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Salut, j’ai 30 000 buvards de LSD chez moi

Mark McCloud est collectionneur de drogues psychédéliques.

Mark McCloud possède environ 30 000 buvards de LSD. Il les collectionne, les encadre, les catalogue chez lui à San Francisco, ce qui explique pourquoi il est souvent arrêté par la brigade des stups américaine. La plupart des buvards sont trop vieux aujourd'hui pour avoir un quelconque effet, mais ils constituent toujours une super déco intérieure.

Je lui ai rendu visite et on a discuté de ses hobbies, de l'histoire des drogues hallucinogènes et des multiples revivals psychédéliques survenus au cours des 30 dernières années. Mais la plupart du temps, je me contentais d'hocher la tête pendant que Mark fumait un joint en regardant droit devant lui. À la fin je ne savais plus trop de quoi on parlait, mais ça avait l'air super important.

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VICE : Mark, pourquoi collectionnez-vous les buvards d'acide ?
Mark McCloud : C'est en partie parce qu’enfant, j'avais un intérêt particulier pour les choses bien faites. Là où j'ai grandi, en Argentine, on trouvait des petits livres, et l’un d’eux m'a particulièrement marqué. Il s'appelait Les Armes de la Seconde Guerre Mondiale. On achetait des chewing-gums, et à l'intérieur il y avait plein d'images miniatures à collectionner. On remplissait les petits livres de ces images pour s'amuser.

OK. Quel âge aviez-vous lorsque vous êtes arrivé en Californie ?
J'ai grandi à Buenos Aires. À l’âge de douze ans, on m'a envoyé dans un pensionnat à Claremont. Deux semaines après mon arrivée, Freak Out de Frank Zappa sortait dans les bacs, en 1966. J'étais en quatrième, je lisais Les Portes de la perception et je fumais de l'herbe – jusqu'à ce que la mescaline fasse son apparition.

Quel âge aviez-vous lorsque vous avez découvert les trips ?
J'avais 13 ans. C'était dans un hôtel de Santa Barbara, devant la plage. Un ami et moi avions notre propre cabane, on commandait des timbres de LSD à la Fraternité de l'Amour Éternel – de la came produite par Stanley Owsley ! C'était une belle expérience, même si, bon, j'étais nerveux. J'aimais l'acide pour son côté « éducatif ». Je me sentais comme un aveugle en train de retrouver la vue.

À quel moment avez-vous commencé votre collection ?
Dès l'apparition de la première image sur l’un des timbres. Au début, l'acide c'était juste quelques gouttes sur du papier. En 1968 est apparu le tout premier acide sur le marché. Il a été fabriqué à New York par à un chimiste clandestin, Ghost – paix à son âme. Ça s'appelait les « cinq par vingt ». Cinq gouttes étaient déposées sur une petite carte de 20 timbres. La plaque avait la taille d'une plaque d'autochrome. Les timbres étaient vendus dans un emballage Kodak.

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Quand les premiers buvards illustrés sont-ils apparus ?
Dans les années 1970. Plein de vignettes et d'images sont apparues à cette époque, la plupart du temps sur des feuilles de papier de la taille d'une pochette de 33 tours. C’était un moyen de les camoufler. Les premières feuilles ne présentaient qu’une seule image – d’une couleur seulement – divisée en plusieurs buvards. Elles ont rapidement été remplacées par des images individuelles bien plus détaillées.

L'une des premières feuilles illustrées

Comment avez-vous eu l'idée de les encadrer ?
Il s’agit d’une autre question, qui concerne ma renaissance. J'étais un jeune de 17 ans très difficile. Hendrix venait tout juste de mourir, j’étais dévasté.

Je me suis laissé vibrer au-delà de ce monde, dans quelque chose de différent, et c'est à ce moment que j'ai commencé ma collection pour de bon. Au début je conservais les buvards au congélateur, mais c'était problématique : je passais mon temps à les manger. Puis l'acide d'Albert Hofmann a été mis sur le marché et je me suis dit : « Merde, il faut que j'encadre ça. » Et puis comme ça, je ne risquais pas de les consommer.

Comment un mec avec un congélateur rempli d'acide a-t-il pu devenir historien du LSD ?
J'étais membre de l'Institut des Arts de San Francisco, et pour célébrer le 20ème anniversaire du Summer of Love, j'ai proposé de monter une exposition sur les acides à San Francisco. On a monté une grande exposition d'art où était présentée toute ma collection. En 1987, l'atmosphère était assez détendue pour qu'on puisse faire, après l'expo, une énorme fête en prenant de l'acide.

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Avec tout ce stock de came, comment faites-vous pour ne pas vous faire arrêter ?
J'ai été arrêté plusieurs fois, toujours pour la même chose : tentative de fabrication et de distribution de stupéfiants. En l'an 2000, la brigade de lutte contre les stupéfiants a arrêté un groupe de jeunes dans un lycée du Kansas, au Missouri. Ils ont enquêté auprès de distributeurs de La Nouvelle-Orléans et d'une façon ou d'une autre, il y a eu des fuites qui les ont menées à moi. Ils ont voulu me faire enfermer à vie, mais ils n'ont pas pu parce que les buvards étaient trop vieux et inutilisables. Finalement j'ai été relâché ; ils ont dû me rendre toutes les preuves, constituées de deux dossiers de photocopies de la collection. Qu'ils aillent se faire voir. Il faut bien que quelqu'un leur dise qu'ils vont trop loin, ces enfoirés.

La brigade anti-stupéfiants a catalogué la collection de Mark.

Mais j'imagine que vous connaissez les chimistes, non ?
C'est une question difficile ; l'admettre, c'est prendre un gros risque. Disons que, grâce au goût, je peux parfois deviner qui est le fabricant. Certains mecs que j'affectionne particulièrement sont néerlandais. Au Pays-Bas, ils font des excellents acides.

Combien de trips avez-vous eu au cours de votre vie ?
 J'ai seulement vécu une moitié de trip. Un trip complet, c'est quand on est en train de jouer de la harpe au paradis et qu'on se sent heureux. Le trip absolu, c'est ça.

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Les gens devraient-ils prendre de l'acide ?
Non, parce qu'il faut se poser les bonnes questions avant tout. Est-ce qu'ils veulent vraiment rencontrer Dieu ?

Et s'ils le voulaient vraiment, même s'ils présentent une maladie mentale ?
Il y a une corrélation entre l'acide et le traitement des maladies mentales. J'ai réalisé, après ma superbe renaissance accidentelle, que ce que l'on appelle la psychologie n'est en réalité que de l'art.

Vous utilisez des métaphores complexes.
Non, je dis juste la vérité.

Que diriez-vous à quelqu'un qui est réticent à l'idée de prendre de l'acide ?
Je dirais qu'il n'y a pas besoin de se prendre la tête : il ne faut rien prendre si l'on ne se sent pas prêt. Le libre arbitre, c'est très important. Si tu veux faire preuve d'un peu de bon sens, entoure-toi des gens et des choses que tu préfères. Et attends-toi à un miracle.

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