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Drogue

Le Canada pourrait légaliser les puissants concentrés de cannabis

Le groupe de travail chargé par le gouvernement canadien d'étudier la légalisation du cannabis dans le pays préconise la légalisation de ces dérivés pour mieux les contrôler au sein du marché légal.
Anthony Tuccitto/VICE News

Le Canada va probablement légaliser le cannabis sous ses formes les plus puissantes. On pourrait donc retrouver tous les dérivés du cannabis sur le marché légal de la drogue — et ce, peu importe le taux de THC de ces dérivés. C'est ce que préconise un rapport publié ce mardi par le groupe de travail chargé par le gouvernement canadien d'étudier la légalisation du cannabis dans le pays.

Si le gouvernement suit ces recommandations, il autorisera notamment la mise en vente légale du « shatter [Ndlr, ce qui signifie fracas] », un dérivé du cannabis très chargé en THC.

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Le Canada pourrait devenir le premier pays développé à légaliser les concentrés de cannabis sur l'ensemble de son territoire, et à but récréatif. Ces concentrés présentent des taux de THC qui peuvent atteindre les 90 pour cent.

Ils sont actuellement vendus sur le marché noir et sont devenus populaires auprès des utilisateurs qui en prennent pour des raisons médicales ou pour se droguer. La fabrication de ces concentrés est particulièrement dangereuse parce qu'elle implique l'utilisation de produits chimiques explosifs.

« Si les études montrent qu'un usager typique n'a pas besoin de grandes quantités de THC pour expérimenter les effets psychoactifs du cannabis, la demande et la disponibilité des produits avec un fort dosage de THC persiste », explique le rapport de 112 pages. « Ces concentrés très puissants sont souvent ingérés après avoir chauffé une petite quantité sur une surface chaude — une technique connue sous le nom de "dabber". » C'est probablement la première fois qu'un document gouvernemental se fait l'écho de cette expression.

En août, le ministère canadien de la Santé a amendé les règles concernant l'utilisation du cannabis médical pour permettre aux patients de produire leurs propres produits extraits du cannabis, comme l'huile. Mais les produits inflammables utilisés pour fabriquer des concentrés sont encore interdits dans le pays.

Le groupe de travail à l'origine de ce rapport recommande que le gouvernement établisse une « quantité maximale de THC par portion et par produit » dans le cas de produits dérivés comestibles comme les brownies et les cookies chargés en cannabis. En revanche, Ottawa ne devrait pas imposer de tels plafonds sur les concentrés. « Toute limite serait arbitraire et compliquée à appliquer », indique le rapport. Dans les États de Washington et du Colorado, où le cannabis est légal, une démarche semblable a été appliquée. En revanche, dans le Colorado, les producteurs privés ne sont plus autorisés à produire de l'huile de cannabis à cause des nombreuses explosions fatales causées par ce processus.

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En revanche, le rapport suggère que la taxe sur les concentrés soit plus élevée pour décourager leur utilisation. « S'il est dangereux de consommer des concentrés, leur fabrication l'est tout autant — d'où la nécessité de les inclure dans l'industrie régulée. »

Ian Dawkins, directeur exécutif des Cultivateurs de cannabis du Canada, nous a dit en avril que les producteurs de concentrés vont avoir du mal à rentrer dans le cadre légal.

« Les concentrés sont le segment de l'industrie qui croît le plus actuellement, alors c'est un moment excitant pour les extracteurs, même s'ils opèrent dans l'ombre », a dit Dawkins dont le groupe représente quelques entreprises qui opèrent illicitement, dont dix producteurs de concentrés. « Mais ce sont des mecs très indépendants, qui sont dans une vibe de "scientifiques fous". »

Il est impossible de savoir combien de personnes et d'entreprises produisent ce genre de dérivés, mais on peut les trouver facilement dans les centaines de dispensaires illicites de cannabis qui ont vu le jour partout dans le pays au cours de l'année dernière. Certains disent que les concentrés pourraient représenter plus de 50 pour cent de toutes les ventes, selon Dawkins.

Le groupe de travail évoque également les préoccupations des autorités sanitaires, mais écarte toute conclusion définitive due à un manque de preuves. Selon les autorités sanitaires, des produits comme le « shatter » sont dangereux pour le cerveau des jeunes et peuvent mener à la schizophrénie. À cause de cela, ils devraient rester interdits. Au cours de l'année 2015, le ministère de la Santé canadien a fait savoir à plusieurs reprises ses inquiétudes quant aux produits à haute teneur en THC.

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Rebecca Jessemen, analyste au Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, nous a confié que son centre salue les recommandations du rapport sur les concentrés, bien qu'il reste farouchement opposé à l'utilisation des dérivés puissants du cannabis.

« On sait qu'il y a des risques d'effets nocifs aigus… Nous n'avons pas beaucoup d'études sur l'impact à long terme, mais il y a de quoi s'inquiéter, »a-t-elle dit. «Une fois que les dérivés seront vendus sur le marché légal, on espère mener plus de tests afin de regrouper des données et surveiller les effets nocifs des concentrés sur la société. Ensuite, nous pourrons réfléchir à la manière dont réguler ces produits — notamment instaurer de contrôles plus stricts. »

Le rapport a été salué pour ses positions permissives sur le cannabis et précède la présentation du plan gouvernemental concernant la légalisation du cannabis — prévue pour le printemps prochain. Reste à savoir si Justin Trudeau va prendre en compte ce rapport ou certaines de ses recommandations.

Actuellement, le ministère de la Santé n'autorise que ceux ayant des prescriptions médicales à consommer du cannabis dans ses formes séchées, fraîches ou huileuses. Celles-ci peuvent également être utilisées dans des produits comestibles. Les patients peuvent également avoir une autorisation pour faire pousser des plantes en petite quantité ou ils peuvent acheter du cannabis séché ou en huile auprès d'une des 36 entreprises autorisées par le gouvernement fédéral à en produire et à en vendre.


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