FYI.

This story is over 5 years old.

LE NUMÉRO TECHNOLOGIE

Livres et dvd

Ça fait une bonne semaine que je me demande si j’ai aimé ce livre ou pas et à vrai dire, j’en sais toujours trop rien. Il s’agit d’une grosse somme d’articles compilés à la fin des années quatre-vingt...

APOCALYPSE CULTURE

Sous la direction d’Adam Parfrey
Éd. Camion Noir Ça fait une bonne semaine que je me demande si j’ai aimé ce livre ou pas et à vrai dire, j’en sais toujours trop rien. Il s’agit d’une grosse somme d’articles compilés à la fin des années quatre-vingt sur toutes les formes de comportements « déviants » voire « hérétiques », censés annoncer l’apocalypse imminente à laquelle prétendaient les amateurs d’occultisme et de théories du complot à la fin du dernier millénaire. Force est de constater que l’apocalypse n’a pas encore eu lieu, et que je suis un peu gêné par la lecture proposée. En fait, je peine à trouver le lien logique qui permet de réunir l’incroyable interview d’une nécrophile (mon passage préféré, aussi bon que l’interview du cannibale que nous vous proposions dans Le Numéro à fendre le cœur), un entretien avec l’écrivain Peter Sotos, qui affirme son intérêt pour la misogynie active et l’extrême violence sexuelle, des extraits d’écrits de schizophrène, une étude sur l’autocastration, un entretien avec Fakir Masafar, adepte du SM et précurseur des modifications corporelles, l’histoire de The Process, une secte hippie néo-sataniste, un plaidoyer en faveur de l’eugénisme et une théorie du complot qui prétend que la droite chrétienne américaine faisait pression sur Reagan pour soutenir les sionistes en vue d’un Armageddon prochain en Israël (What the fuck?). Il m’en reste l’impression d’avoir visité une petite galerie des horreurs fraggle (putain, mais comment des gens peuvent-ils croire au pouvoir subversif des modifications corporelles ?) aussi datée que le mot « cyberpunk ». Ce qui me fait de la peine parce que j’aurais souhaité vous dire du bien des éditions Camion Noir, ce que je ferai dès que j’aurai fini de lire Les seigneurs du chaos qui raconte l’histoire du black metal en Europe, et qui a l’air d’être vraiment très bien, lui. BERNT OLD

Publicité

COMIC BOOK HOLOCAUST

Par Johnny Ryan
Éd. Humeur Avis aux amateurs de caca, notre ami et collaborateur Johnny Ryan est enfin traduit en français. Ce qui n’est pas facile à faire vu que ses blagues génialement vulgaires passent quand même bien mieux en anglais. C’est même la raison pour laquelle nous avons cessé de publier les planches qu’il réalise pour Vice US tous les mois, depuis toujours. Mais les éditions Humeur s’en sortent plutôt très bien et Johnny ne respecte toujours rien ni personne, surtout pas la merveilleuse histoire de la bande dessinée qu’il défonce ici en pastichant près de 120 héros parmi les plus populaires. Casper le petit fantôme revient hanter sa mère parce qu’elle a avorté de lui, Astérix a des problèmes avec l’odeur de sa propre bite, Superman laisse des commentaires désobligeants sur le blog de Batman, Astroboy ne peut pas s’empêcher de mettre sa bite dans le grille-pain, et Iron Man est tout rouillé parce qu’il s’est fait pipi dessus. Dit comme ça, ça sonne bien débile, et ça l’est, mais c’est cette débilité assumée qui fait de Johnny Ryan l’auteur de comics le plus drôle du monde, même en français. MATHIAS BERGEN

CONTROVERSES, UNE HISTOIRE JURIDIQUE ET ÉTHIQUE DE LA PHOTOGRAPHIE

De Daniel Girardin et Christian Pirker
Éd. Actes Sud/Musée de l’Élysée « Je suis hanté par ces souvenirs persistants de massacres, de cadavres, de haine, de souffrance… d’enfants affamés ou blessés, de tireurs exaltés », laissera comme note le photographe Kevin Carter avant de se suicider. Deux mois avant, en avril 1994, il avait reçu le prix Pulitzer pour Vautour guettant une petite fille en train de mourir de faim, Soudan (1993). Une photo qui avait d’abord ému le monde entier avant de créer une vive polémique : était-il coupable d’avoir saisi l’instant au lieu d’agir ? Bref, cette bonne vieille histoire du messager qui finit toujours par morfler. Bien sûr, Controverses présente d’autres clichés qui ont également fait débat comme celle de cette fillette colombienne coincée dans des débris après une coulée de boue et dont le monde entier assista à l’agonie. Ceux de la libération du camp de Bergen-Belsen. Mais les deux auteurs ne s’attardent pas seulement sur ce qui est évidemment visible et donné à voir mais aussi sur ce qui se cache derrière certaines photos : les questions fondamentales d’œuvre et de droit d’auteur. Ou comment la photo a gagné, devant les tribunaux, le statut d’art à part entière. Et comme on a de la suite dans les idées, nous on dit : Walter Benjamin. Pourquoi ? Parce que L’Œuvre d’art à l’ère de sa reproductibilité technique. LOUISE BOURGEOISE

WALTER BENJAMIN, UNE VIE DANS LES TEXTES

De Bruno Tackels
Éd. Actes-Sud Walter Benjamin et sa pensée nous attendent. Mégalomane, moi ? Pas là en tout cas : « Les choses anciennes nous regardent. Nous sommes attendus par elles », nous dit le maître. Car « toute œuvre du passé qui ne serait pas retenue par le présent comme une de ses préoccupations est menacée de disparaître à jamais ». Déconsidéré à son époque, jamais habilité à l’Université, il est pourtant reconnu, depuis sa mort en 1940, comme l’un des plus grands philosophes et sans doute le plus influent. Et si souvent l’exercice de la biographie se révèle soit insuffisant, soit inutile ou hagiographique, il ne pouvait être plus juste concernant ce penseur, critique littéraire, critique d’art et traducteur (le premier de Kafka en France) – cet homme a le don de faire passer n’importe quel hyperactif pour un oisif neurasthénique. Car il serait bien difficile de séparer sa pensée de sa vie. Et vice-versa (contrairement à beaucoup de pseudo-penseurs avec ou sans chemise blanche). Hannah Arendt a d’ailleurs écrit de lui : « Cet homme n’avait appris à nager ni avec le courant ni contre le courant. » Ça te la coupe, hein ? COCO DUFOUR