été là pour moi. Rassemblez vos amis les plus proches quand vous décidez de faire votre coming out : vos amis, vos frères et sœurs, vos professeurs, vos collègues, vos patrons… Ceux sur qui vous savez que vous pouvez compter si les choses tournent mal. C’est aussi ce qu’a fait Divya Roop. « Quand je suis parti, ma première pensée a été : Comment vais-je survivre à ça ? J’ai dû quitter mes études secondaires à mi-chemin, donc je n’avais aucune licence, aucun diplôme, aucun ensemble de compétences. J’ai immédiatement contacté mes amis, car ils formaient mon groupe de soutien. Ils m’ont même organisé une pendaison de crémaillère quand je me suis trouvé mon propre pied-à-terre, et ils sont venus avec tout ce dont j’avais besoin pour aménager l’endroit. ». Une « famille de cœur » parle à beaucoup de gens – mais pour les personnes queers sans-abri, elles sont ce qu’il y a de plus important.

homophobia lgbt queer

Divya Roop.

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Étape n° 5 : travaillez jusqu’à l’épuisement s’il le faut

Sortir et trouver des canapés sur lesquels dormir, ce n’est pas le plus dur. Payer pour subvenir à ses propres besoins, va, en revanche, réveiller le génie des mathématiques et de la budgétisation qui sommeille en vous, et dont vous ignoriez l’existence. Les trois amis à qui j’ai parlé dans le cadre de cet article ont bossé d’arrache-pied pour s’assurer qu’ils ont de quoi survivre. Une fois dans la partie, vous vous sentirez aussi moins solitaire. J’ai travaillé en tant qu’acteur, écrivain, podcasteur pour me maintenir à flot. Prachi travaille maintenant en tant que professionnel du marketing, et a pu retomber sur ses pattes grâce au soutien d’un de ses patrons. Rajshri organise des événements à Toronto et vit dans un petit studio sympathique avec sa petite amie. Divya Roop fait du mannequinat. Il lutte toujours pour se faire une place dans l’industrie de la mode mainstream, mais il est en bonne voie. Il brise les normes et les rôles de genres. Cela ne se limite pas simplement aux déménagements des personnes queers, mais bien à quiconque n’ayant pas le système de soutien qu’il ou elle voudrait, à la maison. Souvent, l’argent c’est le pouvoir, et quand vous dépendez de quelqu’un d’autre pour avoir cet argent, vous leur donnez le contrôle de votre vie. Emparez-vous de ce pouvoir !

Étape n° 6 : prenez le temps de vivre !

Au milieu de tout cela, il est nécessaire de profiter des plaisirs simples de la vie. Maintenant, vous queerifiez entièrement votre vie, et personne ne peut vous arrêter. Ces innombrables nuits d’insécurité et d’angoisses porteront leurs fruits. Bon courage !

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