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LE NUMÉRO TROMPE-LA-MORT

Video games killed the radio star

J’ai jamais été un sportif, j’ai jamais aimé le sport, cette activité vaine qui revient juste à faire un concours de bites sous le prétexte fallacieux du dépassement de soi. Traitez-moi d’existentialiste, mais j’y ai jamais vu de sens.

PUNCH OUT
Éditeur : Nintendo
Plate-forme : Wii J’ai jamais été un sportif, j’ai jamais aimé le sport, cette activité vaine qui revient juste à faire un concours de bites sous le prétexte fallacieux du dépassement de soi. Traitez-moi d’existentialiste, mais j’y ai jamais vu de sens. À ce propos, Baudrillard a écrit de très belles choses sur le jogging, dont je dirais, si je me le permettais, qu’elles pourraient s’appliquer à toute forme d’activité physique imposée. Quoi qu’il en soit, les jeux de sport n’ont jamais trop été ma tasse de thé non plus. À quelques rares exceptions près, celles-ci datant d’un temps qui trahira mon âge auprès de nos plus jeunes lectrices que je reluque de manière dégueulasse en crapotant une clope taxée au premier venu lors de ces heures de débauche que nous offrent les Rades organisés par un magazine qu’elles n’ont pas de mal à trouver vu que leur week-end est entièrement dévoué à essayer les nouveaux tops de chez American Apparel. Punch Out fait justement partie des jeux de sport que je kiffe et sur lesquels j’ai pu passer des heures. À l’époque de la NES, pour qu’un jeu de boxe arrive à vous tenir des heures en ne vous faisant pousser que deux boutons lors de matchs à la mise en scène on ne peut plus sommaire (le joueur vu de dos, l’adversaire de face, caméra immobile), il fallait être sacrément balèze – je mets au défi n’importe quel éditeur de prendre le pari osé d’une telle ascèse vidéoludique et de s’en sortir avec les honneurs. Et pourtant, Nintendo n’a pas attendu parce que son remake de Punch Out est mis en scène identiquement au premier du nom. Qui l’eût cru (pas moi visiblement), ça fonctionne super bien, on est pris direct dans un jeu qui n’a ni cut scene en vidéo, ni graphisme réellement flamboyant (tous les persos originaux ont été modélisés et bénéficient d’un super joli cell ­shading, ce qui ne dira rien au lecteur pas accro à la 3D mais faites-moi confiance, le cell shading, c’est classe). Les personnages à peine écrits sont super charismatiques et les bad guys extrêmement kiffants. Qu’on retrouve le plaisir de jouer d’antan serait un argument de vente miteux. Victime d’un sentiment régressif ou pas, le gameplay basique a gardé toute sa fraîcheur : gauche, droite, à la gueule ou au bide avec uppercut possible, ça ne va pas plus loin. Mais là où Wii Sports avait effacé toute future tentative de jeu de tennis, Punch Out arrive de manière complètement légitime après le pauvre jeu de boxe super épuisant que l’anthologie proposait. Ici, on est face à un vrai jeu qui demande un sens de l’observation, de la stratégie et surtout qui nécessite d’appuyer sur les boutons au bon moment. Synchro et mécanique. L’essence du jeu vidéo. Et je préfère vous dire que si cette chronique continue et que Microsoft arrive à ses fins et sort sa caméra magique qui aboutira à la suppression des manettes, c’est pas dans ces pages qu’il faudra chercher à lire l’apologie de ce gadget pitoyable qui mènerait à la démocratisation du jeu vidéo en le nivelant par le bas. Ici, on sera bien réac’ et on continuera de vous bassiner en assénant de grandes vérités telles que : « Mais putain un jeu vidéo ça se joue avec une putain de manette ! Si tu n’as plus le challenge des boutons, si un jeu n’exige pas que tu te transformes en machine pour pouvoir le dompter, c’est pas un jeu vidéo, c’est juste une activité oisive et ­futile ! » – mais c’est une autre histoire. En attendant, les minettes qui traînent au Rade pourront me repérer quand elles entendront surgir du fond du bar ce genre d’éructations. Elles les considéreront dénuées de sens voire pathétiques mais, maturité aidant, elles finiront par les trouver terriblement romantiques et actuelles. AL BATARD DONKEY KONG JUNGLE BEATE
Éditeur : Nintendo
Plate-forme : Wii Bienvenue chez les mythes. Évidemment, Donkey Kong en est un. De la vieille arcade de café à la Wii, Donkey Kong passe toutes les décennies. On l’a aimé ou on l’a détesté. On l’a trouvé rigolo ou pathétique, plaisant ou pénible, charmant ou vieux. Un peu comme Bowie, quoi. Ici, on s’embarque dans un jeu classique sur une console qui le devient. Amusant ou désolant, donc. On se laisse emporter mais c’est pas la révolution non plus. On a connu de meilleurs jeux, des pires aussi… On se dit : « C’était mieux avant. » En bref, c’est pas trop mal. C’est bof, quoi. C’est toujours grossièrement le même scénario, les décors sont corrects, le gameplay aussi – bien que nos bras soient vraiment un peu trop mis à contribution – mais on n’a pas non plus envie d’y passer des heures. On n’a pas forcément envie d’y rejouer non plus. Donkey Kong a perdu de son prestige, vous savez. Un peu comme Keith Richard, on se demande si notre singe a bouffé trop de bananes ou s’il s’est assommé à coups de noix de coco, il est toujours là mais il peine à faire de bons titres. C’est ça alors de devenir mythique sans être mort ? On nous sort des vieux placards, encore un peu, pour pas qu’on nous oublie mais on fait un truc moyen sous prétexte que notre notoriété est suffisante ? Je trouve ça moche. En fait, c’est toujours un peu triste de constater que toucher à des personnages légendaires – ouais, comme Mickey si tu veux – sans les dénaturer ou les faire changer, évoluer, revient à réchauffer un kouign aman à la poêle. C’est pas bon. Alors pour la peine, je sors mon tourne-disque de collec’ et je pose Hunky Dory de Bowie. Parce que rien ne vaut « la belle époque » de nos héros. Parce que tous les connards qui ont essayé de revisiter Bowie se sont cassé les dents. Parce que j’ai vraiment pas envie de jouer à Donkey Kong. ZIZI STARDUST