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Des psychologues disent que «Trouve ta passion!» est un conseil de marde

Et peut aller jusqu’à faire de toi un lâche borné. À peu près.

C’est ce qu’on nous exhorte à faire depuis le plus jeune âge, à travers les ateliers d’art, les leçons de piano, les livres sur les dinosaures et les visites au planétarium : trouvez-vous une passion; la vivre à fond fera de vous un être épanoui.

[Ce thème universel a inspiré nombre de chefs-d’œuvre, dont Trouve ta voix, mettant en vedette Hilary Duff, NDLR.]

Une fois cette passion trouvée, on vous encourage à la poursuivre à travers vos études puis votre emploi, animés de la même ferveur qui a inspiré à Confucius (ou peut-être pas à Confucius) le proverbe « Choisissez un travail que vous aimez et vous n'aurez pas à travailler un seul jour de votre vie ».

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Des chercheurs en psychologie disent « bullshit ».

« Quelles en sont les conséquences? » demande Paul O’Keefe, coauteur d’une étude qui sera bientôt publiée dans Psychological Science, en entrevue avec The Atlantic. « On laisse entendre que, si ce que vous faites ressemble à du travail, vous n’aimerez pas ça. »

En pensant qu’une passion, ça se « trouve », te tombe dessus et te submerge, plutôt que « se développe », on en viendrait à croire que nos intérêts sont fixés ou prédéterminés.

Cette perception restreindrait nos champs d’intérêt et aurait des conséquences sur notre manière d’appréhender les difficultés.

L’étude, en bref

Par des tests menés auprès d’étudiants universitaires, les chercheurs ont observé que ceux qui croyaient que leurs intérêts étaient fixes étaient moins poussés à explorer de nouveaux sujets.

Par exemple, une personne qui a au départ un penchant pour les maths et les sciences a beaucoup moins envie de lire un texte sur la philosophie que quelqu’un qui a le même profil, mais qui croit que les intérêts se développent.

Aussi, les étudiants croyant aux intérêts prédéterminés avaient une vision assez idyllique d’une passion : ils l'associaient à une motivation, une inspiration insatiable. Se plonger dans sa passion n’entraînerait pas de réelles difficultés, selon leur conception de la chose.

Et justement, lorsqu’ils ont été confrontés à des difficultés d’un intérêt naissant, leur nouvelle flamme s’éteignait rapidement. Les chercheurs ont fait écouter aux étudiants une vidéo de Stephen Hawking dans laquelle le scientifique britannique vulgarisait les trous noirs. La plupart des étudiants ont alors dit être fascinés par le sujet. On leur a ensuite fourni un article scientifique sur le sujet, beaucoup plus complexe. Les étudiants ont soudainement perdu intérêt pour les trous noirs; ce désintérêt soudain était beaucoup plus marqué chez ceux qui croyaient aux intérêts fixes.

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En somme, les chercheurs pensent que, par rapport aux personnes qui croient que les intérêts sont fixes, celles qui croient que les intérêts se développent ont des attentes plus réalistes relativement à la poursuite de leurs passions, « ce qui pourrait les aider à persévérer ».

Ils concluent que les messages du genre « Trouve ta passion! » sont pleins de bonnes intentions : on dit aux jeunes de ne pas s’en faire avec l’argent ou le talent, mais de trouver ce qui est bon, significatif pour eux. « Malheureusement, la manière de penser que risque d’engendrer ce message peut avoir l’effet de miner le développement des intérêts d’une personne. »

Je garderai ça en tête la prochaine fois que je serai confrontée à de l’immonde pizza hawaïenne.

Justine de l'Église est sur Twitter.