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L'astronome français bordélique qui est passé à côté de la découverte d'Uranus

Célébrons les 300 ans du saint patron des bordéliques en nous souvenant de sa plus belle erreur.

il y a 300 ans tout juste, Pierre Charles Le Monnier était un astronome « extrêmement désordonné », selon l'historien des sciences CM Linton. Bien qu'il ait été un prodige très précoce, et qu'il ait fait plusieurs découvertes majeures au cours de sa vie, Le Monnier est surtout connu pour avoir été l'auteur de plusieurs bourdes monumentales.

La plus grave d'entre elles n'étonnera pas tous ceux d'entre nous dont le bureau est un bordel sans nom. Alors que la plupart des astronomes de l'époque consignaient scrupuleusement leurs observations dans des journaux de bord, Le Monnier prenait souvent des notes sur des feuilles volantes qu'il laissait se promener librement un peu partout dans son bureau.

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« Si vous prenez des notes sans les organiser, les classer et les ranger avec rigueur, alors vous feriez aussi bien de ne rien écrire, estimait l'astronome de l'époque victorienne Sir Richard Gregory dans un traité de 1893 intitulé Advanced Physiography. En ne rangeant jamais ses notes, Le Monnier est passé à côté de l'immortalité. »

Gregory fait ici référence au fait que Le Monnier avait observé à plusieurs reprises la planète Uranus, avant que William Herschel ne la désigne officiellement comme la septième planète de notre Système solaire en 1781.

Mais même si Le Monnier s'était intéressé à Uranus bien avant Herschel, il se trompait et la classait parmi les étoiles. Cette erreur était due en partie au désordre dans lequel se trouvaient ses notes, mais aussi au fait qu'il avait observé Uranus alors qu'elle était en phase stationnaire, ce qui relève de la pure malchance. Elle aurait sans doute davantage eu l'air d'une planète s'il avait pu observer son orbite, mais cette information cruciale lui a hélas échappé.

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Quand Herschel annonça sa découverte, Le Monnier se retrouva à fouiller parmi des piles entières de notes en désordre, avant de réaliser son erreur.

« Le Monnier relut ses propres registres, et s'aperçut qu'il avait vu Uranus à au moins neuf reprises avant sa découverte officielle, sans réaliser qu'il ne s'agissait pas d'une étoile », raconte Mark Littmann dans Planets Beyond.

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On ne sait pas exactement combien de ses observations il a pu retrouver, mais quoi qu'il en soit, Le Monnier ne publia que quatre d'entre elles car il « avait extrêmement honte », selon Littmann. « Sa réputation en fut sérieusement ternie », ajoute Linton.

Évidemment, Le Monnier n'en fit pas moins de nombreuses découvertes importantes durant sa vie, mais rien qui ait pu lui offrir la reconnaissance qu'il aurait obtenue en découvrant l'une des planètes du Système solaire.

Et en effet, Herschel, lui, devint immédiatement l'un des scientifiques les plus renommés de son époque, en tant que premier homme à avoir découvert une nouvelle planète depuis des milliers d'années. Le roi George III le nomma même Astronome de la Cour l'année suivante, et on lui attribua des sommes conséquentes pour construire des télescopes plus puissants.

En France, la planète fut d'abord connue sous le nom de Herschel avant qu'Uranus ne soit définitivement adopté, ce qui ne fit que remuer le couteau dans la plaie du pauvre Le Monnier.

Selon certains témoignages, Le Monnier était « de nature très irritable », et certaines de ses querelles avec ses patrons sont restées célèbres. On imagine donc à quel point son rendez-vous manqué avec Uranus a pu renforcer son tempérament. Mais même s'il n'a jamais connu la même gloire qu'Herschel, Le Monnier peut au moins être considéré comme le saint patron des bordéliques. Et maintenant, vous pouvez aller ranger un peu votre bureau.