Alors que je m’évertuais à trouver un intérêt quelconque à mes cours de linguistique, la lecture aléatoire par iTunes du chef-d’œuvre de Fingers Inc. qui a donné son nom à cette chronique me rappela l’un des véritables enjeux de notre temps : la quête de la vie extraterrestre. Pris d’un élan volontariste, je décidai de ne plus me complaire dans cette étude ennuyeuse des « prédicats argumentatifs » et de ne plus me contenter de mon statut de spectateur impuissant face au complot mondial fomenté par le Majestic 12. Dépourvu de bagage scientifique comme d’expérience en ufologie, je me suis tourné vers les projets de « science citoyenne ». Et puisque le logiciel SETI@home n’a permis d’obtenir aucun résultat probant malgré ses onze années d’existence, le domaine plus pragmatique et prometteur de la recherche d’exoplanètes s’est imposé.SurPlanethunters.orgon vous demande d’observer les courbes de luminosité d’étoiles et d’y repérer des variations de lumière pouvant indiquer une planète en transit autour d’elles. Si vous souhaitez participer à cette noble entreprise, sachez que la route qui mène à la vérité est longue et fastidieuse. Afin de maintenir son attention des heures durant face à ces graphiques insipides, il est important de se munir d’une playlist évocatrice qui transformera cet exercice comptable en une exploration spatiale trépidante. À priori n’importe quel track de Space Dimension Controller peut convenir. Toutefois si vous vous adonnez à ce genre d’activités durant la nuit, cela signifie, bien souvent, qu’aucune femme ne se trouve à vos côtés, et votre frustration, couplée à la forte connotation sexuelle de ces morceaux d’inspiration cosmic disco, risque de vous distraire de vos objectifs premiers en vous faisant fantasmer des planètes peuplées d’amazones afro-futuristes lubriques. Pour maintenir une froide rationalité scientifique, optez plutôt pour la réédition par Optimo deThe Spaces Between, du mystérieux homonyme du créateur de X-Files : Chris Carter. En dépit de ce que son horrible pochette peut laisser croire, vous n’y trouverez aucune incitation à la masturbation. L’album éponyme de Virgo réédité par Rush Hour fait également office de compagnon idéal pour cette quête (en attendant la sortie imminente deVirgo Four Resurrection). Lorsque plus rien ne semblera pouvoir endiguer l’ennui, écoutez le morceau « La Caccia » sur l’EP du même nom d’Entro Senestre (W.T. Records). Ses synthétiseurs épiques raviveront à coup sûr votre foi dans la science.Toutefois, après cette ultime rasade de voie lactée, votre bonne volonté s’essoufflera inexorablement. Ce sera alors le moment de laisser SETI@home travailler seul, afin de prendre le temps de réfléchir à l’aspect des êtres recherchés. Car la vie extraterrestre n’a probablement rien à voir avec son avatar anthropomorphisé en polymère phosphorescent qui partage un joint avec moi au moment où j’écris ces lignes. Je me souviens d’un documentaire où un exobiologiste décrivait la faune et la flore que l’on pourrait rencontrer sur une planète recouverte d’un océan perpétuellement plongé dans l’obscurité en raison d’une enveloppe gazeuse opaque. Pour atteindre la lumière des plus hautes couches de l’atmosphère, une variété de plantes y prendrait la forme de gigantesques ballons d’hydrogène maintenus par une tige souple de plusieurs kilomètres s’enracinant dans les abysses. Depuis les profondeurs de l’océan, des vers entameraient une lente migration le long de ces câbles organiques afin de se reproduire en plein jour. Puis, au terme de ce voyage de toute une vie, retourneraient pondre dans l’eau en sautant depuis ces ballons à l’aide d’une espèce de parachute. Même avec le concours d’une grande quantité d’amnesia haze, il est difficile de faire jeu égal avec ce genre de théories. Si votre imagination n’est pas des plus fertiles, l’EPLife On Titande John Heckle sorti sur Mathematics vous aidera à visualiser les formes multiples que la vie pourrait prendre au sein des fleuves d’hydrocarbures qui parcourent les canyons de glace du satellite de Saturne. Pour enrichir votre bestiaire, n’hésitez pas à extrapoler les biochimies spéculatives, à vous inspirer des objets qui vous entourent et à vous laisser guider par la réédition du maxiThe Land of Dreamsde G Strings sur Seventh Sign Recordings.Concevoir des êtres faits d’arsenic ou de silicium pouvant aussi bien ressembler à des plantes grasses qu’à de la pâte à pets risque de vous ouvrir à des questionnements existentiels d’ordre métaphysique voire théologique. Pour tenter d’y répondre, munissez-vous cette fois de la première démo de Hieroglyphic Being. Refusée à l’époque (1996) par Relief, Transmat, Planet E et consorts, elle est aujourd’hui disponible chez Further Records. Un taux élevé de THC par litre de sang est recommandé avant écoute, autrement cette K7 pourra vous sembler n’être qu’un amas de déchets sonores. Jamal Moss a probablement été visité par les mêmes êtres célestes que les patients du docteur Sadler, puisque les deux faces deThe Urantia Projectsont aussi absconses que l’ouvrage dont elles s’inspirent. Sururantia.org, Brigitte Mars, herboriste de son état, témoigne : « Enfant, je regardais les étoiles et me demandais : qui suis-je ? Pourquoi suis-je ici ? Y a-t-il d’autres vies là-bas ? Que se passe-t-il quand nous mourons ? J’espérais que peut-être, lorsque je mourrais, je trouverais une réponse à mes questions. La découverte duLivre d’Urantiam’a montré que les réponses étaient déjà là. » À l’instar de l’exothéologie et du néo-évhémérisme, la démo de Moss peut éventuellement élever votre conscience, mais il est plus probable qu’elle vous fasse méchamment ramasser.LA FOUGÈREChris Carter –The Spaces Between(OM CC01, OM∞CC01), Optimo MusicVirgo (Virgo 4) –Virgo(RH-TX1 CD, RH-TX1 LP), Rush Hour RecordingsEntro Senestre –La Caccia(WT-03), W.T. RecordsJohn Heckle –Life On Titan(Mathematics 043), Mathematics RecordingsG Strings –The Land of Dreams(7SR020), Seventh Sign RecordingsHieroglyphic Being –The Urantia Project(Fur030), Further Records.
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