FYI.

This story is over 5 years old.

Sexe

J’aime pas les Internets, mais je bosse pour eux

Dans cette colonne, Ryan O'Connell traite de tous les problèmes rencontrés lorsqu'on crée l'Internet chaque jour de sa vie.

Salut, je m’appelle Ryan O’Connell et je travaille pour les Internets — pour Thought Catalog plus précisément. Si vous connaissez Thought Catalog, il y a de grandes chances que vous détestiez ça mais c’est pas grave : on a tous besoin de détester quelque chose. D’ailleurs, vous me détestez peut-être déjà et ce n’est pas grave, si ça peut vous faire du bien. Alors ? Ça fait du bien ? Allez, faites un effort. Soulagez-vous.

Publicité

Bref, je ne suis pas là pour parler texto, jeunesse ou gueule de bois ni même des texto qu’on envoie quand on est jeune et qu’on a la gueule de bois. Alors posez votre AZERTY-47 immédiatement. Si je suis là c’est pour vous parler de mon job de rédacteur web et de tous les trucs bizarres que ça engendre — comme la dégradation de ma vision du monde. On devient blasé, on anticipe la réaction des gens, puis on ne réagit même plus quand on entend parler d’un gang de violeurs ou de jeunes gays qui se font tabasser. Moi, je me contente de dire : « Oh c’est hyper triste. Au fait t’as vu cette nouvelle vidéo de chats ? »

Je déteste ça, ça m’angoisse. La culture Internet est parfois si crade et haineuse que souvent, je ressens le besoin de prendre un long bain et de me frotter jusqu’au sang après avoir passé une journée entière à écumer le web. Ras le bol des commentaires ! Ras le bol des ragots sur Kim Kardashian ! Ras le bol des articles de réflexion sur Girls ! Fichez-moi la paix !

Mais je ne peux jamais vraiment me débarrasser de toute la crasse Internet car je suis moi même une petit pute des réseaux. Internet paie mes factures. Internet me nourrit. Je le déteste mais il est le seul à prendre soin de moi. Et que je le veuille ou non, ça me donne un certain sens des responsabilités.

Ce que je déteste le plus dans le fait d’être un blogueur et de travailler pour Internet, ce sont les politiques sociales qui en découlent. Les gens se disputent pour des trucs futiles. Comme quand un type n’indique pas ses sources, ou qu’il ne vous suit pas sur Twitter alors que vous le suivez depuis longtemps — et que vous savez qu’il essaie de cultiver un sentiment de supériorité à votre égard. Internet engendre beaucoup trop de ressentiments, et pour des raisons débiles. Un site peut se sentir dépossédé et s’énerver contre un autre site qui lui aura volé ses clients, ou pire : un blog à la mode s’est moqué de quelqu’un que vous avez déjà croisé en soirée ! C’est un truc de bloggeur d’utiliser son pouvoir pour enfoncer quelqu’un — et de se cacher derrière un semi anonymat.

Publicité

Je déteste aussi les soirées de bloggeurs. Elles ne sont qu’un rassemblement d’individus à lunettes qui se branlent les uns les autres quelque part sur le toit d’un gratte-ciel en comparant leurs scores Klout. Lors de ma dernière soirée bloggeurs, j’ai entendu une fille se plaindre de Marie Calloway, qu’elle considère comme nuisible au féministe sous prétexte qu’elle ne parle que de cul alors qu’une femme « a tellement d’autres choses à dire. » Et puis elle a enchainé en se plaignant de Tina Fey, qu’elle considère elle aussi comme nuisible au féminisme sous prétexte qu’elle dénigre les femmes trop extraverties. Mon ami lui a demandé : « Si Marie Calloway a tort de ne parler que de sexe, et que Tina Fey a tort parce qu’elle n’en parle pas, comment devraient être les femmes ? » La jeune fille s’est arrêtée un temps avant d’admettre que c’était une bonne question et qu’elle n’avait pas vraiment de réponse à ça.

Elle a ensuite confié qu’elle était vierge et qu’elle n’aimait pas Girlsparce que cette série donnait une vision cruelle et dégradante des vierges de plus de 20 ans.

Oh.

Mon.

Dieu.

Conseil : Fais-toi troncher et ensuite on reparlera de Marie Calloway, Tina Fey et de Girls.

J’étais au Métropolitan, un bar de Williamsburg où des hipsters passent le plus clair de leur soirée à se boycotter les uns les autres jusqu’à ce qu’ils deviennent totalement bourrés vers les coups de 3 heures du matin — et cette semaine, l’ouragan Sandy avait ravagé la ville. L’ambiance était tendue à Williamsburg, sûrement parce que la plupart des maisons sont restées intactes et que tout le monde a eu droit à une semaine de congé. Pour quoi ? pour se remettre du fait d’avoir été épargné ? Pour manger ? pour Boire ?

Publicité

Pour Boire, bien sûr.

J’étais avec deux gays qui n’étaient pas du coin : un ex et un pote. On voulait vraiment baiser, on était seuls et ça faisait bien quatre verres qu’on attendait que quelqu’un vienne nous embrasser. La situation semblait désespérée. Il était tard et personne ne semblait vouloir établir le dialogue avec qui que ce soit. Et puis d’un coup, les mecs mignons ont commencé à former des groupes de deux, laissant les poivrots de 60 balais, seuls au bar.

Et puis enfin, un mec m’a parlé.

« Je te connais, t’es sur internet, » a t-il murmuré.

Avant même d’avoir le temps de lui répondre : « Ha ouais, et toi aussi, parce que c’est comme ça que fonctionne la société maintenant, » il était parti.

Quelques minutes plus tard, il s’est remis à me tourner autour ; ça a commencé à m’irriter. Que me veut ce putain de pot de colle ? Je me posais cette question en vidant mon verre de vin blanc. Oui, je suis du genre à commander du vin blanc dans un pub. Je sais que ça craint, mais j’y travaille, OK ?

Il est revenu vers moi et m’a dit : « C’est bizarre parce que t’as écrit un article sur Thought Catalog dans lequel tu disais vouloir plus de pote gays, mais il semblerait que t’es pas trop mal accompagné. »

Il parlait évidemment de mon entourage, de ce Californien avec qui j’étais, et de mon ex avec qui j’essayais de forger une amitié. Je ne savais pas comment répondre à ça ; c’était vraiment bizarre. Est-ce que je devais lui répondre que je n’avais PAS de potes gays et que cette soirée était une exception ? Non. Bien sûr que non. Pourquoi aurais-je eu à me justifier auprès d’un inconnu ? Pourquoi aurais-je dû lui prouver que je n’avais pas bluffé pour avoir de quoi écrire un article ?

Publicité

J’étais bourré et défoncé. Ma capacité à gérer la situation frôlait le néant. Je lui ai dit : « Ouais, ce sont mes potes. Et ouais, je sors avec eux. Où est le problème ? »

Il s’est senti bête et s’est excusé.

« C’est rien. Bref. »

Et puis il a commencé à renchérir en m’insultant — je ne me souviens pas de ses mots — et à prendre un air beaucoup trop supérieur.

« Pourquoi t’es là si tu veux pas qu’on te reconnaisse ? Pourquoi ? »

« Et toi pourquoi t’essaie de m’intimider ? »

« T’écris sur Internet. Tu devrais t’attendre à ce genre de choses, » a t-il gueulé.

Je ne sais pas ce qu’il entendait par « ce genre de choses ». Sûrement « être un bloggeur et donc être la risée d’illustres inconnus bourrés arborant une veste de sport » Ok.

Bizarrement, à chaque fois qu’il me lançait une pique, il se rattrapait dans la seconde et partait dans un délire, genre : « Non mais, je t’apprécie beaucoup, ne te fâche pas. » C’était très bizarre. J’avais l’impression d’avoir 5 ans et de me faire taquiner par mon amoureuse dans une ère de jeu. J’aurais pu m’imaginer lui rouler des pelles mais il me faisait penser au Cannibale de Milwaukee.

Ce jeu du chat et de la souris a duré pas mal de temps. Il alternait les reproches et les compliments. Quand il me disait un truc méchant, je lui disais de me laisser tranquille, et lui surenchérissait en me disant qu’il me trouvait mignon, puis que ce que j’écrivais était un tissu de merde qui ne méritait pas d’être publié. La conversation tournait au cauchemar mais j’y ai finalement mis fin.

Publicité

Ce soir-là, je ne me suis pas fait baiser, mais mon cerveau oui.

Si je vous dis tout ça ce n’est pas pour faire un procès à Internet, parce que beurk et LOL. C’est juste que, j’aimerais qu’Internet arrête d’avoir l’air de quelqu’un de super chiant, et j’aimerais également que les personnes qui se chargent de l’alimenter arrêtent de se comporter comme de méchants monstres. C’est beaucoup trop demander ? Je veux une écriture sincère et authentique — pas sale comme elle peut déjà l’être. J’espère qu’avoir lu ces lignes ne vous donnera pas envie de prendre un bain et de vous défaire de toute une couche de crasse virtuelle. Mais je suis réaliste, et je sais que c’est beaucoup demander.

@ryanoconn

Plus d’Internet :

ON A INTERVIEWÉ LE MEC LE PLUS DÉTESTÉ D’INTERNET Et il a des raisons de l’être. C’est vraiment un gros enfoiré. 

LA CYBER-GUERRE DE LA BANDE DE GAZA Anonymous et Telecomix aident les Gazaouis à résister. 

SUR INTERNET, DES CREVURES POUSSENT LES FILLES AU SUICIDE Quand ils en ont fini avec le chantage et l’exploitation sexuelle