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SENEGAL

Six ans ferme pour Karim Wade, fils de l’ancien président du Sénégal et candidat à la prochaine élection

Il doit également payer une amende de 209 millions d’euros pour avoir acquis illégalement 178 millions d’euros alors que son père Abdoulaye Wade était au pouvoir.
Photo via Wikimedia Commons / rignese

L'ex-ministre sénégalais Karim Wade, 46 ans, a été condamné ce lundi à 6 ans de prison ferme et à une amende de 209 millions d'euros d'amende pour « enrichissement illicite ». Le fils de l'ancien président du Sénégal, Abdoulaye Wade, avait été désigné ce samedi comme candidat à l'élection présidentielle de 2017 par sa formation politique, le Parti démocratique sénégalais (PDS).

Des médias locaux rapportent que ce lundi après-midi, des manifestants scandaient « Libérez Karim » devant la résidence des Wade. L'ancien président serait venu les saluer depuis son balcon. En fin d'après midi la situation à Dakar — capitale de ce pays d'Afrique de l'Ouest, indépendant de la France en 1960 — était stable, loin de celle du 31 janvier dernier.

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Ce jour-là, l'ancien président avait bravé une interdiction de rassemblement à Dakar en faveur de son fils. Il avait forcé un barrage de police, traversant les gaz lacrymogènes debout sur son 4x4 pour atteindre la place de l'Obélisque, lieu prévu pour le rassemblement. Par la suite, Wade avait appelé à braver les interdictions de rassemblements de l'opposition organisés en faveur de la libération de son fils.

Karim Wade est en détention préventive depuis le mois d'avril 2013, accusé d'avoir illégalement amassé près de 178 millions d'euros grâce à divers montages financiers. Karim Wade est accusé d'avoir amassé des richesses sous la forme de plusieurs comptes en banque dans des paradis fiscaux, de biens immobiliers, de sociétés au Sénégal et de voitures. Un patrimoine qu'il aurait constitué entre 2000 et 2012, alors qu'il était dans le gouvernement de son père Abdoulaye Wade.

Le fils Wade — surnommé dans des médias sénégalais comme le « tout-puissant ministre du ciel et de la terre », tant son portefeuille était impressionnant quand il était ministre — nie ces accusations, et s'est présenté comme un « prisonnier politique » le premier jour de son procès en juillet 2014.

Karim Wade était jugé par la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI), une institution créée en 1981 mais tombée en désuétude dès 1983. Elle a été réhabilitée en 2012 par le nouveau président du Sénégal, Macky Sall, désireux de lutter contre la corruption. La CREI est critiquée par plusieurs associations des droits de l'homme, notamment parce qu'elle ne prévoit aucune procédure d'appel. Les avocats de Karim Wade ont cependant déclaré qu'ils se pourvoiraient en cassation devant la Cour suprême.

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Des journalistes de l'AFP qui se trouvent à Dakar, capitale du pays, rapportent que ce lundi, le palais de justice était placé sous forte surveillance policière. Des dizaines de partisans de Karim Wade auraient interrompu l'annonce du verdict par des hurlements, et des pleurs, toujours d'après l'AFP. Le père du prévenu, Abdoulaye Wade, 88 ans, s'est rendu à l'audience pour la première fois depuis le début du procès. Karim Wade n'était pas présent au palais de justice ce lundi.

Le 25 février 2015, Abdoulaye Wade avait déclaré à plusieurs reprises qu'il ne laisserait jamais le président Macky Sall — qui a pris sa suite en 2012 — condamner son fils. Ce week-end, il a accusé son successeur en exercice d'être un « descendant d'esclave » dont les parents mangeaient de la « chair humaine ». Il a toutefois demandé aux partisans de son fils de se rendre au palais de justice mais de ne pas manifester.

Plus tôt la semaine précédente, Macky Sall avait prévenu que son gouvernement ne tolérerait pas la moindre tentative de déstabilisation à l'annonce du verdict.

Les partisans de Karim Wade, estiment que leur candidat est victime d'une machination politique pour l'empêcher de se présenter face à Macky Sall, le président en exercice. L'un des avocats de Karim Wade, Me Amadou Lamine Sall, avait menacé le président le 15 février dernier : « Si Macky Sall fait emprisonner Karim Wade, il ne passera pas une seule nuit de plus au Palais. »

La semaine passée, les ambassades française et américaine ont donné des consignes à leurs ressortissants, les appelants à la « vigilance » et à ne pas se rendre dans les secteurs de Dakar où des manifestations pourraient avoir lieu après le verdict.

Suivez Mélodie Bouchaud sur Twitter : @meloboucho

Photo via Wikimedia Commons / rignese