J’ai rencontré le créateur français de Pornostagram

J’ai eu l’occasion, au cours de ma courte vie et surtout lorsque j’ai commencé à découvrir mon nouveau corps d’ado, d’explorer les vraies raisons pour lesquelles Internet existe. J’ai pu profiter du manque de vigilance de mes parents et de la chance d’avoir un ordinateur personnel pour devenir un expert en matière de porno. On pourrait dire, en quelque sorte, que je suis aujourd’hui au porno ce que Bernard Pivot est à la langue française. Je connais mon sujet, j’invite des gens à en parler autour d’une table et j’en fais des dictées.

J’ai vu, au cours de mes pérégrinations webérotiques, des pages web tellement bizarro qu’on se demande si elle sont vraiment légales. Mais, malgré toutes les idées qui ont pu jaillir dans mon cerveau épuisé lors de ces trop nombreux moments intimes passés avec l’industrie du porno amateur, seul et prostré, seulement éclairé par la lumière de mon ordinateur, un œil sur l’écran, l’autre sur la porte de ma chambre, jamais je n’ai eu l’idée géniale de Quentin Lechemia. Ce jeune homme a eu un éclair de génie quand il a décidé d’allier l’un des réseaux sociaux les plus utilisés au monde à l’un des business les plus juteux – après le trafic d’organes et la vente d’armes.

À 23 ans, Quentin a donc décidé de lancer Pornostagram, la version porno de l’application photo qui consiste à coller des filtres pourris sur les clichés que vous prenez dans l’espoir de sublimer vos tranches de vie. Selon les chiffres de la désormais filiale de Facebook, Instagram comptabilisait en janvier 90 millions d’usagers actifs et assure recevoir 40 millions de photos chaque jour. Autant de Pornostagramers potentiels, en somme. Si le site développé par Quentin n’est pas encore lancé, chaque personne qui le souhaite peut réclamer une invitation à tester le réseau en avant-première. Ça vous permettra de découvrir les photos de votre mère en petite tenue sublimées par un filtre sépia avant que des millions de gens en profitent et se les échangent dans le monde invisible.

C'est Quentin, devant l'ordinateur sur lequel il a codé le Instagram des gens à poil.

VICE : Comment ça t’est venu, cette idée de Pornostagram ?
Quentin Lechemia : Eh bien, j’ai beaucoup fréquenté Instagram et, en tant que garçon, pas mal de sites pornos. J’étais aussi tombé sur Boobstagram dont j’avais adoré le principe. Et puis avec mes précédentes copines, on s’envoyait beaucoup de photos de nous, des « sextos » tout ça, et je me suis rendu compte que quand tu fais ça, tu as toujours honte. Je me suis dit que, pour faire disparaitre cette honte, la solution serait peut-être de proposer aux gens l’insertion de filtres, de flous, histoire de se cacher. C’est comme ça que j’ai pensé à Pornostagram – une sorte d’Instagram où tu peux retoucher tes photos, les embellir pour les envoyer sans en être embarrassé.

OK. Tu penses que tu vas devenir riche avec ça ?
Eh bien, j’aimerais ! Ça me permettrait de financer d’autres projets et puis c’est un domaine qui m’intéresse. Je sais que le porno est un secteur où l’on peut gagner beaucoup, mais il y a tellement de sites que l’on peut également ne rien gagner du tout.

Qu’est ce que ton père a pensé quand tu lui as dit que tu développais un Instagram pour pervers ?
Étrangement, il était fier de moi. Il est dans un corps de métier qui l’a amené à parler énormément de sexe au cours de sa vie, et il a donc eu plein d’idées dans ce domaine – mais sans jamais oser se lancer dedans. C’est d’ailleurs lui qui m’a conseillé de ne pas être anonyme et d’assumer Pornostagram.

En ce moment, les féministes tombent sur le coin de la gueule de tout ceux qui pourraient mettre en péril l’image de la femme – tu t’attends à ça ?
Je ne pense pas que le site puisse laisser penser que c’est un truc de macho. La plate-forme est ouverte à tous et les femmes ne sont pas les seules à vouloir se montrer en photo à poil.

C’est vrai. Selon toi, quel est le meilleur filtre pour magnifier un pénis ?
Je pense que le meilleur moyen de savoir est d’essayer soi même. À chaque « membre » son filtre.

C’est quoi cette rumeur selon laquelle le premier site qu’un développeur envisage de créer lorsqu’il apprend à coder, ce serait un site de cul ?
Je ne sais pas, en tout cas ça n’a pas vraiment été le cas pour moi.

Comment ça, « pas vraiment » ?

Eh bien, le premier site que j’ai envisagé de créer s’appelait « La première fois que ». C’était assez mauvais. Il y avait du sexe à l’intérieur mais ce n’était pas seulement un site ou les gens racontaient leurs première fois sexuelles mais toutes leurs premières fois. Après, effectivement beaucoup de développeurs sont attirés par le porno, notamment pour l’aspect financier. Mais comme je le disais tout à l’heure, c’est une idée reçue, parce que beaucoup de sites pornos ne rapportent rien.

Tu penses qu’Instagram – donc Facebook – risque de t’intenter un procès ?
J’espère que non et de toute façon, je ne vois pas pourquoi. Tous les filtres que j’utilise ont été entièrement recodés, c’est même ce qui m’a pris le plus de temps. Après OK il y a le suffixe « stagram » mais là encore, ils n’ont rien inventé.

Est ce que tu penses que Sexbook, le « Facebook du cul » comme il se définit lui-même, va chercher à te racheter dans les prochains mois ?
Ah, ah. Pourquoi pas, mais pas moins d’un milliard de dollars. Mais bon, du moment que les hipsters se foutent à poil, moi ça me va.

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