La Coupe du monde aura bien lieu

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La Coupe du monde aura bien lieu

Jeudi dernier, un nuage de gaz lacrymogène s’est abattu sur les manifestants de São Paulo.

Jeudi dernier, je me suis rendue à une manifestation à São Paulo. L'ironie voulait qu'elle soit organisée par les membres du groupe « Não vai ter Copa » [La Coupe n'aura pas lieu] à proximité du stade où allait se jouer le match d'ouverture de la Coupe du monde. Au début, il y avait surtout des journalistes qui s'étaient équipés de masques ou de diverses protections. Et il y avait la police, bien sûr. Avant l'arrivée des manifestants, il n'y avait que nous, les journalistes, et les policiers qui tapaient leurs matraques sur leurs boucliers antiémeute, ou tripotaient nerveusement leurs armes chargées de balles en caoutchouc.

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La manifestation m'a fait penser à celles d'Occupy Wall Street : des gens parlaient, d'autres jouaient des percussions tandis que des hauts-parleurs diffusaient de la musique. Après le match, les médias se sont attardés sur la simulation de Fred qui a permis à Neymar d'enfoncer la Croatie, mais dans les rues, de nombreuses autres injustices étaient dénoncées : le droit aux terres des populations indigènes, le droit au logement, la dénonciation de la corruption du gouvernement, le droit des travailleurs à un salaire décent étaient au centre des revendications. La présence au Brésil de la FIFA, l'une des organisations les plus corrompues du monde, contribue à ramener ces problèmes au premier plan ; et les manifestants profitent de l'attention mondiale pour élever la voix.

Au bout d'un moment, des gens encagoulés ont entassé des poubelles et divers objets en face des policiers avant d'y mettre le feu. La police a réagi rapidement, et un nuage de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc s'est abattu sur les manifestants, les obligeant à fuir. Au Brésil, ce qui a changé par rapport aux manifestations de l'an dernier, c'est que beaucoup plus de photographes sont présents aujourd'hui pour rendre compte de la violence policière. Mais ça ne semble pas avoir suffi à les dissuader de recourir à la brutalité.

Quand les policiers ont resserré l'étau, sans s'arrêter de tirer, les manifestants se sont réfugiés dans un gymnase. C'est à ce moment que les gaz lacrymogènes m'ont atteinte, et j'ai eu du mal à prendre des photos. À l'intérieur du gymnase, les gens semblaient effrayés, conscients que si la police rentrait dans le bâtiment ou décidait d'y lancer des grenades lacrymogènes, il serait impossible d'y 'échapper.

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Plus tard ce jour-là, on autorisa les personnes qui n'avaient pas été arrêtées à sortir et tout le monde se dispersa. La plupart décidèrent de rentrer chez eux, mais certains organisèrent une nouvelle manifestation spontanée devant un centre commercial.  Il n'y avait pas grand monde – une vingtaine de personnes tout au plus. Rapidement, la police revint à la charge et dispersa le petit comité à l'aide de gaz lacrymogènes. Pour la deuxième fois de la journée, je me suis retrouvée à bout de souffle, les yeux et la gorge brûlés.

De l'autre côté de la ville, une manifestation était également organisée à une station de métro où des manifestants ont utilisé un extincteur sur les policiers, qui ont répondu en les plaquant au sol pour les menotter. À en croire le déroulement de la journée, on dirait que la police est carrément déterminée à empêcher les Brésiliens mécontents de s'approcher des stades, et que personne dans les manifestations n'est à l'abri de leur méthodes de répression aveugle.

Ruth, Rafael et Felipe travaillent pour NINJA, un journal citoyen basé à Rio.