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On jase avec le créateur de We Happy Few, un jeu vidéo dans lequel tout le monde prend de la drogue

Si vous refusez de prendre la drogue, vous remarquez que la civilisation s'écroule autour de vous. Vous devenez un downer.

En 1964, à Wellington Wells, un petit village britannique, tout le monde prend une drogue antidépressive, la « joy ». Une petite pilule qui rend les gens heureux, au point où ils sont en déni de la réalité. Ils veulent oublier un crime monstrueux qu'ils auraient commis collectivement durant la Seconde Guerre mondiale, alors que l'Allemagne nazie occupait l'Angleterre. La nature du crime n'est jamais révélée au joueur.

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Si vous refusez de prendre la drogue, vous remarquez que la civilisation s'écroule autour de vous. Vous devenez un downer. L'ennemi public numéro un.

Avec We Happy Few, un jeu vidéo de survie procédural, le studio indépendant montréalais Compulsions Games réécrit l'histoire et invente un monde dystopique rétrofuturiste. Le jeu est offert dans sa version alpha pour PC et Xbox One.

On en parle avec le directeur créatif et fondateur du studio Compulsions, Guillaume Provost.

VICE : D'où vous est venue l'idée pour We Happy Few?
Guillaume Provost : On venait de terminer notre premier jeu, Contrast. On était une petite équipe de sept personnes. J'ai toujours eu l'ambition de grossir l'équipe pour aller jouer dans l'arène mondiale. Et je voulais créer un jeu dans un monde dystopique. J'étais aussi dans une époque sombre de ma vie. Mon père venait de mourir. Je voulais sortir le méchant.

Quelles sont les inspirations du jeu?
Ce sont surtout des films qui nous ont inspirés - Brazil et L'Orange mécanique. Mais aussi des livres comme Le Meilleur des mondes. On voulait que ça se passe dans les années 1960, en Angleterre. On est allés regarder la cinématographie de l'époque comme The Prisoner ou une série comme Doctor Who. Un des personnages principaux du jeu s'appelle Uncle Jack, une espèce de maniaque qui lave le cerveau de la population, est inspiré du sketch Black Mail de Monty Python. On a consacré six mois à la recherche en début de projet pour créer un univers unique.

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Toutes les photos : Compulsions Games

Et vous avez carrément créé une mythologie…
Oui, on a réécrit l'histoire à partir des années 1940, jusqu'en 1964. On a donc une ligne du temps alternative, mais qui demeure secrète. Cette référence historique est essentielle aux artistes qui créent les environnements du jeu pour mieux habiller les décors.

Allez-vous révéler cette histoire éventuellement?
On verra! Ce n'est pas décidé.

Dans votre jeu, tout le monde prend de la drogue et les médias sont contrôlés et censurés. Est-ce une critique de la société actuelle?
Oui, il y a certains messages qui abordent la psychologie Facebook, par exemple. De toujours montrer le meilleur côté de soi-même. On voulait aussi parler de la dépendance aux antidépresseurs. Ce sont des thèmes qui sont présents dans le cadre narratif du jeu. Par contre, la mission première du studio, c'est de divertir.

Pour l'instant, on a seulement accès à la version « alpha », donc une version inachevée. Le jeu complet dans sa version finale sera disponible d'ici un an. Pourquoi avoir procédé de la sorte?
On voulait partager le développement du jeu avec la communauté. C'est très stressant de montrer du travail inachevé. Mais on a eu beaucoup de succès avec cette démarche. En septembre 2015, on s'est rendu au salon Pax et, pour la première fois, on a donné 200 codes d'accès à des joueurs. On a ensuite fait une campagne Kickstarter et on a amassé 334 754 $. Encore une fois, on a partagé le jeu. Ça nous a permis de travailler avec un groupe de 3000 personnes pendant un an. Et cet été, Microsoft nous a donné cinq minutes sur la plus grosse scène de la conférence E3 pour montrer le jeu. On a donc décidé de continuer dans cette lignée et de continuer à donner des accès, même si la production du jeu n'est pas encore terminée. On développe donc notre jeu avec des centaines de milliers d'utilisateurs. Ça ne s'achète pas!

Est-ce que le fait de lancer une version inachevée est le lot des petits studios comme le vôtre?
C'est essentiel. Surtout pour une nouvelle propriété intellectuelle. C'est très difficile d'obtenir l'attention et la publicité des studios comme Ubisoft. On n'a pas des millions de dollars. On se sert de la communauté comme d'un levier pour faire parler de nous.

Dans We Happy Few, vous réécrivez l'histoire. Tout le monde prend de la drogue… Est-ce que ça aurait été possible de créer ce jeu si vous n'aviez pas l'indépendance d'un studio indie?
C'est la raison pour laquelle j'ai ouvert Compulsions. On a une superbe liberté créative. Personne ne nous dit quoi faire. On est à une taille qui nous permet de faire de gros projets, mais on n'est pas obligés de plaire à tout le monde. On n'est pas guidé par le marché du McGame et on peut prendre des risques créatifs. Mais ce sont des risques calculés.

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