FYI.

This story is over 5 years old.

drogues

Un centre d’injection supervisée pourrait ouvrir à Québec en janvier

Ce serait le premier de la capitale et le cinquième de la province.
Street art - L'intervention Santé pour tous de Wartin Pantois - Crédit photo | Wartin Pantois

Ça fait plus de 15 ans que l'organisme Point de repères milite pour l'ouverture d'un centre d'injection supervisée (CIS) à Québec, et ses démarches pourraient bientôt porter leurs fruits.

Si tout se déroule comme prévu, on pense acheminer la demande d'exemption officielle à Santé Canada en novembre prochain, tandis que le centre ouvrira ses portes en janvier 2018.

Pour le moment, un comité s'affaire à rédiger les protocoles d'intervention du milieu communautaire et infirmier, étape essentielle de la mise en place d'un CIS. Il reste également à choisir le site en tant que tel. Le directeur de Point de repères, Mario Gagnon, indique avoir commencé à regarder les différentes options il y a un mois.

Publicité

Le centre sera situé dans le même quartier que l'organisme, à Saint-Roch. Il s'agit d'un des trois quartiers (avec Limoilou et Saint-Sauveur) les plus fréquentés par les usagers de drogues injectables. On estime qu'environ 900 d'entre eux pourraient utiliser le service d'injection supervisée à Québec.

On cherche un local situé au rez-de-chaussée, pour qu'il soit facilement accessible aux services d'urgence, et suffisamment grand pour abriter une zone d'accueil, une salle pour de trois à sept cubicules d'injection, des espaces pour que les intervenants puissent rencontrer les usagers et des espaces de débriefing.

L'option de réaménager les locaux actuels de l'organisme n'est pas exclue. « On cherche le moins cher possible! » s'exclame Mario Gagnon. « Il y a très peu de locaux disponibles au centre-ville, il va falloir négocier avec ça. On regarde tout ce qui pourrait être aménagé ou acheté. » L'organisme pourrait lui-même déménager dans les locaux du CIS, si l'espace et le budget le permettent.

Un milieu réceptif

Mario Girard a confiance que le projet qui lui tient à cœur depuis des années pourra se réaliser sans grandes embûches.

Il souligne le changement au gouvernement fédéral, qui a assoupli les règles des demandes d'exemptions. Ça a donné « un petit boost pour augmenter la cadence des démarches », dit M. Gagnon.

Partout, les astres semblent finalement s'aligner pour la venue du centre.

Publicité

D'abord, le travail s'est mis en branle à tous les niveaux. Le comité directeur du projet réunit les acteurs importants de différents milieux, dont la Ville de Québec, la Direction de santé publique de la Capitale-Nationale, les organismes communautaires et les autorités policières.

Le voisinage serait aussi ouvert à la venue d'un CIS. Mario Gagnon admet que les consultations citoyennes menées « autour de 2011 » avaient créé des remous : la Société de développement commercial (SDC) de Saint-Roch s'était vivement opposée au projet. Mais, selon lui, la situation a beaucoup évolué depuis.

« Le fait que ce soit maintenant ouvert à Montréal, qu'on en ait parlé beaucoup dans les dernières années, qu'il y ait eu beaucoup d'interventions sur le terrain… je crois que ça ne causera pas de grandes tensions à Québec », évalue-t-il. Il assure que transparence et concertation seront les deux mots d'ordre; on compte inclure les commerçants et les résidants dans tout le processus.

Finalement, M. Gagnon souligne que le gouvernement provincial semble enclin à appuyer leurs démarches. Le directeur se rappelle d'une conférence de presse conjointe de Point de repères et de Cactus Montréal en 2010, à laquelle les organismes avaient fait pression pour l'ouverture des CIS.

À la suite de ce cri du cœur, le ministre de la Santé et des Services sociaux d'alors, Yves Bolduc, s'était montré favorable aux projets. « Dès le départ, il nous a fait savoir que le financement serait au rendez-vous », raconte M. Gagnon.

Publicité

Lundi, lors d'une conférence de presse marquant l'ouverture de trois centres d'injection supervisée à Montréal, la ministre de la Santé publique du Québec, Lucie Charlebois, s'est également faite encourageante en réaction aux démarches de Point de repères.

« Quand ils vont déposer un projet qui va avoir du sens, et je ne doute pas qu'il va avoir du sens […], ils vont avoir un accompagnement avec notre Directeur national de la santé publique et le CIUSS du Centre-Sud. On va avoir plus la mesure de ce qu'ils ont besoin et, en fonction de ce qu'ils ont besoin, on va s'ajuster et on va faire les démarches nécessaires », a-t-elle indiqué.

Les leçons d'ailleurs

Mario Gagnon note l'appui des acteurs de Montréal, qui leur prodiguent des conseils notamment sur la façon de présenter leurs dossiers à Santé Canada.

Les recommandations sur le fonctionnement en tant que tel des centres viendront plus tard, puisque les CIS viennent d'ouvrir. Mais avec InSite à Vancouver et les discussions avec des pays d'Europe comme la Suisse, le directeur estime être déjà très bien préparé pour faire face à la suite.

Il tire cependant une leçon de la controverse entourant l'ouverture prochaine du CIS piloté par Spectre de rue, à Montréal.

Pour la petite histoire : des parents dont les enfants fréquentent l'école primaire Marguerite-Bourgeoys demandent à ce que le CIS n'entre pas en activité parce qu'il est situé tout près de l'établissement scolaire.

Mario Gagnon s'étonne de cette situation, puisque le service sera offert à même l'organisme, que celui-ci se situe au même endroit depuis une vingtaine d'années et qu'à sa connaissance, cela n'a jamais causé de problèmes avec le voisinage. Spectre de rue distribue d'ailleurs déjà du matériel stérile aux consommateurs de drogues injectables.

Selon lui, cette controverse inattendue est un rappel qu'il ne doit pas tenir pour acquise l'acceptabilité de son projet, même s'il décèle pour le moment une bonne ouverture. D'où l'importance d'être à l'écoute de son entourage.

Chose certaine, on ne s'approchera pas d'un établissement scolaire.

« La présence d'école a bien entendu été soulevée, et ce même par les personnes toxicomanes », rappelle M. Gagnon.