Une histoire de tondeuses
Images via Paul Hermes

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Une histoire de tondeuses

Le photographe Paul Hermes a passé une bonne partie de sa vie à errer en voiture à la recherche de gens qui tondaient leur gazon.

Paul He​rmes est un photographe originaire de Melbourne qui a passé une bonne partie de sa vie à errer en voiture à la recherche de gens qui tondaient leur gazon. Ce qui a débuté comme une idée bancale s'est rapidement transformé en un projet intéressant sur la banlieue australienne. À travers son objectif, Paul transforme une scène banale de la vie en une éloge à la conformité – je suppose que là est le but de son projet ​Mowing the Dre​am. Je l'ai appelé pour en savoir plus.

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VICE : Pourquoi avoir pris en photo des gens qui tondaient leur gazon ?
Paul Hermes : J'ai grandi en banlieue et, jusqu'à ce que j'aille vivre en ville, je n'avais jamais vraiment fait attention à la routine qu'on y trouve. La corvée typique du week end – tondre sa pelouse – m'a alors semblé à la fois extrêmement étrangère et intéressante. Je voulais comprendre les motivations qui se cachaient derrière cette pratique. L'idée m'est venue il y a quelques années, alors que je me baladais dans un lotissement. J'y ai vu un type, en plein dans un nuage de fumée provenant de sa machine, alors qu'il tondait son bout de jardin. Il avait l'air vide et abattu, comme s'il était soumis à une force extérieure.

N'est-ce pas une vision assez maussade de l'homme ?
Sur certaines photos, les gens semblent presque être les esclaves de leur maison, comme si la tondeuse était un boulet attaché à leur pied. C'est drôle de voir tout le mal qu'ils peuvent se donner pour vivre dans un cadre idyllique. Ils travaillent 60 heures par semaine et, ensuite, ils tondent. Le rêve australien n'existe pas ; pourtant, les gens meurent d'envie d'acheter leur maison et courent après l'idéal. Au final, souvent, ils se retrouvent en plein cauchemar.

Qu'est-ce que cela signifie sur nous ?
Cela montre que l'humain est un être fier et courageux. Bien que nous détestions les corvées, nous les faisons quand même. Un homme auquel j'ai parlé considérait même ça comme un hobby. Sa tondeuse est un bien précieux qu'il possède depuis 14 ans. Il parlait de son entretien avec passion et tendresse. Néanmoins, il suffit de faire quelques pas pour qu'un autre type lève les yeux au ciel en s'écriant « Il faut bien faire plaisir à la patronne ».

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Avez-vous parfois été surpris pendant la réalisation de ce projet ?
J'ai été surpris par l'odeur de l'herbe fraichement coupée. C'est vraiment fort. Quand je trouvais quelqu'un en train de tondre, parfois un autre faisait la même chose quelques rues plus loin – comme si l'odeur les inspirait ou les poussait à tondre leur propre gazon. En fait, ça m'a aidé à trouver mes sujets : je passais dans les rues avec les fenêtres de ma voiture ouvertes et il me suffisait de faire attention à l'odeur pour savoir où prendre la photo suivante.

Comment avez-vous commencé la photo ?
J'ai commencé avec des objets définis, comme par exemple des anciens taxis toujours en ci​rculation, des hou​sses de voiture et des sapins de Noël jet​és aux ordures. J'ai trouvé très intéressant le fait que, une fois que tu remarques quelque chose et que tu te concentres dessus, tu commences à voir cet objet partout. Pour moi, la photo est maintenant un moyen avec lequel j'essaie de comprendre un peu mieux ce qu'il se passe autour.

C'est comme ça qu'a commencé Mowing the Dream ?
Oui. Une fois que quelque chose s'empare de mon attention, ça reste bloqué dans mon cerveau, un peu comme un bon film. Si cette pensée persiste, je me demande ce que je pourrais en faire. Puis, alors que je me retrouve avec plein d'idées, je fais quelques essais pour décider si je veux ou non réaliser ce projet. Le projet initial peut parfois changer ou évoluer une fois que je l'ai commencé mais, la plupart du temps, il se cristallise et je prends des photos jusqu'à être satisfait du résultat. Et je suis content de cette série.

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