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Des enfoirés de bouddhistes terrorisent les musulmans du Sri Lanka

Les musulmans sont victimes de persécutions au Sri Lanka. Des rapports récents font état de gangs de bouddhistes qui font régner la terreur dans les rues, administrent des raclées sanglantes aux musulmans qu'ils croisent et saccagent leurs lieux de...

Les musulmans sont victimes de persécutions au Sri Lanka. Des rapports récents font état de gangs de bouddhistes qui font régner la terreur dans les rues, administrent des raclées sanglantes aux musulmans qu'ils croisent et saccagent leurs lieux de travail et de culte. Des morceaux de porc cru ont été jetés dans des mosquées, le logo Halal a été interdit et Azad Sally, un analyste politique musulman de premier plan, très critique à l’égard du gouvernement, a été arrêté. Des troupes d'élite du gouvernement ont été déployées afin de maintenir l'ordre après qu'un gang de bouddhistes a blessé quatre personnes dans l'attaque d'une mosquée de Colombo, la capitale du Sri Lanka. La mosquée a dû fermer et un couvre-feu a été décrété.

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Moulavi Fazil Farooq, du groupe politique islamique All Ceylon Jamiyyathul Ulama, m'a dit que « la liberté religieuse et la liberté d'expression des musulmans » étaient menacées au Sri Lanka. Il m'a aussi renvoyé vers un des groupes bouddhistes accusés d'avoir perpétré les attaques : Bodu Bala Sena, qui signifie à peu près « les forces du pouvoir bouddhiste ». Leur objectif déclaré est de « protéger » la culture bouddhiste au Sri Lanka qui serait sous la menace de groupes musulmans et chrétiens. Pour replacer les choses dans leur contexte, la population du Sri Lanka se compose de 70 % de bouddhistes, de moins de 10 % de musulmans et d’encore moins de chrétiens.

Comme on pouvait s'y attendre, Dilanthe Withinage, le président de Bodu Bala Sena, nie toute implication de son organisation dans la vague de violence qui frappe les musulmans. Il a affirmé que la gravité de la situation a été exagérée : « La nuit dernière, j'étais à l'extérieur de Colombo et presque 80 % des gens, là-bas, étaient musulmans, m'a-t-il dit au téléphone. Ils mangeaient, ils jouaient, donc je ne crois pas que le problème soit si important. »

Voilà. Tant que les musulmans peuvent chiller et se nourrir en toute impunité au Sri Lanka, ils ne devraient pas faire tout un foin pour quelques bouts de cochon et deux ou trois coups de poing dans la gueule.

Dilante Withinage (à gauche), l'un des grands manitous de Bodu Bala Sena.

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En ce qui concerne l'interdiction du logo Halal, un obstacle évident à la liberté religieuse des musulmans dans le pays, Withinage considère que la nourriture halal est « un droit pour les musulmans » mais il a également souligné que « le halal est utilisé par des organisations musulmanes pour promouvoir l'Islam ; pour promouvoir le fondamentalisme islamique ».

« Les médias peuvent bien faire tout un foin autour de ces cas de violence, il y a effectivement eu quelques incidents, mais je ne crois pas qu'il existe un gros conflit entre les communautés musulmane et bouddhiste au Sri Lanka. »

Je suppose qu'il est aisé de dédramatiser la persécution religieuse quand on n'est pas du côté de ceux qui prennent les coups. Au cours de mes recherches afin d'écrire cet article, j'ai reçu une liste de 130 incidents islamophobes recensés. Les faits vont de la tentative d'enlèvement sur un homme d'affaires musulman au défilé de têtes de cochons devant des logements de musulmans, et on peut aussi noter des appels à la violence émanant directement de Bodu Bala Sena.

L'homme qui m'a envoyé ces informations, c'est Jehan Perera, le directeur du Conseil national pour la paix au Sri Lanka, une ONG qui veut mettre un terme aux divisions entre les communautés du Sri Lanka et défendre les droits de chacun.

Son point de vue sur les tensions qui opposent les bouddhistes et les musulmans au Sri Lanka était très différent de celui de Withinage : « Les musulmans ont peur parce qu'ils pensent qu'ils pourraient être la prochaine cible des bouddhistes. Ils ont tous très peur. Ils pensent qu'à n'importe quel moment, la situation pourrait échapper à tout contrôle, et ils ont raison. »

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Il faut noter que la violence ne va pas uniquement dans un sens. Jehan Perera m'a raconté que lors de l'attaque d'une mosquée en particulier, « les musulmans ont contre-attaqué dans ce quartier… et ils étaient vraiment nombreux ».

Qu'est-ce qui cause toute cette violence ? Au-delà du fait que ces actes agressifs semblent aller à l'encontre des idéaux bouddhistes, qu’est-ce qui pourrait expliquer cette nouvelle vague de tensions dans le pays ?

D’aucuns affirment que cela pourrait être la conséquence d'une frustration économique et que les musulmans prospères tiendraient lieu de parfaits boucs émissaires pour les aspirations frustrées de ceux qui pensent être moins riches qu'ils ne le mériteraient.

Perera, en revanche, souligne le fort sentiment nationaliste qui règne chez une population majoritairement cinghalaise depuis que les Tigres tamouls ont été vaincus lors d'une guerre civile sanglante qui a pris fin en 2003 et fait plus de 100 000 morts : « La dernière attaque contre une mosquée musulmane à Colombo est un signe supplémentaire montrant que le regain de nationalisme bouddhiste continue de gagner du terrain, et qu'il ne faiblit pas avec le temps. » Il m'a ensuite expliqué : « Dans l'esprit des bouddhistes, le Sri Lanka est un pays bouddhiste, et pour gagner la guerre, le gouvernement a fortement sollicité ce sentiment nationaliste. Il l'a exploité dans son propre intérêt. »

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C'est peut-être pour ça que la police n'a pas l'air de se soucier outre mesure de l'augmentation de la violence. « D'une certaine façon, l'existence de tensions religieuses entre bouddhistes et musulmans sert le gouvernement », m'a confié Perera.

La véritable inquiétude, c'est que les événements qui secouent le Sri Lanka ne dérivent vers ce qui se passe en Birmanie, où des musulmans rohingyas et des bouddhistes ont été tués. Là-bas, la violence est allée jusqu'à l'utilisation d'explosifs, et toute la communauté musulmane est contrainte de quitter le pays. Certains musulmans fuient en bateau, préférant tenter leur chance en mer. Justin Wintle, auteur et historien, déclare que « les fondamentalistes islamiques sympathisants d'al-Qaida commencent à s'intéresser » à ce qui se passe dans la région, et ça n'est pas vraiment du goût du Gouvernement ou des bouddhistes du Myanmar.

Meenakshi Ganguly, de l'ONG Human Rights Watch, m'a dit qu’« en Birmanie, même la citoyenneté des Rohingyas est remise en question. Ils sont considérés comme des étrangers. »

Des graffitis islamophobes sur les murs d'une mosquée, plus tôt cette année.

Étant donné que les musulmans sont plus nombreux au Sri Lanka qu'en Birmanie, il semble plus difficile de remettre en question leur citoyenneté. Pourtant, la situation demeure inquiétante alors que la propagande contre les musulmans fait de plus en plus d'émules au Sri Lanka. D'après des documents que Jehan Perera m’a envoyés, certains appellent les musulmans à déserter certaines régions du pays.

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Ganguly a poursuivi : « Le Sri Lanka a souffert des décennies de violence qui ont fait un très grand nombre de victimes. »

Ce serait une tragédie si les musulmans du Sri Lanka, l'une des populations les plus maltraitées de l'un des pays les plus violents de la fin du XIXe siècle, devaient à nouveau plonger dans la violence extrême dont ils viennent de sortir. Si le gouvernement du Sri Lanka ne prend pas de mesures plus efficaces contre ces conflits sectaires, on pourrait voir le pays remonter le temps et retrouver l'époque qui a précédé ces dernières années de paix et de relative stabilité.

Toutes les photos ont été postées avec l'aimable autorisation du Colombo Telegraph

Suivez Joseph sur Twitter : @josephfcox

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