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LE NUMÉRO « FICTION 2013 »

Bitches Be Writing

De tous temps, des putes ont pris la plume. Voici une sélection de nos écrivaines préférées.

Illustration : Kara Crabb

1634-1693 MADAME DE LA FAYETTE
Voltaire a écrit : « La Princesse de Clèves de La Fayette fut le premier roman où l’on vit les mœurs des honnêtes gens décrites avec grâce. Avant elle, on écrivait d’un style ampoulé des choses peu vraisemblables. » Voltaire a dit pas mal de conneries dans sa vie, et je pensais que cette citation en faisait partie jusqu’à ce que je me penche sur ce roman où toutes les femmes portent de la dentelle. Ce jour-là, j’ai réalisé que ce philosophe relou avait raison.

1799-1874 LA COMTESSE DE SÉGUR
D’origine russe, Sophie Rostopchine est la femme de lettres française préférée des bibliothèques d’école primaire. Turbulente enfant des steppes, c’est son histoire d’amour avec Eugène de Ségur, alors ambassadeur de France en Russie, qui l’aurait assagie. Mais lorsqu’Eugène ramène Sophie à Paris, tout part à vau-l’eau : il s’endette, s’oublie et pine régulièrement la bonne. Sophie, déprimée, se réfugie alors dans l’éducation de ses enfants. Ses talents de conteuse finissent par être reconnus, et la Comtesse sortira son premier recueil à plus de 50 ans, devenant la première écrivaine émancipée de toute l’histoire des femmes trompées. 1804-1876 GEORGE SAND
Outre avoir écrit une lettre coquine à Alfred de Musset, George « My balls and my word » Sand, née Amantine, est la première femme à avoir assumé un style vestimentaire de mec à une époque où avoir un vagin était d’office considéré comme un manque de respect. Si cette histoire de pseudonyme masculin est un aveu d’échec, George Sand a été suivie par un paquet de femmes, dont Marie d’Agoult devenue « Daniel Stern » et Delphine de Girardin devenue « Charles de Launay ». 1896-1970 ELSA TRIOLET
Rien que parce qu’elle a inspiré le poème d’Aragon Les Yeux d’Elsa, Elsa Triolet défonce. On peut ajouter à son crédit que 1. ses romans sur la solitude sont les plus beaux au monde, 2. elle était pote avec Maïakovski, 3. elle était pour la révolution russe jusqu’à ce qu’elle se rende compte qu’elle était menée essentiellement par des gros cons. 1908-1986 SIMONE DE BEAUVOIR
C’est en grande partie grâce à elle que vous avez le droit de ne pas vouloir d’enfant si jamais vous tombez enceinte. À la mort de Sartre, elle a dit un truc qui résonne encore depuis les abîmes : « Sa mort nous sépare. Ma mort ne nous réunira pas. C’est ainsi ; il est déjà beau que nos vies aient pu si longtemps s’accorder. » 1914-1996 MARGUERITE DURAS
Fille de colons en Cochinchine, elle s’oppose à la guerre en Algérie ; maîtresse d’un agent de la Gestapo, elle le fait condamner à mort à la Libération. Elle a écrit Moderato Cantabile, probablement le seul roman à ne pas devenir chiant au bout de la 10e page – il ne le devient qu’à partir de la 50e. À la fin de sa vie, elle fumait tellement de clopes qu’elle a fini par ressembler à Harvey Keitel. C’était la meilleure de toutes.