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LE NUMÉRO HIN, HIN, HINHIN, HINHIN

Distant Planet

J'envie les chroniqueurs de drone et d'ambiant qui n'ont pas à souffrir des 120 coups de boutoir/minute assénés par la house et la techno lorsque la fièvre les consume. Les antalgiques sous la forme des produits

J’envie les chroniqueurs de drone et d’ambiant qui n’ont pas à souffrir des 120 coups de boutoir/minute assénés par la house et la techno lorsque la fièvre les consume. Les antalgiques sous la forme des produits de la culture récréative ou sous la forme d’aspirine ne règlent pas vraiment le problème. En temps normal, anticoagulants et musique accélérant le rythme cardiaque sont d’efficaces catalyseurs à psychotropes (il semble que les BPM compris entre 120 et 130 sont ceux ayant le plus grand effet excitant sur le cœur, qui tend à s’accorder à cette cadence). Mais si la recherche envisage de produire des antidouleur à base de cannabis, l’expérience de ce soir révèle l’impuissance du THC confronté et non plus allié aux effets de la 909 du dernier EP de Maurice Donovan en raison d’un cerveau malade. La musique a pourtant des vertus thérapeutiques reconnues depuis l’origine du monde (puisqu’Asclépios, dieu de la guérison et de la médecine, n’est pas sans raison le fils d’Apollon, dieu de la musique), bien que ce ne soit qu’après la seconde guerre mondiale que l’usage de la musique par le corps médical s’est vulgarisé dans le cadre des soins aux victimes du conflit. Comme tout médicament l’ordonnance doit être prescrite par un spécialiste mais les risques me paraissant faibles, je tente l’automédication en suivant les conseils de musicothérapeutes trouvés sur le net. Malheureusement mon état grippal caractérisé par stress et douleurs (maux de tête) semble nécessiter l’écoute de musiques qui s’apparentent à du Deep Forest, ou à ces disques que l’on trouve en animalerie-­jardinerie pour favoriser la croissance des plantes. Les musiques énergisantes ne sont recommandées que pour contrer la dépression ou distraire de la douleur quand celle-ci n’envahit pas votre matière grise. En dépit de ses indéniables qualités musicales, l’EP de Violence FM sur le label Premier Sang n’a donc aucun intérêt dans le cadre de cette cure. Pire, je sens mon état s’aggraver à mesure que le diamant s’approche du macaron. Le titre « Mental Fight » prend tout son sens lorsque votre corps frise les 40°. Méfiance : puisque la musique peut soigner, il est très probable qu’elle puisse aussi être la cause de maux terrifiants. Si la musicothérapie s’est développée pour pallier les ravages de la guerre, l’armée US, à l’inverse, n’a pas édité de compilations destinées aux interrogatoires pour aider les prisonniers à surmonter les sévices corporels infligés. Bien que je n’aie jamais compris l’engouement pour Steve Goodman (Kode9) et son label Hyperdub, je reconnais que Sonic Warfare, son livre consacré aux usages militaires de la musique (publié aux presses du MIT), jette un éclairage nouveau sur cette face obscure de la musique (et me fait soupçonner son auteur de vouloir saper le moral des Occidentaux pour le compte d’une puissance étrangère à l’aide de son label). Mais il n’est pas nécessaire qu’une organisation ni même un individu s’activent à notre perte, une tragédie pourrait advenir sans même que l’on s’en rende compte, sans qu’aucune volonté de nuire n’agisse. Personne ne semble avoir pris la juste mesure du danger que fait peser l’évolution des pratiques et des genres musicaux, à l’exception de ce courageux confrère anonyme du New York Times, qui dès 1881 nous a mis en garde : « Dans tous les comptes rendus des grandes pestes de Florence et Londres, on lit que des groupes d’hommes et de femmes arpentaient les rues en chantant, et que pendant la terrible épidémie de peste noire en Europe des pèlerins-chanteurs parcouraient la région de part en part. Habituellement l’historien fait remarquer que ces chanteurs étaient des individus rendus imprudents et désespérés par l’horreur des scènes qui les entouraient, mais il est bien plus probable que la peste soit le résultat et non la cause de ces chants de rue effrontés. Les sons musicaux nécessitent que l’on fasse vibrer l’air, et personne ne peut prétendre que la vibration de l’air causée par exemple par le chant de “Nancy Lee” ressemble à la vibration normale et saine de l’air due à des causes naturelles. Les médecins qui ont admis que la grande peste de Londres était due à un état anormal de l’atmosphère devaient avoir compris que cet état était le résultat de la vibration causée par les chanteurs de rue. La peste n’a jamais touché les régions où chanter et jouer d’un instrument de musique étaient des pratiques inconnues, et s’est avérée bien plus mortelle dans les villes où ces pratiques avaient cours que dans les campagnes où la musique est rarement entendue […] C’est la trompette qui a fait s’élever le taux de mortalité à New York de 21 à 36 %. La méningite céphalo-rachidienne et la maladie de Bright, toutes deux si rares avant l’arrivée de cet instrument qu’elles étaient quasiment inconnues, font désormais partie de nos pathologies les plus communes. Elles sont le résultat de la vibration anormale de l’air causée par le cornet qui agit sur le système nerveux. Si l’on pouvait connaître les statistiques exactes des morts causées par la trompette dans cette seule ville depuis 1871, l’on serait probablement plus abasourdis que nous ne l’avons jamais été. Les sons musicaux comptent donc parmi les plus actives causes de maladie […] » Si l’expérience tend à prouver que Mozart rend « intelligents » les enfants, permet une meilleure concentration et aide à la décomposition des particules en suspension dans les eaux usées des stations d’épuration, rien n’assure que les musiques contemporaines soient aussi profitables à l’humanité, et il est peut-être temps de se demander si ce magazine ne participe pas sans même s’en rendre compte à l’avènement et à la diffusion du prochain fléau à s’abattre sur l’humanité. Maurice Donovan – Call My Name (MAURICE 001),
White Label, Londres
John Heckle – Hard Sleeper/Ancient Deep (SIG.MMXI.IV),
Signals, Newcastle
Violence FM – To Live and Die (Premier Sang #03),
Premier Sang, Paris
Clio – Eyes (C#CC021), Clone Classic Cuts, Amsterdam
Space Dimension Controller – The Pathway to Tiraquon6 (RS1109), R&S Records, Londres