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590 minutes pour vivre : j’ai survécu au marathon Die Hard

Je suis un fan invétéré de John McClane et c'est pour cette raison que je vous déconseille fortement de payer une place de cinéma pour voir le cinquième volet de la saga.

Photos : Clément Brousse

Il m’est déjà arrivé de regarder 12 films en un week-end. C'est pas si compliqué si vous êtes bien organisé : quelques potes qui se relaient pour vous tenir compagnie, des pizzas dans le frigo, un peu d'herbe, et votre week-end ressemblera à cette scène d’Orange Mécanique que tout le monde connaît, mais en bien.En revanche, je n'avais jamais osé me taper toute une saga d'un coup, probablement parce que c’est un truc réservé aux nerds (ouais, je parle de vous, la diagonale Potter-Gollum), ou peut-être parce que l’idée de passer une douzaine d'heures enfermé avec des mecs qui transpirent beaucoup m'angoisse terriblement.

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Mais, quand j'ai su que le Grand Rex organisait un marathon Die Hard et que j’allais pouvoir voir Die Hard 5 quatre jours avant tout le monde, je n'ai pas hésité à débourser 31 euros pour ce privilège.

Prétextant avoir besoin d’un photographe, j’ai embarqué mon pote Clément dans l’aventure, qui ignorait pourtant jusqu’à l’existence de Hans Gruber. Pour être honnête, Clément n'était pas au courant avant vendredi bière+7 qu'il allait flinguer le premier samedi ensoleillé de février en s'enfermant de 11 heures du matin à minuit dans un cinéma du 8e arrondissement de Paris. On s'est donc pointés à la bourre au Rex, avec une agréable petite gueule de bois. J'ai englouti le reste d’une Red Bull périmée et on s’est assis à nos places, aux côtés d’environ 800 personnes aussi peu désireuses que nous de « profiter du soleil ».

DIE HARD : PIÈGE DE CRISTAL

On arrive pile au moment où McClane rencontre Argyle, son chauffeur. Je suis hyper content de voir Bruce Wilis avec des cheveux. Je m'émerveille devant le coucher de soleil sur Plaza Nakatomi, et encore plus quand Holly McClane apparaît enfin à l’écran – Clément, en revanche, déchante un peu en découvrant la femme du héros pour la première fois. J'explose de rire en voyant McClane faire des poings avec ses orteils. Je crois que c'est à ce moment-là que je me demande pourquoi Piège de Cristal, qui se passe pendant les fêtes de Noël, est sorti en plein été.

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À 13h15, on a déjà entendu le premier « Yippie ki-yay, motherfucker » (chaudement applaudi) mais on crève la dalle. On trace chez le vendeur de tacos en face du Rex. En sortant, on constate que les visages de nos compagnons de route sont aussi radieux que le ciel hivernal. Ils s'échangent des cigarettes et des sourires, mais personne n'ose mentionner Die Hard 4 – et encore moins le 5.

DIE HARD 2 : 58 MINUTES POUR VIVRE

Clément et moi, on s'accorde à dire qu'on a hâte de revoir McClane. Nos tacos engloutis, on file essayer de pécho une meilleure place. On arrive au milieu de la bande annonce de Fast & Furious 6, applaudie avec autant d'entrain que le Yippie ki-yay, motherfuckers. On commence à douter du sérieux de nos comparses.

Dès le début du film, la fourrière new-yorkaise embarque la bagnole de la belle-mère de John McClane. Je me rends compte que j'ai un pull qui ressemble au sien et que Clément s'enfonce doucement dans son fauteuil, bercé par les relents de guacamole et de la gueule de bois. Il rate la scène où le Colonel Stuart s'étire nu devant la télé et le crash du premier avion, qui plombe l'ambiance de toute la salle. C'est la merde : 200 innocents sont morts et Holly est la prochaine sur la liste. J'aurais pu flipper si je ne savais pas qu'on peut toujours compter sur McClane. Le film à peine fini, les spectateurs derrière nous débattent de la neutralité du Net. J'ai envie de rentrer chez moi et de me masturber.

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DIE HARD 3 : UNE JOURNÉE EN ENFER

Il est 16h15 et si John a la gueule de bois, moi, je dois tenir. Le générique suffit à me remettre d'aplomb. J'adore Die Hard 3. J'avais hyper besoin de blagues et la caméra de McTiernan est un violon sur l'adagio de cette journée. Putain, vous vous souvenez de la blague dans Taxi avec le mec qui doit aller à l'aéroport ? Elle est mille fois mieux dans Die Hard 3. Même Spike Lee était mieux quand il était joué par Samuel L Jackson dans Die Hard 3.

J'aurais aimé voir la fin originale du film, celle où McClane joue à la roulette russe avec un bazooka chinois contre le frère Gruber. Ce dénouement défonce, McClane devient encore plus revanchard que son ennemi. C'est Batman qui fait des énigmes à l'Homme Mystère. Je reste cependant d'excellente humeur, d'autant qu'on a eu une interaction sympa avec un nerd de la politique à propos des attentats du World Trade Center. C’est le cœur réjoui que je profite de la pause d’une demi-heure avant Die Hard 4 pour m’acheter un Orangina citron, du Coca vanille et un sachet de M&Ms enrichis en cacao.

DIE HARD 4 : RETOUR EN ENFER

La plupart des mecs s'énervent sur Die Hard 4 pour des raisons qui m'échappent. Vous n'aimez pas les films de hackers ? Quel genre de nerd êtes-vous, sérieux ? Y'a même Kevin Smith qui soupire dans ce film ! Les scènes d'action sont méga lisibles, les dialogues défoncent, McClane assume son âge et je peux pas m'empêcher de le trouver trop mignon quand il essaie de comprendre les technologies d'aujourd'hui (ce trick marche hyper bien depuis le deuxième volet). Et puis, le dialogue où McClane se fout de la gueule du méchant parce qu'il vient de buter sa meuf est hyper violent.

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McClane n'a plus un seul cheveu et le fait qu'ils utilisent des PDA m'avait déjà bien fait déconner quand le film est sorti. Bon, OK, Timothy Olyphant n'est pas le mec le plus badass du monde, mais le dernier climax arrache et ça me dérange pas du tout de voir McClane défoncer un F35 à l’aide d’un simple caillou ou jeter une voiture sur un hélicoptère.

DIE HARD 5 : BELLE JOURNÉE POUR MOURIR

La projection débute à 22 heures. À ce moment-là, je suis hyper confiant, les quatre films se sont globalement bien passés, Die Hard 4 était encore mieux que dans mon souvenir et en plus, d'autres potes se sont greffés à nous pour découvrir McClane encore plus vieux, encore plus fort, encore plus républicain. On est tous hyper heureux, la journée touche à sa fin et la salle crie des « Yippie ki-yay » à tout bout de champ. Je ne pouvais pas imaginer voir l'ultime volet dans de meilleures conditions.

La bande annonce laissait entendre des trucs prometteurs, genre des explosions, McClane en vacances en Russie et qui tombe sur son fils, le Kremlin : en un mot, des trucs cool. Et en fait, non. Que dalle. McClane part chercher son fils qui aurait mal tourné mais qui est en fait un agent de la CIA infiltré. C'est interminable. On comprend rien. Alors que la plupart des scènes d’action des quatre premiers films étaient ponctuées d'applaudissements sincères, la salle reste silencieuse tout le long du 5. Le dernier combat (McClane Senior et McClane Junior contre un hélicoptère de combat, ça sonne pas mal sur le papier) est le truc le plus bâclé de l'histoire du combat de l’homme contre l’hélicoptère. Toutes les blagues tombent à l'eau. J'ai envie de mourir de honte.

J'avais jamais vu autant de monde baisser la tête en sortant d'un film – et je suis quasiment certain d'avoir vu un mec sangloter. Le panache qui animait chacune des minutes de cette précieuse journée s'est peu à peu transformée en une colère maussade et j'ai vraiment eu l'impression que ma famille m'abandonnait. Cette nuit-là, j'ai fait d'horribles cauchemars dans lesquels John McClane se faisait violer par l'anus par des producteurs hollywoodiens. Exactement comme le spectateur que j’étais.