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Crime

La mafia calabraise aurait eu des liens suspects avec des politiques australiens

La ‘Ndrangheta aurait fait du lobbying auprès de la classe politique australienne, par l’intermédiaire de gros donateurs, pour défendre ses activités, selon l’enquête d’un média australien.
L'ancienne ministre de l'Immigration, Amanda Vanstone. (Photo par Rob Griffith/AP)

L'une des organisations criminelles les plus puissantes du monde aurait utilisé des donations pour courtiser des figures de la politique australienne afin de protéger son empire, révèle une enquête menée pendant un an par un média australien.

Menée conjointement par l'émission Four Corners de la Australian Broadcast Corporation (ABC) et Fairfax Media, l'enquête affirme que la 'Ndrangheta, autrement appelée « mafia calabraise » (du nom de la Calabre, une région du Sud de l'Italie d'où l'organisation est issue), s'est liée avec des grands donateurs des partis politiques australiens, afin d'avoir « un visage public légitime » qui puisse défendre ses activités clandestines, et faire du lobbying en faveur de ses affaires légales, selon ABC online.

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L'enquête expose les liens entre le groupe mafieux et des personnalités politiques qui auraient été entretenus, malgré une enquête de la police fédérale sur des membres de la 'Ndrangheta — dont un parrain de Melbourne, Frank Madafferi — pour des faits présumés d'assassinat.

Malgré un arrêté de reconduite à la frontière pris contre Madafferi — qui faisait l'objet d'une enquête en Calabre à propos du kidnapping de la fille d'un responsable politique local et qui a ensuite été condamné par contumace à de la prison pour plusieurs crimes : extorsion, complot et agression à l'arme blanche — ses connexions politiques l'ont aidé à rester en Australie, annonce l'émission Four Corners. L'enquête suggère que sa famille a utilisé ses capacités à lever des fonds, auprès de responsables australiens, afin d'assurer un visa humanitaire que l'ancienne ministre de l'Immigration Amanda Vanstone lui a accordé en 2005, sous le gouvernement du Premier ministre John Howard.

En accordant ce visa, Vanstone a annulé la procédure de reconduite à la frontière dont faisait l'objet Madafferi. Elle et d'autres responsables impliqués dans cette décision ont affirmé qu'elle a été prise pour la sécurité de la famille de Madefferi. Plus tard, la police a publié un rapport qui ne fait pas état de preuves de corruption. Depuis, Vanstone a quitté la politique et n'a pas accepté d'être interviewée par Four Corners.

L'enquête affirme également que le fils d'un parrain présumé de la ville d'Adelaide, qui a fait l'objet d'une enquête pour trafic de drogue entre l'Europe et l'Australie, a bénéficié d'un stage à l'ambassade australienne de Rome en 2010, alors que Vanstone était ambassadrice de l'Australie en Italie. Bien que des responsables de la sécurité aient dit qu'il n'y a pas preuve que le fils soit impliqué dans des fuites de renseignements à l'ambassade, ils ont qualifié ce recrutement de stagiaire de faille de sécurité qui aurait pu compromettre une enquête internationale de police.

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La chaîne ABC a rapporté que l'enquête de l'émission Four Corners n'avait pas mis en évidence de comportement inapproprié de la part de Vanstone. Toutefois, l'émission a indiqué que des haut-fonctionnaires qui avaient travaillé sur le dossier du visa de Madafferi ont été révoltés par la décision d'infirmer l'arrêté de reconduite à la frontière.

A lire : Une cérémonie d'initiation de la mafia filmée pour la première fois par la police

À l'époque où il était premier ministre, Howard et d'autres cadres du Parti Libéral auraient rencontré un homme « profondément connecté à la mafia » lors d'une levée de fonds à but caritatif au début des années 2000, mais le reportage de Four Corners n'a pas indiqué si Howard était au courant du passé criminel de cet homme. L'enquête a par ailleurs montré que des donateurs, travaillant pour le compte d'un parrain de la mafia, avaient influencé des parlementaires de tous bords politiques sur des sujets en lien avec leurs affaires.

Des « vides » significatifs dans le système de donations politiques facilitent la corruption et rendent « difficile » l'identification de « pots-de-vin qui prennent la forme de donations à des partis » comme l'explique un rapport de 2009 rédigé par la police fédérale australienne, et cité par l'enquête grâce aux lois sur la liberté d'information. La chaîne ABC a rapporté que la police fédérale y décrivait « un manque de vérification et de surveillance ».

« Dans l'état, les partis politiques et les candidats peuvent recevoir d'importants soutiens et des contributions financières par des canaux qui ne sont pas concernés par le principe de transparence statutaire » indiquait le rapport, rendant « difficile » l'identification de « pots-de-vin qui prennent la forme de donations à des partis ».

Image : L'ancienne ministre de l'Immigration, Amanda Vanstone. (Photo par Rob Griffith/AP)