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Des chercheurs combattent les lésions cérébrales avec des bactéries intestinales

Avoir du caca dans le cerveau ne sera bientôt plus une insulte.
Image: Pixabay

Des neuroscientifiques de la Cornell University ont découvert qu'en exploitant le microbiote intestinal des souris, il était possible de réduire l'étendue des lésions cérébrales provoquées par un accident vasculaire cérébral.

Leur travail, décrit dans Nature Medicine, n'est pas un remède tout prêt contre les lésions cérébrales. Cependant, il apporte des données nouvelles sur un sujet très à la mode en biomédecine : la relation entre les intestins et le cerveau. De plus, il constitue un nouvel espoir pour les patients ayant subi un AVC ou possédant des risques de faire un AVC.

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L'accident vasculaire cérébrale est une urgence médicale absolue. Il est caractérisé par une variation du flux sanguin dans le cerveau, soit par infarctus, soit par hémorragie. Les neurones sont privés de leur approvisionnement en sang et meurent très rapidement. En cas d'issue non fatale, on observe habituellement une altération du fonctionnement cérébral dont des déficits cognitifs, la perte de la vision et/ou de la vue, des problèmes émotionnels, psychologiques, et, très souvent, une forme de paralysie qui peut s'accompagner d'une invalidité permanente.

Les capacités de l'individu peuvent parfois être regagnées partiellement grâce à la chirurgie et à la rééducation, sans la moindre garantie. Les interventions d'urgence consistent essentiellement à éliminer le caillot qui a provoqué l'AVC, généralement grâce des médicaments ou une intervention chirurgicale.

Le travail de Cornell est lié au couplage cerveau-intestin imposé par le système immunitaire. Suite à un accident vasculaire cérébral, des composés pro-inflammatoires sont produits dans les intestins et se déplacent vers le cerveau, où ils provoquent toutes sortes de problèmes inflammatoires et favorisent les lésions cérébrales.

Les microbes en question sont connus sous le nom de bactéries commensales. Elles vivent du côté des parties de votre corps exposées au monde extérieur (peau, voies respiratoires, intestins), un groupe de tissus connus sous le nom d'épithélium, et se nourrissent de ce qu'elles y trouvent. Bien que considérées comme de « bonnes bactéries », leur bonté est très provisoire : elles peuvent rapidement devenir de mauvaises bactéries au gré des humeurs du système immunitaire.

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Le cerveau après un AVC. IRM. Image: Wiki

Le système immunitaire est représenté par les lymphocytes gamma delta T sur les surfaces épithéliales. Ces dernières sont particulièrement abondantes sur la muqueuse intestinale. Leur rôle est comparable à celui d'un système d'avertissement destiné à stopper les infections et diriger la réponse inflammatoire du corps. Ces cellules font partie du système immunitaire périphérique, qui inclut tous les organes en-dehors du cerveau.

Pourtant, elles peuvent quand même avoir des effets sur le cerveau, même si ce phénomène demeure très mystérieux. « Le système immunitaire périphérique, qui inclue la fois les cellules immunitaires innées et adaptatives, a un rôle essentiel dans la physiopathologie des accidents vasculaires cérébraux et contribue à la neurodégénérescence secondaire en libérant des facteurs neurotoxiques ainsi que des exopeptidases, » explique l'article.

Ainsi, quand un accident vasculaire cérébral a pour effet d'affamer des neurones en les privant de sang, il faut s'attendre à une seconde vague de destruction amenée par les lymphocytes gamma delta T. Les neuroscientifiques ont découvert que ces cellules se ruent vers les méninges, l'interface entre le cerveau et la moelle épinière, à la suite d'un AVC. Il semblerait donc que les cellules immunitaires ont une sorte d'autoroute intestins-cerveau à leur disposition.

Les chercheurs ont donc modifié les bactéries intestinales en utilisant des antibiotiques et des greffes de matières fécales en provenance de souris traitées avec des antibiotiques. Ce faisant, ils ont pu réduire cellules destructrices tout en stimulant la production et le transport des cellules immunitaires anti-inflammatoires, appelées lymphocyte T régulateurs. Ils ont constaté qu'après l'induction de ces changements, un nombre réduit de cellules inflammatoires avaient réussi à parvenir jusqu'aux méninges, ce qui est évidemment une bonne chose. Qui dit moins d'inflammation, dit moins de dégâts cérébraux.

Il reste néanmoins beaucoup de travail à accomplir. D'une part, nous ne savons pas si les effets obtenus sur les souris peuvent être reproduits sur le corps humain. Il faudra sans doute un moment avons que l'on crée des salles transplantations fécales d'urgence dans les hôpitaux à destination des victimes d'AVC. Mais nous avons du moins appris des choses essentielles sur le système immunitaire et sa capacité à faire le lien entre notre tête et notre ventre.