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devenir adulte

Comment vivre avec un dépensier ?

Apprendre à gérer son argent n'est pas tout le temps chose aisée.

Photo via Flickr

Cet article fait partie de la série 'COMMENT DEVENIR ADULTE' présentée par So Actif. Rendez-vous sur le site.

Être dépensier et vivre avec un dépensier sont deux choses différentes. D'abord parce que si vous pouvez prendre conscience de votre propre situation, il vous sera beaucoup plus difficile de la faire accepter à l'autre. À quoi pouvez-vous juger que vous vivez avec un dépensier ? Pour moi, ça a été simple. Je vivais avec un mec incapable de passer une journée sans claquer de la tune à tort et à travers, au point que j'ai eu l'impression qu'il était victime d'une pathologie quelconque, une espèce de besoin de consommer compulsif. Le problème qui se posera quand il s'agira de faire remarquer à l'autre qu'il faudrait faire un peu gaffe, c'est que vous passerez pour une ingrate, et pour cause. Comme le besoin de consommer pousse souvent un dépensier à voir plus gros que lui, ses largesses dépassent régulièrement sa personne et profitent le plus souvent à ses amis, puis, le jour venu, à son conjoint. Du coup, évidemment, difficile de dire à quelqu'un qu'il dépense trop de fric quand il vient de vous offrir une paire de Louboutin. C'est OK si vous sortez avec Antoine Arnault. Ça devient tendu quand votre mec intermittent peine un peu à enchaîner les piges.

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J'ai aussi compris en l'observant qu'il existait deux types de dépensiers : le dépensier casual et le dépensier pathologique. Je considère que je fais partie du premier groupe, dans le sens où je dépensais sans trop faire gaffe jusqu'au jour où il a fallu que je m'astreigne à un budget. Ça m'a soûlée de devoir faire attention à ce que j'achetais quand je faisais les courses, mais ça n'a pas été trop dur de m'y tenir. Le dépensier pathologique est un peu plus dur à gérer, parce que quand bien même il prendrait conscience qu'il est en train de creuser sa tombe, il continuerait compulsivement jusqu'à ce que mort s'ensuive. Comment gérer ce genre de truc quand on n'a pas spécialement envie de quitter quelqu'un pour une raison qui semble aussi futile (mais qui au final ne l'est pas du tout) ?

En parler, évidemment, mais j'ai rapidement compris, malgré sa réaction pas du tout hostile, que mon mec ne changerait pas. Je n'avais par ailleurs aucune envie de me prendre pour sa mère en me mettant à fouiner dans ses comptes, d'autant qu'il ne se cachait de rien. J'ai commencé par refuser les invitations à « aller dîner dehors », allant jusqu'à prétexter un mal de crâne de temps en temps. Oui, on se sent très bête dans ces cas-là, mais je n'avais pas d'autres armes. Par ailleurs, j'ai décidé qu'il ne s'occuperait plus des courses, puisqu'il ne pouvait jamais s'empêcher d'acheter ou bien trop de trucs ou bien des trucs vraiment inutiles qui allait de la junk food par kilos à un balai Swiffer. « Parce qu'il est trop classe, regarde, c'est le futur ça », m'a-t-il annoncé hilare. Je m'en souviens encore. On en était arrivés là. L'anecdote illustre bien l'idée qu'un dépensier, quoi qu'il achète, aura toujours une bonne raison de l'acheter, aussi stupide soit-elle, même à ses yeux. Mais au fond, j'ai compris que deux trucs motivaient profondément les dépensiers, quel que soit leur type : la peur de manquer, et le besoin de posséder, de s'approprier des trucs. Il suffit de faire un tour en brocante avec un dépensier pour voir la magie agir. Il voudra s'acheter, à tout va, tout ce qu'il trouve « beau », « chouette », « chanmé » ou « ultime » - la pire des catégories, bien entendu. Comme j'avais pioché le bon numéro, ce mec avait le malheur de collectionner les disques. Collectionner, c'est un grand mot. Il accumulait de manière chaotique tout ce qui possédait une pochette qui l'excitait, « ben c'est cool, c'est pas cher ! », en dépit du fait qu'il creusait inlassablement son découvert, et le mien par la même occasion puisque nous avons rapidement commencé à vivre ensemble.

J'en ai parlé à deux personnes qui me semblaient les plus promptes à me donner des conseils pour gérer ce fléau que je n'arrivais pas à endiguer seule : mon psy, et mon banquier. Le premier ne m'a pas été d'un grand secours, principalement parce qu'il n'en avait rien à foutre et continuait de me demander pourquoi ça m'énervait à ce point. Mon banquier s'est avéré un peu plus pragmatique et m'a présenté toutes les possibilités qui s'offraient à moi – ou plutôt à mon mec – en termes de cartes de crédits particulièrement adaptées à ce genre de cas, plafond de découvert limité, gestion des possibilités de retrait… mais encore une fois, je n'étais pas sa mère. Lui dire quoi faire était déjà assez relou, je n'allais pas intervenir sur la gestion interne de ses finances. Du coup, après avoir décliné ses propositions de sorties inconsidérées j'ai fini par refuser ses cadeaux. C'était ultra vexant pour lui, d'autant que je lui servais une petite remarque de psychologie de comptoir au passage et que mine de rien, il les entendait. J'évoquais pêle-mêle sa mère, son père mort prématurément, son besoin de me posséder, son mal-être qu'il compensait probablement en claquant son fric n'importe comment. Je n'étais pas très fière, mais à mon niveau, c'est la seule manière que j'avais de lui faire comprendre qu'il faisait n'importe quoi. Etre dépensier, c'est une chose, mais le dépensier compulsif dépense en plus sa tune n'importe comment, aveuglément, bêtement. Impossible donc de le raisonner. En gros si vous vivez avec un dépensier, il va falloir prendre votre mal en patience et espérer qu'un accident existentiel lui fasse prendre conscience de sa propre condition. Si vous voulez vous y attaquer vous-même, il faudra avant tout lui faire comprendre que claquer des tunes n'est pas un mal en soi. Mais il y a l'art et la manière, et que si la tune est effectivement faite pour être claquée (le premier argument qu'il vous balancera au visage à priori), pas besoin d'être un génie de l'épargne pour comprendre qu'acheter 20 disques qui finiront à la cave ou dans le caniveau, vu que même eBay n'en voudrait pas, ça ne rime pas à grand chose. Si vous arrivez à le convaincre d'aller voir sa banque pour en parler, vous serez une championne, mais sinon, vous pourrez lui faire miroiter qu'en évitant d'acheter une pizza surgelée alors que le frigo est déjà plein ou quelques disques dont il n'aura que foutre au bout de 15 jours, il ne se retrouverait plus sans le sou le jour où vous décideriez de prendre un peu de vacances. Ça a l'air un peu bourgeois présenté comme ça, mais il n'a pas été insensible à cet argument. Peut-être qu'au fond il se disait que partir ailleurs lui permettrait de découvrir un tout nouveau marché où claquer son pognon. Quoi qu'il en soit, l'année dernière, on s'est barrés au Japon, et croyez le ou non, il a réussi à ne rapporter qu'un sac rempli de trucs divers. Est-ce ma fine approche psychologique qui lui a permis de parcourir tout ce chemin ? Ou bien mes sages conseils financiers, voire, ceux de son banquier ? Malheureusement pour mon ego, et pour vous si vous vous retrouvez dans la même situation pourrie dans laquelle je me suis retrouvée pendant des années, je crois que c'est surtout lui qui a fait le boulot.

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