L’origine des paroles d’« Africa » de Toto est aussi absurde que la chanson elle-même

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Culture

L’origine des paroles d’« Africa » de Toto est aussi absurde que la chanson elle-même

Si vous avez déjà eu « Africa » de Toto dans la tête, c’est parce que Dieu le voulait.

Peu de chansons incarnent aussi bien la quintessence des années 1980 qu’Africa de Toto. Avec ses paroles absconses et ses lignes de synthèse FM qui tentent tant bien que mal de reproduire des sonorités world, la pièce est récemment redevenue populaire dans le contexte mémétique d’une génération plus jeune qui en apprécie plus ou moins ironiquement sa mélodie vocale aussi risible que tenace. C’est un ver d’oreille qu’on chante sans complexe à gorge déployée, sans se demander non plus ce qu’on est en train de chanter exactement.

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D’aucuns croient qu’il s’agit d’une simple chanson d’amour sur fond de paysages exotiques. Pour d’autres, c’est peut-être un hommage maladroit à un continent entier. D’autres encore y voient un triangle amoureux entre un homme, une femme et ce même continent.

Le Guardian révélait la semaine dernière que la source d’inspiration de David Paich, l’auteur du chef-d’œuvre en question, était d’autant plus cray qu’on aurait pu l’imaginer. Ce dernier aurait en effet puisé dans ses souvenirs de jeune élève qui entendait parler du travail de missionnaires en Afrique et qui aurait lorgné des paysages subsahariens dans le National Geographic :

« Quand j’étais enfant, j’étais fasciné par l’Afrique. […] J’allais dans une école catholique pour garçons, et de nombreux enseignants avaient fait du travail de missionnaire en Afrique. Ils me racontaient qu’ils bénissaient les villageois, leurs bibles, leurs livres, leurs récoltes, et, lorsqu’il pleuvait, qu’ils bénissaient la pluie. C’est de là qu’est venue la ligne “I bless the rains down in Africa” [Je bénis les pluies d’Afrique]. »

« Ils disaient que la solitude et le célibat étaient les aspects les plus difficiles de la vie là-bas. Certains ne sont jamais devenus prêtres parce qu’ils avaient besoin de compagnie. J’ai donc imaginé l’histoire d’une personne qui s’y rendait en avion pour rencontrer un missionnaire solitaire. C’est une histoire d’amour romancée à propos de l’Afrique basée sur ce que j’en imaginais. Les descriptions de paysages venaient de ce que j’avais lu dans le National Geographic. »

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Comme si ce n’était pas déjà assez riche, Paich va jusqu’à évoquer une legit inspiration divine pour expliquer qu’il aurait pu pondre un tel bijou de ses blanches mains :

« Je venais d’avoir un nouveau clavier. Il faisait un son claironnant qui ressemblait à des cuivres, et dès que j’ai commencé à jouer, le riff d’intro d'Africa est sorti. Puis, j’ai fredonné une mélodie, et une fois rendu au refrain, j’avais déjà les paroles. Je me suis dit : “Attends un peu. J’ai du talent comme auteur-compositeur, mais pas tant que ça!” C’était comme si une force supérieure composait à travers moi, parce que la musique se composait toute seule, comme par magie. »

Si l’idée d’un pouvoir supérieur peut ici laisser croire que notre protagoniste s’exprime au deuxième degré, il semble qu’il ne s’agirait pas d’un euphémisme ironique, comme le démontre un article de 2013 qu’a déterré Boing Boing. Paich y mâche moins ses mots lorsqu’il décrit comment il aurait composé la pièce : « Les balbutiements me sont venus à l’époque où l’on voyait des pubs de l’UNICEF à la télé, qui montraient des familles et des enfants vivant dans la pauvreté. […] Le refrain m’est venu comme par magie, et je me souviens qu’après avoir chanté “Je bénis les pluies d’Afrique”, je me suis arrêté et je me suis dit […] : Dieu m’utilise comme instrument! »

Toujours du côté du Guardian, Steve Lukather, le guitariste du groupe, explique sa réaction aux paroles fantasques de son bandmate :

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« Je trouvais que la chanson avait une mélodie géniale, mais je me souviens d’avoir lu les paroles et d’être comme : “Sérieux, Dave, l’Afrique? On est des gars de North Hollywood. De quoi tu parles? Je bénis les pluies d’Afrique? Es-tu devenu Jésus?” »

Reléguée en dernière place sur IV, Africa est passée près de ne jamais se rendre sur l’album. Les membres du groupe ne s’attendaient certainement pas à ce qu’elle devienne un tel succès, comme le relatait Paich en 2015 :

« On avait terminé l’album, alors quand j’ai écrit cette chanson-là, ils étaient comme : “Dave, pourquoi tu ne gardes pas ça pour un album solo?” On n’avait aucune idée que ça deviendrait un succès, jusqu’à ce que le patron de Columbia Records nous téléphone et nous dise : “Vous savez qu’ils ont commencé à faire jouer Africa? Ça commence à devenir un hit sur les pistes de danse.” J’ai dit : “Tu me niaises? Africa est un hit?” “Ouais, ils la font jouer dans les discothèques à New York.” »

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Quoi qu’on en pense, la prochaine fois que vous aurez ce tube dans la tête, dites-vous qu’il y a peut-être là une part d’intervention divine… ou pas.