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LE NUMÉRO BEHREN

Vice Fashion - Behren Kids

On a demandé à presque tous les mômes de Behren s’ils souhaitaient poser pour cette séance photo. La plupart des garçons nous ont regardé comme si on leur avait proposé de tourner un porno gay et la grande majorité des filles en avaient très envie...

PHOTOS: Rip Hopkins STYLE: Marion Chambrette

On a demandé à presque tous les mômes de Behren s’ils souhaitaient poser pour cette séance photo. La plupart des garçons nous ont regardé comme si on leur avait proposé de tourner un porno gay et la grande majorité des filles en avaient très envie, mais n’osaient pas dire oui de peur que leur mec/frère/père ne les engueulent en voyant les photos. Comme le dit Vassili, qui nous a formellement interdit de photographier sa meuf: «Oh, t’es pas à Paris ici, c’est une autre mentalité». Finalement, on a profité de la pause déjeuner familial du samedi midi, quand les rues étaient désertes, pour faire ces photos, cachés derrière des immeubles ou dans la petite galerie marchande qui était fermée. Sweat shirt : Rip Curl ; mini jupe : Etam

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SOFIA, 17 ANS

Vice: Tu as grandi à Behren?

Sofia:

Oui, mon grand-père est venu d’Algérie, il était mineur. Mais la vie a trop changé ici. Avant, nos parents nous laissaient jouer dehors. Depuis les émeutes, ils sont inquiets, ils nous obligent à rester dans le même bloc.

Pourquoi? Qu’est-ce qui pourrait se passer?

Les plus grands, les 22-23 ans, ils ne sont pas méchants mais, je sais pas, des fois, ils passent en voiture, ils lancent des regards, ça fait peur.

Tu vas faire quoi comme travail?

Au début, je pensais aller à l’armée. Mais là, j’ai trouvé quelque chose qui me plaît un peu plus: éducatrice. Je ne compte pas rester ici de toutes façons, je veux aller dans une grande ville, ou dans les Dom-Tom, changer d’air.

Polo : Fred Perry ; sneakers : K-Swiss

ABDEL, 18 ANS

Vice: T’es né à Behren?

Abdel:

Oui.

T’es de quelle origine?

Marocaine. Mes parents sont venus ici pour travailler à la mine. Mon père, il est retraité de la mine, il a 53 ans.

Tu y serais allé à la mine toi?

Oui, j’y serais allé.

Tu vas à l’école?

Non, je fais une formation de chauffagiste, je travaille dans les sanitaires.

Tu vas chercher du travail dans le coin?

Ben oui, j’ai tous mes potes ici, je me vois pas habiter dans une autre ville.

Vêtements perso ; chemise : Pepe Jeans ; ceinture, jeans et chaussures : Dsquared

VASSILI, 21 ANS

Vice: T’es né où?

Vassili:

En Allemagne. Mon père, il est grec, il vit toujours en Allemagne, mes parents sont divorcés. Ma mère, elle est femme de ménage dans un hôpital.

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Qu’est-ce que tu penses de Behren?

Behren, c’est une cité comme une autre, tout le monde se connaît c’est une sorte de grande famille, on a tous grandi ensemble.

Tu fais quoi?

Je suis soudeur. Mais j’aimerais bien bosser dans les fringues, je vais souvent en Allemagne m’acheter de la sape avec ma copine.

Elle est jolie ta copine?

Ouais. C’est une bombe!

On peut la prendre en photo?

Non.

Pourquoi?

Parce que je veux pas.

C’est pas elle qui décide?

Non, c’est moi. T’es pas à Paris ici, c’est pas la même mentalité.

T-shirt : Franklin&Marshall

MARIA, 18 ANS

Maria était très pressée d’en finir avec la photo. Nous n’avons pas eu le temps de lui poser des questions.

Bracelet: Etam

MINA, 18 ANS

Vice: T’es née où?

Mina:

À Forbach. Mes parents sont venus du Maroc. Mon père travaillait à la mine et ma mère est femme au foyer. On est huit frères et sœurs.

Tu fais quoi?

Je suis en terminale STL, je veux être manipulatrice en radiologie, comme deux de mes frères et sœurs.

Ta sœur Zahra est voilée et pas toi, pourquoi?

Je compte bien mettre le voile un jour, mais je ne me sens pas encore prête psychologiquement. Je ne pense pas que ce soit un signe de soumission.

Pourquoi le voile? Pour te protéger des regards?

Non. Parce que je trouve que c’est un très beau symbole et je regrette que les gens aient peur de l’islam.

Collier: Etam

ZAHRA, 26 ANS

Vice: Qu’est-ce que tu fais?

Zahara:

Je suis monitrice-éducatrice, je travaille avec des enfants handicapés, à Metz, parce que malheureusement, il n’y a pas trop de boulot à Behren.

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Qu’est-ce que tu penses de la réputation de Behren?

Je trouve ça très injuste. C’est désagréable d’être stigmatisé. Je pense que les gens devrait venir se faire leur propre idée. Ils verraient que tout se passe plutôt bien ici.

Pull: Fred Perry

JAOUAD, 19 ANS

Vice: Tu es né où?

Jaouad:

À Behren. Mon père travaillait à la mine. Moi je sais pas si j’y serais allé. Mon père ne m’aurait sans doute pas laissé aller galérer au fond.

Tu fais quoi?

J’ai arrêté l’école. Je bosse à la pizzeria depuis six mois, sept jours sur sept, tous les soirs. Dans tout Behren c’est le seul endroit où il se passe quelque chose, les jeunes viennent là pour rigoler.

Tu penses quoi de Behren?

Je sais pas, y’a beaucoup de gens qui disent que c’est chaud, y’en a même qui ne veulent pas venir ici même pour manger. Moi je trouve que c’est normal. J’ai été étonné quand j’ai su que c’était la ville la plus pauvre de France. Peut-être que c’est pauvre en tant que ville mais pas les habitants.

Tu veux faire quoi plus tard?

Je veux ouvrir un salon de coiffure ici. Ça marcherait très bien. Tout le monde veut se faire couper les cheveux avant d’aller en boîte, en Allemagne, le week end.