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« Les Grecs n’aiment pas les menottes » : le pays se prépare à un référendum majeur

VICE News a demandé à des Grecs ce qu’ils pensaient du référendum de dimanche.
Photo par ORESTIS PANAGIOTOU/EPA

Difficile de faire des pronostics sur le vote des Grecs lors du référendum qui sera organisé ce dimanche. Les événements se sont succédés à un rythme étourdissant la semaine dernière, depuis la fermeture des banques jusqu'au défaut de paiement historique vis-à-vis du FMI, en passant par des demandes de renflouements de dernière minute. Les derniers gros titres ont impliqué des décisions et des déclarations émanant de poids lourds de la politique et de la finance en Europe. Pourtant, ce dimanche, la décision d'accepter ou non les termes du renflouement — une décision qui pourrait avoir une conséquence directe sur la tournure des relations entre la Grèce et la zone euro — sera prise par le peuple.

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Thymios Angouras est un chômeur de 31 ans qui vit à Athènes. Il a deux diplômes niveau master, et dit qu'il est sans emploi depuis le mois d'avril 2014.

« Ces cinq dernières années, nous avons vécu dans une austérité sans fin » a-t-il dit à VICE News.

« Nous avons vécu les conséquences d'un "oui". Voter "non" me donne un espoir pour demain puisque je n'ai rien à perdre. Je suis au chômage, et je n'ai aucun espoir pour le futur. Je sais que je peux tout perdre en votant "non", mais je sais aussi que j'aurai l'opportunité d'un nouveau départ. »

La question posée par le référendum demande aux Grecs s'ils acceptent ou non les conditions du plan de sauvetage européen. Ce plan implique entre autres des mesures d'austérité notamment des réformes fiscales et des coupes dans les pensions de retraite. La formulation de la question du référendum est jugée par certains énigmatique et peu compréhensible.

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Des chiffres suggèrent qu'approximativement 1,2 million de Grecs est au chômage. Pour les plus jeunes générations, les chiffres sont pires, avec près de 50 pour cent des personnes actives âgées entre 15 et 24 ans qui sont sans emploi. Si pour certains, comme Angouras, le référendum à venir représente un espoir de changement pour la moribonde économie grecque, d'autres voient le "non" comme une alternative encore plus déprimante.

Filiaghou Kyriaki Maria, une étudiante de 22 ans, a confié à VICE News que la possibilité d'une victoire du "non" — menant à une sortie de l'Europe et au retour à sa monnaie nationale — serait désastreuse pour la Grèce.

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« Je pense que cela ne devrait pas continuer comme ça. Je vois de la panique et un sentiment d'insécurité chez beaucoup de gens. Les gens ordinaires n'ont pas de connaissances techniques de l'économie. Je pense qu'en ce moment beaucoup de citoyens grecs ne comprennent pas le désastre que causerait un retour à notre monnaie nationale ».

L'issue du vote de dimanche reste — pour l'instant — incertaine. Selon un sondage publié ce mercredi par le journal Efimerida ton Syntakton, le "non" était en tête avec 54 pour cent des intentions de vote opposées au plan de sauvetage, face à 33 pour cent favorables. Toutefois, le sondage indiquait que l'écart s'est réduit, suite la décision prise dimanche dernier de fermer les banques et de limiter les retraits au distributeur à 60 euros par jour. Cette restriction ne sera levée qu'au lendemain du référendum, soit le lundi 6 juillet.

Les membres du parti au pouvoir Syriza ont appelé les citoyens à voter « non » lors du référendum. Dans un discours télévisé ce mercredi, le premier ministre grec, Alexis Tsipras, a incité les téléspectateurs à en faire de même. Il a ajouté que le vote portait simplement sur la manière de résoudre la crise de la dette. Il ne s'agit pas d'un vote concernant une éventuelle sortie de la zone euro, selon Tsipras.

Interrogé ce jeudi par la radio ABC, le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, a estimé que la Grèce pourrait être sortie de force de la zone euro. Néanmoins, le pays ne peut plus créer de drachmes, sa monnaie nationale. « Nous avons détruit les presses à imprimer — nous n'avons pas de presse à imprimer » a-t-il déclaré.

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Malgré cela, certains pays européens — dont le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne — ont insisté sur le fait qu'une victoire du « non » au référendum allait provoquer la sortie du pays de la zone euro.

Il semble pourtant que certains électeurs grecs restent indifférents face à de telles menaces.

Pour George Georgeopoulos, un professeur d'économie à l'Université de York qui se trouve actuellement à Patras, en Grèce, les électeurs grecs ne semblent pas particulièrement perturbés par ces menaces.

"Les gens à qui j'ai parlé et qui vont voter "non" m'ont dit qu'ils ne disent pas "non" à l'UE ou à l'eurozone, mais qu'ils sont contre les propositions actuelles. Ils disent, "On sait qu'ils ne vont pas nous exclure. On n'est pas dupe,"" explique Georgeopoulous.

"Il existe un risque de Grexit, mais d'après [les gens à qui j'ai parlé], l'eurozone veut éviter cela," indique Georgeopoulous. "Franchement, je pense qu'ils ont raison — je ne pense pas que les pays de l'eurozone vont expulser la Grèce si elle vote "non." »

Mais si les Grecs votent "non," le pays ne pourra pas se permettre la moindre complaisance, ajoute-t-il.

« La situation économique des cinq derniers jours sous le gouvernement de Syriza est pire que jamais. Les gens sont en colère. Ils me disent, "On a élu ce parti pour que les choses s'améliorent, mais elles empirent." »

« La situation ne fera qu'empirer s'ils votent "non," » estime le professeur.

Mais pour Efi S., une retraitée de 67 ans, les évènements des cinq derniers jours sont éclipsés par la situation des cinq dernières années.

« Je suis pour le "non" parce que depuis cinq ans les gouvernements successifs ont promis la croissance et il n'y a pas eu de croissance. La seule chose que j'ai vue en cinq ans, c'est la diminution de ma retraite et l'augmentation des impôts. »

« Ils ont sous-estimé ma dignité," ajoute Efi. "Je suis une scientifique, une personne éduquée qui a travaillé toute sa vie. J'aimerais dire que ces derniers jours m'ont fait penser à ce poète qui a dit, "Les Grecs n'acceptent pas d'être enchaînés." »

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